Le président du financement du Parti libéral du Canada, Stephen Bronfman, un proche du premier ministre Justin Trudeau, et l’ancien sénateur libéral Leo Kolber, auraient mis sur pied différents stratagèmes pour cacher 60 millions $ US dans les paradis fiscaux.
Selon le Toronto Star et CBC/Radio-Canada, qui se sont basés sur une fuite de 5000 pages de documents des Paradise Papers analysées par le Consortium international des journalistes d’investigation (CIJI),
M. Bronfman se serait lié à M. Kolber pour placer des fonds aux îles Caïmans, à l’abri des impôts canadiens, américains et israéliens.
L’ancien sénateur Leo Kolber, nommé au Sénat par Pierre Elliot Trudeau pour services rendus au PLC, aurait créé, en 1991, une fiducie aux îles Caïmans.
La famille Bronfman, qui a fait fortune notamment grâce à la distillerie Seagram, a contribué en versant des millions de dollars à cette fiducie, que ce soit par sa société d’investissement Claridge ou par des versements individuels.
Stephen Bronfman, qui a comme parrain Leo Kolber, a notamment fait un prêt de 5,3 millions $, selon le Toronto Star.
En tout, les Bronfman auraient fait des prêts de plus de 25 millions $ américains à la fiducie Kolber qui ont ensuite été remboursés, sans intérêts.
Pas d’impôts
Mais les profits de l’argent placé dans cette fiducie, dissoute en 2016, n’ont jamais été imposés durant ses 25 ans d’existence, puisque le taux d’imposition est inexistant aux îles Caïmans pour ce type de structure financière. Cette fiducie devait notamment servir à payer Jonathan Kolber, le fils de Leo Kolber, qui s’était installé en Israël pour gérer les investissements massifs des Bronfman dans ce pays.
Pour être légale, une fiducie dans un paradis fiscal doit être dirigée depuis le pays où elle a été implantée. Or, les documents des Paradis Papers laissent croire que les décisions étaient prises à Montréal, ce qui contreviendrait aux règles.
Contactée par Le Journal, la fiscaliste Marwah Rizqy, qui a eu accès aux documents, a dit que l’Agence du revenu du Canada doit évaluer si la fiducie aurait dû payer ses impôts au pays.
« On peut clairement voir qu’il y a un lien (entre les décisions de la fiducie) et les têtes pensantes de Montréal. Ça a même été confirmé par Jonathan Kolber », a-t-elle commenté.
Règles contournées
Pour éviter des problèmes avec le fisc canadien, la fiducie a, au fil des ans, mis sur pied des coquilles vides et d’autres fiducies au Nevada ou dans les îles Vierges britanniques pour ne pas payer d’impôt.
Ceci permettait aussi de contourner d’autres règles liées aux fiducies étrangères pour qu’il n’y ait pas de lien avec le Canada.
« M. Trudeau souhaite-t-il avoir quelqu’un de si près du pouvoir (Stephen Bronfman) alors qu’il y a des révélations sur lui qui sont très alarmantes? », a demandé Mme Rizqy.
En 2013, Stephen Bronfman a dirigé la campagne au leadership entamée par Justin Trudeau qui tentait alors de devenir le chef du PLC.
Le philanthrope multimillionnaire, aujourd’hui impliqué dans le retour des Expos à Montréal, est ensuite devenu le grand argentier de la formation politique.
Les familles Bronfman et Kolber n’ont pas souhaité commenter l’enquête du Toronto Star et de CBC/Radio-Canada. Un avocat représentant les principaux intéressés a toutefois indiqué qu’ils ont toujours agi en respectant les règles en vigueur.
Trudeau muet
Le premier ministre Trudeau a aussi refusé de répondre à des questions sur cette affaire, tandis que le PLC a simplement mentionné que le rôle de Stephen Bronfman consiste en « des efforts de collecte de fonds, pas en des décisions politiques », a rapporté le Toronto Star.
Les Paradise Papers désignent plus de 13 millions de documents obtenus par le quotidien allemand Süddeutsche Zeitung qui ont été partagés au CIJI. Ils proviennent d’un cabinet d’avocats spécialisés dans la création d’entreprises dans les paradis fiscaux.
- Avec l’Agence QMI