Selon certains, la victoire surprise de Fillon lors du premier tour des primaires aurait consacré la victoire d’une « révolution conservatrice » à la française, notamment en ralliant massivement un électorat largement catholique issu de la Manif pour tous et en commettant un ouvrage à succès sur le fondamentalisme islamique. Face à un Ali Juppé mondialiste et islamophile et un Sarkozy dont la duperie a fini d’abuser les plus naïfs, la route était large pour Fillon.
Et c’est non sans une certaine inquiétude qu’à Nanterre l’on doit appréhender ce nouvel adversaire autrement plus difficile à combattre qu’un Juppé, caricaturale figure de l’oligarchie mondialiste.
L’on voit, ici ou là, des conservateurs se rallier sans le moindre recul, comme des groupies vers une starlette en proclamant la patrie en danger et en y voyant le nouvel homme providentiel occupant l’espace en jachère de la « droite hors les murs ».
Exit, donc, ces décennies où Fillon a toujours fait figure d’un éternel second gestionnaire encaissant les humiliations de Sarkozy comme une femme cocue et battue, associé à des gouvernements successifs qui ont mené la France à la ruine et au chaos. Il serait devenu le nouvel homme de fer, le Thatcher français incarnant ce besoin d’autorité si cher aux Français alors qu’il a tant fait penser à Bernard Blier dans Le cave se rebiffe pendant toutes ces années.
En définitive, Fillon nous refait le coup de 2007, lorsqu’à l’approche des présidentielles, Sarkozy adopta pragmatiquement la ligne Buisson pour siphonner l’électorat d’un Le Pen qui se perdait dans les méandres d’une campagne illisible sur la dalle d’Argenteuil au lieu de revenir aux fondamentaux, à savoir la défense de l’identité nationale. On peut craindre que la ligne Philippot, qui relègue le débat identitaire au second plan au profit d’un discours anxiogène sur l’euro et sociétalement libertaire, soit de nature à réenclencher ce processus.
Car ne nous y trompons pas : Fillon n’est pas le nouveau héraut de la révolution conservatrice, il est la réactivation de la vieille droite orléaniste, celle qui a toujours trahi le peuple, lorsqu’elle n’a pas tiré sur lui.
Une dose de conservatisme de façade plus que de convictions (mais qui suffit à cette droite versaillaise qui voudra toujours concilier sa bonne conscience avec son portefeuille) – confer son discours sur l’avortement et sa timidité sur l’abrogation de la loi Taubira –, une grande dose d’ultralibéralisme, qui n’a rien à voir avec la liberté d’entreprise, où l’on peut imaginer que les petits et les sans-grade n’y trouveront certainement pas leur place.
Cette droite orléaniste a toujours trahi le peuple et est aux antipodes du combat des catholiques sociaux pris en tenaille entre la démagogie marxiste et l’incroyable cupidité du capitalisme financier sans scrupule si bien dénoncé par Léon XIII dans Rerum novarum.
Gérald Darmarin ne s’y trompait pas, lui, le député du Nord qui, dans les bureaux de vote, n’avait pas vu beaucoup de prolos. La France des « oubliés », taillée en pièces par la mondialisation sauvage, avait déserté les bureaux de vote de la primaire. Or, quel discours tient monsieur Fillon pour ces petits ? « On ne parle pas du bon Dieu à un pauvre quand il a le ventre vide », disait si bien saint Vincent de Paul.
Le peuple français a déjà perdu suffisamment d’années avec l’imposture Sarkozy pour se permettre le luxe d’une nouvelle désillusion. Non, Fillon n’est pas l’homme providentiel mais un homme du passé, vrai mou déguisé en faux dur. Fillon est l’alibi des propres lâchetés de cette droite bourgeoise qui, sous couvert d’ordre, ne combat que pour son confort et ses propres velléités.
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