L'opinion de Bernard Landry #18

Harel: bonne nouvelle!

Montréal - élection 2009


Il est de bonne augure pour la démocratie municipale et la gouvernance de notre métropole qu'une personne de la qualité de Louise Harel accepte de poser sa candidature à la mairie. Surtout en une période qui n'est pas de tout repos.
Tout le monde connaît le haut niveau d'estime que j'ai pour cette femme. Cela ne veut pas dire que je n'en ai pas pour Gérald Tremblay, mais lui-même devrait se réjouir de voir se préparer une véritable élection entre personnes bien placées pour aborder en profondeur les sérieux problèmes de l'heure. Intéressant aussi de voir le pluralisme politique qui se reflète dans les deux principaux camps. Ainsi éclairé, l'électorat sera en meilleure position pour trancher en faveur de l'intérêt véritable de Montréal.
On ne saurait oublier que c'est Louise Harel et le gouvernement de Lucien Bouchard qui ont eu le courage de réaliser ce que tous les maires de Montréal réclamaient depuis au moins Jean Drapeau: "Une île une ville". Toutes les enquêtes et analyses menaient à ces regroupements. Le temps d'agir était plus que venu. Louise Harel a pris ses responsabilités.
On dit souvent que les gouvernements pensent plus à leur réélection qu'à l'intérêt public. Ce n'est certainement pas le cas pour les fusions. On dit qu'à elles seules elles auraient fait perdre 25 comtés à un gouvernement qui jouissait d'un taux de satisfaction qui aurait dû assurer sa réélection.
Ce geste déterminant a été posé pour des raisons profondes. Les mêmes qui ont poussé la plupart des gouvernements démocratiques à consolider leurs grandes agglomérations urbaines. Le gouvernement du Québec l'a fait pour la ville de Laval qui s'en félicite encore. Ottawa, Toronto, Vancouver ont fait la même analyse. Cette façon de procéder relève maintenant de l'évidence à peu près partout.
Les libéraux de Jean Charest ont prétendu faussement que les citoyens d'une municipalité détenaient le droit d'en définir les frontières. Accepter une telle vision équivaut à faire dériver la démocratie au service de l'injustice sociale, de l'inefficacité et de divers intérêts particuliers contraires au bien commun.
Les gouvernements nationaux ont donc non seulement le droit, mais le devoir de définir les frontières municipales dans l'intérêt collectif. C'est ce que Louise Harel a conçu et réalisé avec courage. Comment aurait-elle imaginé que le gouvernement suivant, dans l'absurdité la plus complète, rendrait possible la démolition totale ou partielle d'une réforme aussi fondamentale.
Le ravage des défusions, une des fautes politiques les plus graves de l'histoire du Québec, s'est par ailleurs produit presque exclusivement dans la métropole. Chicoutimi et Jonquières, Québec et Sainte-Foy, et tant d'autres, ont sagement réalisé l'affreuse erreur de Jean Charest et se sont abstenues d'utiliser le pouvoir destructeur qu'il leur offrait.
À Montréal, ce fut autre chose et cela aggrave la faute libérale. Le fractionnement s'est fait largement sur des bases ethno-linquistiques. Durant la brève existence de la grande ville, j'ai éprouvé une des belles émotions citoyennes de ma vie en voyant Robert Libman, ancien maire de Côte Saint-Luc, assis à la droite de Gérald Tremblay pour consolider une entité urbaine intégratrice et socialement juste.
La fusion mettait notamment fin à cette injustice sociale qui permettait à des gens des banlieues cossues de profiter des avantages d'une grande métropole sans en assumer véritablement et totalement les coûts. Pour Louise Harel qui a toujours recherché passionnément la justice sociale, cet argument était évidemment majeur.
Quand à l'intégration linguistique et culturelle, elle était aussi un des fondements de l'opération. Les nations elles-mêmes ne se définissent plus aujourd'hui par l'ethnicité. Comment peut-on oser l'invoquer, comme cela fut fait par certains opposants, pour fixer des frontières municipales. Louise Harel a toujours travaillé ardemment à la convergence culturelle et aux relations harmonieuses entre Québécois de diverses origines. Cela reste encore un défi primordial pour l'île de Montréal que l'action destructrice de Jean Charest a par ailleurs singulièrement compliqué.
D'après les sondages, qui ne sont évidemment pas une élection, il est tout à fait possible que nous ayons une autre bonne nouvelle concernant Louise Harel à l'automne. Elle pourrait être appelée à diriger une des grandes villes francophones de la planète. Elle a toutes les compétences, y compris linguistiques, pour le faire. Si un unilingue anglophone peut diriger la capitale fédérale du Canada, qu'on laisse Louise Harel tranquille: l'anglais, ça s'apprend et des traducteurs, ça existe. Bonne chance Louise!


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