Finalement, nous ne sommes rien?

Pourtant, l’identité québécoise existe, même si, aujourd’hui, elle agonise

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Les chantres (les chancres ?) de la déconstruction de nos repères identitaires






Bernard Derome est peut-être à la retraite, mais la société québécoise le passionne encore. Avec les années, il a changé d’habit. Il est devenu un homme engagé, comme on le voit avec Crise d’identité, qu’il présentera demain soir, 21 h, à Télé-Québec. Officiellement, il a fait un documentaire. Dans les faits, il a produit un manifeste pour déconstruire nos repères identitaires.




Ses invités sont bien choisis pour nous le faire comprendre. Chacun, à sa manière, est là pour jouer son rôle. Parmi ceux-là, il y a le peintre Marc Séguin qui nous explique, avec sa superbe New Yorkaise, que nous devons cesser d’accorder une importance exagérée au français. Pour lui, Gilles Vigneault et Félix Leclerc représentent moins l’identité québécoise que Simple Plan. Ah bon?




Condescendance




C’est la condescendance des branchés mondialisés, qui regardent le Québec comme un pays insignifiant dont il faudrait se sortir pour enfin grandir. Séguin reprend même les poncifs éculés qui veulent que les Québécois se méfient du succès individuel. C’est bien évidemment faux. Mais ils se méfient de ceux qui, en s’élevant, croient devoir renier les leurs. Faut-il le leur reprocher?




Dominique Anglade, qui conjugue l’arrivisme professionnel décomplexé avec le fédéralisme dogmatique, nous explique que nous ne devons pas nous enfermer dans la langue française. Elle n’est pas la seule. Le Québec, en un mot, devrait être multilingue. Bernard Derome lui-même va jusqu’à demander si le français n’est pas un obstacle à ­notre ouverture au monde.




Traduisons son propos: notre identité n’est-elle pas une prison dont il faudrait se délivrer pour embrasser le monde? Jean Bouthillette, autrefois, parlait de notre tentation de la mort. Elle se dissimule aujourd’hui dans le discours de l’ouverture sur le monde.




Il faudrait consentir au multiculturalisme, comme nous y invite implicitement la juge Louise Harbour.




Même Robert Lepage y va de son couplet pour nous expliquer que nos racines françaises comptent moins que nos affinités anglaises. C’est une vieille obsession: le désir de rompre nos liens avec la France, comme si la langue n’était qu’un outil de communication sans ancrage identitaire. Elizabeth Plank, qui s’est américanisée volontairement, représente-t-elle notre avenir?




En un mot, nous ne sommes rien. Ni francophones, ni français, ni catholiques, ni laïques, ni souverains, ni distincts. Crise d’identité, de Bernard Derome, nous explique que nous ne sommes ni un peuple ni une nation, à peine une société qui aurait toutefois l’immense défaut de cultiver exagérément le sentiment de sa singularité. Charmant! Merci beaucoup!




Vive Vigneault !




Et pourtant, l’identité québécoise existe, même si, aujourd’hui, elle agonise. Ils sont deux sur quatorze à se




porter à sa défense dans ce film. Il y a d’abord Boucar Diouf. Il explique à sa manière imagée qu’une société, c’est aussi une culture partagée. C’est un fin psychologue de l’âme québécoise. Et il y a surtout Fred Pellerin. C’est un conteur magnifique et enraciné.




À sa manière, c’est l’héritier de Gilles Vigneault. On y revient toujours. Quiconque ne voit en Vigneault qu’un poète parmi d’autres ne comprend pas qu’il a ranimé par ses légendes la part sacrée de notre identité. Son œuvre puissante parle de l’être




intime des Québécois. Elle nous en




apprend davantage sur nous-mêmes que le pamphlet laborieux et militant de Bernard Derome.




 



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