Emploi: 54% des Français favorables à la «préférence nationale»

527c2118f6a87f0d80a249e580cdda6a

Une mesure proposée par le FN depuis des décennies

«La préférence nationale en matière d’emploi est une idée qui est aussi présente dans beaucoup d’autres pays», explique Chloé Morin, chef de projet chez Ipsos.



«Préférence nationale», services publics accordés aux étrangers, sentiment d’injustice économique..... Dans une vaste étude récemment dévoilée, l’institut Ipsos a testé un certain nombre d’affirmations, notamment d’ordre économique. Intitulée «Populist and nativist sentiment in 2019», cette étude a été réalisée auprès de 18.000 personnes dans 27 pays, ce qui permet de faire une comparaison internationale.


» LIRE AUSSI -


Parmi les phrases proposées, on trouve notamment l’affirmation suivante: quand les emplois sont «rares», les employeurs devraient embaucher en priorité les nationaux plutôt que les immigrés. Une manière de tester l’adhésion à la «préférence nationale» en matière d’emploi. 54% des Français se disent d’accord avec cette proposition (soit 3 points de plus qu’en 2016). Si on prend l’ensemble des 18.000 personnes interrogées (tous pays confondus), la France se situe en dessous de la moyenne puisque 60% des interrogés estiment que les entreprises doivent privilégier les nationaux. Les Serbes (82%), les Russes (81%), les Hongrois (75%) ou encore les Turcs (73%) sont les plus en phase avec cette affirmation.




«La préférence nationale en matière d’emploi est une idée présente dans beaucoup de pays», explique au Figaro Chloé Morin, chef de projet chez Ipsos Global Affairs, qui lie cette tendance au contexte «post-crise économique de 2008». «En France, nous sommes très focalisés sur le discours et la préférence nationale est souvent liée au Rassemblement national mais cette question est portée partout dans le monde, parfois par des partis politiques moins ostracisés», poursuit Chloé Morin. La politologue note que de nombreux pays souscrivent encore plus que la France à la préférence nationale, ce conduit à «relativiser» le score français.


45% des Français sont par ailleurs d’accord avec l’idée que «les immigrés utilisent les services publics au détriment des nationaux». Ce score est supérieur à la moyenne des 27 pays (43%). Cette affirmation est majoritairement partagée en Turquie (67%) et en Serbie (54%), contrairement à la Pologne (26%) et au Japon (25%).




Selon Chloé Morin, le score est particulièrement élevé en Turquie car «le pays a récemment absorbé beaucoup d’immigration», notamment avec l’arrivée de nombreux Syriens. «Les chiffres montrent qu’il y a une hausse du ressentiment envers l’immigration en Turquie», explique-t-elle. Quant à la France, qui est au même niveau que l’Allemagne, Chloé Morin évoque un contexte particulier dans l’Hexagone. «Nous sommes très conscients du niveau élevé de notre dette publique et nous avons un modèle social envié. Il y a une crainte que ce modèle social explose», analyse la chef de projet d’Ipsos.


Une forte perception des inégalités en France


Une autre affirmation proposée aux sondés a trait à la perception de l’injustice économique et sociale. 73% des Français se disent d’accord avec l’idée que «l’économie (de leur pays, NDLR) avantage les riches et les puissants», soit 3 points de plus qu’en 2016. Ce score est plus élevé que pour la moyenne de l’ensemble des pays (70%) et que chez certains de nos voisins comme l’Allemagne (69%), la Belgique (69% ou encore l’Italie (72%). Dans tous les pays, une majorité de personnes interrogées estiment que l’économie de leur pays avantage les plus riches (les scores oscillent entre 65% et 79%), sauf en Suède où les avis sont partagés. Le Mexique et la Hongrie sont les pays où la perception des inégalités par la population est la plus forte.




«En matière de fiscalité, les gens ont l’impression qu’on paie ses impôts quand on est en bas de l’échelle et qu’on peut jouer avec le système, notamment en faisant de l’évasion fiscale, quand on est en haut de l’échelle», analyse Chloé Morin. Avant de poursuivre: «Dans tous les pays, la thématique de l’injustice est très partagée. Il y a l’idée que l’économie est un système qui fonctionne mal et désavantage le peuple». Selon Chloé Morin, cela explique pourquoi les discours sur l’injustice, portés par des partis de gauche mais aussi par le Rassemblement national en France, ont un tel écho. Concernant l’Hexagone, la politologue relève un paradoxe: «La France est l’un des pays les moins inégalitaires mais le sentiment qu’il y a de fortes injustices reste très élevé».