Ainsi que je le disais, le cerveau limbique choisit et le néocortex justifie.
La chose est évidente au Parti québécois depuis longtemps. Je n'ai pas de lien hypertexte pour donner un exemple, et je n'en ai pas besoin. Depuis le temps que j'ai choisi le Québec et que je me cherche des arguments rationnels pour maintenir ce choix, je sais comment cela fonctionne.
La crise au Parti socialiste français est un bon exemple. Martine Aubry, Bertrand Delanoë et Benoît Hamon ont gagné contre Ségolène Royal par 102 voix auprès de plus de 130 000 militants. Derrière Martine Aubry la bien née, fille de Jacques Delors, un des chefs de file qui ont bâti l'Europe, se profilent les «éléphants» qui visent la candidature à la présidence en 2012. Les luttes sont discrètes et féroces. Mais tous ces gens sont fondamentalement des socialistes. On aime plus ou moins la tête de l'un ou la robe de l'autre, et on s'invente plein d'arguments songés et rationnels pour justifier ses choix. Boulechite. C'est le cerveau limbique qui choisit. Au PS, on n'aime pas les rouleaux compresseurs, il fallait écarter Royal, même s'il faut pour cela supporter la férule de Sarkozy.
Le régime parlementaire britannique du Canada vit actuellement une crise qui s'explique aussi par la même théorie. On parlera encore de cette crise dans les chaumières canadiennes dans cent ans, si les humains se rendent jusque-là. Elle fournira de la jurisprudence aux manuels juridiques traitant de constitution dans les différents régimes parlementaires issus de la colonisation britannique. Les superlatifs pour qualifier la situation où se retrouvent les partis politiques canadiens abondent: «putsch», «coup d'État», «dictature», «trahison», «imposture». Nous n'en ajouterons pas, la cour est pleine.
Le gouvernement conservateur minoritaire présente, fin novembre, un «énonçé politique» qui annonce quelques mesures qu'il entend prendre en attendant le dépôt du budget en février. Au Canada, la crise financière n'est pas aiguë. Le système bancaire se tient debout, les secteurs manufacturiers et forestiers chancellent, mais la création nette d'emplois est positive pour 2008. Il faut faire quelque chose, mais l'idée n'est pas mauvaise de voir venir pour s'ajuster à ce que les États-Unis vont faire. Jusque-là, tout baigne.
Mais Stephen Harper a la mauvaise idée de couper le budget de financement des partis politiques, une misérable économie de 28 millions de dollars sur le budget global du Canada, soit 220 milliards de dollars. En passant, ce n'est qu'à peu près le tiers du budget du Pentagone.
La réaction des 3 partis est si vive qu'ils décident en quelques jours de former une coalition pour défaire le gouvernement en chambre et se répartir les ministères pour gouverner sans se faire élire, si la représentante de la reine de Grande-Bretagne le veut bien. Ces mêmes partis avalent les couleuvres de Harper depuis 2 ans sans réagir. Mais à l'annonce de la coupure de financement des partis, le cerveau limbique des députés s'est mis en marche et depuis, on trouve toutes sortes d'arguments rationnels pour justifier la coalition.
Harper a retiré son projet de couper les subventions aux partis, mais comme ces derniers affirmaient que la coupure n'y était pour rien et que leur raisons pour prendre le pouvoir étaient plus nobles, ils se voient forcés de poursuivre leur démarche de coalition.
Le suspense est palpitant. Harper, Dion, Duceppe, Layton et Michaëlle Jean dansent un set carré endiablé pendant que Leblanc, Ignatieff et Rae sont assis sur les bancs à côté de la piste de danse, et que Chrétien discute au bar avec Broadbent. Il n'y a pas longtemps, les commentateurs s'émerveillaient des splendeurs de la «politique-spectacle» des Américains. Il y a aussi de quoi s'amuser au nord du 45ème.
Eh Canada, quo vadis ?
Les superlatifs pour qualifier la situation où se retrouvent les partis politiques canadiens abondent: «putsch», «coup d'État», «dictature», «trahison», «imposture». Nous n'en ajouterons pas, la cour est pleine.
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