Paris | Au terme d’une longue réunion, gouvernement et partenaires sociaux ne sont pas parvenus à trouver un compromis jeudi sur la réforme des retraites, contestée depuis deux semaines, éloignant l’espoir d’un retour à la normale des transports publics pendant les congés de Noël.
«Rien de concret (...) le premier ministre n’a pas entendu la rue», a déclaré à l’issue de la rencontre Philippe Martinez, leader du syndicat CGT à la pointe de la contestation qui paralyse les transports depuis le 5 décembre, en particulier en région parisienne.
L’intersyndicale (CGT, Force ouvrière, CFE-CGC, Solidaires et FSU), qui réclame le retrait pur et simple du projet du gouvernement, a appelé à une nouvelle journée de manifestations et de grèves le 9 janvier, a annoncé M. Martinez dans la foulée.
Un appel auquel ne s’est pas jointe la CFDT, le premier syndicat français qui soutient le principe de la réforme, mais s’oppose à une mesure visant à inciter les Français à travailler plus longtemps.
Les syndicats ne sont pas tous sur la même ligne face au système à point voulu par le gouvernement pour remplacer les 42 régimes de retraite existants, dont des régimes spéciaux qui permettent notamment aux conducteurs de train de partir plus tôt.
Le secrétaire général de la CFDT, Laurent Berger, a ainsi salué jeudi soir le « climat constructif » des discussions avec le premier ministre Édouard Philippe. Il a toutefois souligné qu’il restait « un point dur » sur la mise en place dès 2022 d’un « âge d’équilibre » de 64 ans. Cette mesure vise à maintenir l’équilibre financier du système, chacun pouvant continuer à partir à la retraite à 62 ans, mais avec un malus sur sa pension et un bonus pour ceux partant après.
De son côté, M. Philippe a estimé que la rencontre avait permis des «avancées» et annoncé qu’il réunirait de nouveau les partenaires sociaux «dans les premiers jours de janvier».
«La grève continue»
Dans l’immédiat, le chaos dans les transports risque de se poursuivre pendant les vacances de Noël, qui débutent vendredi soir, la CGT-Cheminots, principal syndicat au sein de la compagnie ferroviaire SNCF, ayant décidé de poursuivre la grève.
«La grève continue» et «deux actions sont programmées: le Noël des grévistes et des rassemblements le 28 décembre», a annoncé à l’AFP Laurent Brun, secrétaire général de la CGT-Cheminots, dont l’organisation représente environ un tiers des conducteurs de train et plus de 40% des contrôleurs.
L’Unsa ferroviaire, deuxième syndicat de la SNCF, a pour sa part demandé «une pause pour les vacances scolaires», a précisé à l’AFP son secrétaire général, Didier Mathis.
Près de 60% des trains prévus les 23 et 24 décembre ont pour l’instant été annulés à cause de la grève des cheminots.
Ces quinze jours de grève - qui ont aussi entraîné des blocages de ports ou de raffineries - commencent à peser sur l’économie. Les secteurs du commerce et du tourisme, pour lesquels la période des fêtes est cruciale, ont notamment vu leur chiffre d’affaires chuter de 25 à 45%. La situation est «catastrophique à Paris», selon l’Union des métiers et industries de l’hôtellerie (Umih).
Le système de retraite est un sujet éminemment sensible en France, la population restant attachée à un système par répartition jusqu’à présent réputé comme l’un des plus protecteurs au monde.
L’exécutif promet un dispositif «plus juste», quand les opposants à la réforme redoutent une «précarisation» des retraités, avec un départ plus tardif et des pensions plus basses.
Les détracteurs du projet comptent sur l’impopularité du président Emmanuel Macron pour sortir victorieux du conflit et sur un contexte social tendu depuis la mobilisation du mouvement social des «gilets jaunes», mais aussi sur les mécontentements exacerbés dans les hôpitaux et parmi les étudiants, les policiers et les agriculteurs.
Cette réforme est une promesse de campagne du président Macron, qui a fait de la «transformation» du pays la raison d’être de son quinquennat. Il joue donc gros dans ce conflit.
Des cortèges de manifestations ont été organisés jeudi dans toute la France. Lors des journées de mobilisation des 5 et 17 décembre, respectivement 806 000 et 615 000 personnes selon le ministère de l’Intérieur (1,5 et 1,8 million selon le syndicat CGT) ont manifesté dans le pays.