Le ministre des Finances, James Flaherty, est applaudi par ses pairs du Parti conservateur, hier à Ottawa, lors de la présentation du budget. (Photo Reuters)
Le 19 février dernier, lors de la publication d'une analyse sur les finances publiques canadiennes, les Études économiques du Mouvement Desjardins suggéraient au gouvernement Harper de mettre moins d'accent sur le remboursement de la dette et davantage sur des investissements structurants pour l'ensemble des acteurs de l'économie canadienne.
Nous ne contestions pas les 3 milliards mis à chaque exercice financier à cette fin. Au contraire, nous l'endossions entièrement. Cependant, alors que le ratio dette/PIB est déjà sous les 30%, soit tout près de l'objectif de 25% que s'était fixé le gouvernement, il nous semble que d'autres choix ou priorités s'avèrent plus importants.
Il faut toujours raisonner en termes de coût d'opportunité. Quand vous utilisez des ressources à des fins particulières, il faut se questionner sur les bénéfices qu'on aurait pu en retirer si la même somme avait été investie ailleurs. Rembourser la dette est louable et totalement justifiable surtout si la dette devient un trop lourd fardeau et qu'elle entraîne des effets pervers sur l'économie ou sur les finances publiques. Cependant, si le remboursement de la dette se fait au détriment d'une économie plus efficiente, plus productive et plus concurrentielle, cet objectif est moins louable.
Aujourd'hui, la situation générale de l'endettement du gouvernement du Canada est loin d'être dramatique et se compare avantageusement à la plupart des grands pays industrialisés. Compte tenu des besoins considérables en matière d'infrastructures urbaines, en environnement, en santé ou en éducation et de la difficulté de plusieurs provinces d'équilibrer leur budget, nous avions suggéré au gouvernement d'utiliser les surplus au-delà de cet objectif pour améliorer notre compétitivité, aider les provinces aux prises avec des équilibres budgétaires précaires ou les municipalités à faire face à leurs besoins grandissants en infrastructures. Il en a été décidé autrement.
Surplus d'environ 10,2 milliards
L'exercice 2007-2008 se terminera avec un surplus d'environ 10,2 milliards et la totalité de cet argent est une fois de plus allouée au remboursement de la dette. Pour la prochaine année financière, le surplus fondra, selon les prévisions du gouvernement, à 2,3 milliards, dénotant une marge de manoeuvre très faible face à un ralentissement économique de plus en plus certain. Si l'économie est frappée plus fort que prévu par le ralentissement économique, cette marge de manoeuvre risque de ne pas être suffisante. Par ailleurs, les provinces seront tout autant, voire plus touchées par le ralentissement et certaines d'entre elles, comme le Québec, avaient déjà de la difficulté à boucler leur budget. Dans ces conditions, il est légitime pour un contribuable de se demander si les surplus sont utilisés le plus judicieusement possible.
Pour un contribuable qui demande des services en santé, en éducation ou des infrastructures en meilleur état, c'est un match perdu d'avance. Il paie ses taxes au provincial et au fédéral. Il reçoit la plupart des services de première ligne du gouvernement provincial qui peine à lui fournir des services de qualité sans s'endetter davantage. Pour lui, il s'endette encore plus au provincial et rembourse sa dette au fédéral. La logique voudrait que son endettement total diminue ou n'augmente pas.
Après avoir consacré 3 milliards au remboursement de la dette au fédéral, n'aurait-on pas pu retourner l'excédent de 2007-2008 vers les provinces de manière à éviter une détérioration de leurs équilibres financiers qui risque de se produire avec l'actuel ralentissement économique?
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François Dupuis et Yves St-Maurice
M. Dupuis est vice-président et économiste en chef et M. St-Maurice est directeur et économiste en chef adjoint aux Études économiques du Mouvement Desjardins.
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