En annulant la cérémonie officielle prévue au chantier naval de Saint-Nazaire vendredi dernier pour la remise du premier bâtiment de projection et de commandement (BPC) Mistral commandé par la Russie, Paris s'est placé dans une position plus que délicate, écrit lundi le quotidien Rossiïskaïa gazeta.
Les délais fixés par le contrat sont écoulés et, comme l'a fait clairement comprendre Moscou, si la France ne tenait pas ses engagements d'ici la fin du mois elle devrait faire face à des réclamations financières conséquentes.
Selon Le Figaro, le Mistral a mis François Hollande "au pied du mur". L'ex-président français Nicolas Sarkozy a clairement identifié samedi la solution: le prédécesseur de Hollande à l'Elysée, sous la présidence de qui a été signé le contrat des Mistrals, a qualifié la Russie de "partenaire naturel de la France". Et d'ajouter que Paris devait "tenir sa parole" et livrer les navires à la Russie. Sarkozy s'est bien évidemment fait le plaisir de piquer au vif le président socialiste. Il a qualifié "d'indigne" sa décision de geler la transaction juste avant le sommet de l'Otan de septembre, simplement parce que "le président américain lui avait demandé de le faire". Il a également rappelé le principe du général de Gaulle: la France doit définir sa position elle-même, pas suivre les conseils ou les volontés des autres.
Le politologue Jacques Sapir, directeur d'études à l’École des hautes études en sciences sociales (EHESS), pense que cette décision sera retardée le plus longtemps possible, dans l'espoir que s'ouvre une opportunité. "Bien évidemment, Paris voudrait honorer ce contrat en livrant les navires à la Russie. C'est aussi bien une question d'argent, ce qui n'est pas insignifiant vu les difficultés économiques actuelles, que de préjudice pour la réputation de l'industrie de l'armement française si la transaction était annulée. Cependant, il faut tenir compte de la pression exercée sur Paris par les alliés de l'Otan. Et pas seulement des USA. Ce que Hollande craint le plus, d'après moi, c'est la scission du consensus dans le cadre de l'UE où de nombreux États, dont la Pologne et les pays baltes, voient la livraison des Mistrals à la Russie d'un très mauvais œil", explique Jacques Sapir.
"Le gouvernement français prend des engagements qu'il est incapable de tenir. On devine facilement quelle sera dorénavant la réaction des acheteurs potentiels d'armement français, par exemple, des Brésiliens et des Indiens qui négocient pour acheter des chasseurs Rafale", conclut le politologue.
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