Les deux sonneuses d’alarme qui ont averti la commission Charbonneau que son témoin-vedette Gilles Cloutier mentait à la barre déplorent que les enquêteurs alertés ne les aient pas prises au sérieux.
«C’est inquiétant. Ça soulève des doutes. Il y en a combien de cas comme ça? Combien d’autres témoins se sont parjurés?» lance l’une d’elles, Annick Hupperetz.
Le témoignage des deux femmes est une autre tuile sur la tête de la Commission qui a passé la semaine dernière en mode défense, alors que son témoin-vedette, Gilles Cloutier, l’embarrasse sérieusement. Non seulement a-t-on appris qu’il a été arrêté pour parjures cet été, mais la Commission aurait jugé ses mensonges «pas plus graves que ça», assure-t-il.
Pourtant, Mme Hupperetz et l’ancienne conjointe de Cloutier, Raymonde Faubert, assurent avoir tiré la sonnette d’alarme dès le printemps 2013 à son sujet.
Mme Hupperetz avait d’abord averti la Commission que la fameuse auberge de Pointe-au-Pic, dont M. Cloutier répétait être le propriétaire, n’avait jamais été la sienne. Elle l’a fait notamment dans un courriel dont Le Journal a obtenu copie.
«Ils n’étaient pas intéressés du tout par l’information. On ne me croyait pas. Pourtant, c’est grave (qu’il mente, peu importe sur quoi). Il salit des réputations», regrette Mme Hupperetz.
Celle-ci a aussi avisé Le Journal qui avait publié l’information. Moins d’une heure avait été nécessaire pour vérifier que le nom de Gilles Cloutier n’apparaissait pas au registre foncier, puis retracer le véritable propriétaire à New York afin de confirmer qu’il avait bien loué sa maison à Cloutier.
«C’est facile à vérifier. D’autant plus que Cloutier était un témoin collaboratif dont le témoignage a été préparé à l’avance par les enquêteurs», déplore Mme Hupperetz.
Tout comme Mme Faubert, elle pense que la Commission aurait dû faire des vérifications élémentaires avant de laisser Cloutier s’installer à la barre. Du moins, elle aurait dû «écouter les gens qui ont des choses à dire», comme elles.
En effet, Raymonde Faubert raconte avoir reçu le même accueil lorsqu’elle aurait transmis une liste d’une dizaine de parjures qu’elle avait relevés aux enquêteurs au lendemain du témoignage de son ex-conjoint.
«Ce n’était jamais grave pour eux», se souvient l’ex-conjointe de Cloutier, irritée.
Selon elle, Cloutier aurait menti sur toute une série d’éléments: son éducation, comment est payée la voiture qu’il conduit, la provenance de l’argent qu’il dépense, son implication dans un «cartel» du déneigement sur la couronne nord et les Basses-Laurentides, pour ne nommer que ceux-là.
Si Mme Faubert convient qu’il ne s’agit pas là d’éléments clés du témoignage de Cloutier, le nombre de mensonges met en doute l’ensemble des propos tenus par ce «menteur compulsif», plaide-t-elle.
«Ce n’est pas correct. Tout le monde a bu ses paroles. Ils l’ont laissé aller. Ils prenaient tout ce qu’il disait. Ça leur faisait un beau témoin. Ils (la Commission) ont été manipulés», s’exclame-t-elle.
Du côté de la commission Charbonneau, on préfère ne pas commenter l’affaire par respect pour le procès qui se tient ces jours-ci au palais de justice de Saint-Jérôme.
Une procureure de la commission est intervenue lors de ces procédures la semaine dernière pour assurer que les propos tenus par Cloutier – notamment à savoir que la Commission aurait minimisé la gravité de ses mensonges – la «discréditent de façon gratuite» et que nombre d’entre eux sont «formellement niés», «faux» et «mal fondés».
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