Le Dow Jones semble avoir du mal avec le seuil des 18 000 points — comme si une voix intérieure lui recommandait la prudence.
Nous aussi, une voix intérieure nous conseille d’être prudent. Impossible de savoir ce qui va se passer. Tout ce que nous pouvons dire avec confiance, c’est que quelque chose arrivera. Probablement quelque chose d’alarmant.
Partout où nous regardons, nous voyons des rivets sauter.
Le Baltic Dry Index vient de toucher un plancher historique. Cet indice mesure le coût de transport maritime de matières sèches. A mesure que le commerce mondial s’enfonce, il en va de même pour l’indice (toutes choses étant égales par ailleurs… ce qui n’est jamais le cas).
Selon Bank of America, le PIB mondial pourrait chuter de 2 300 milliards de dollars cette année. Aux Etats-Unis, les ventes sont moroses. Les nouveaux permis de construction sont moroses. La croissance des revenus est morose.
Et l’Europe ?
La Grèce réfléchit encore à ce qu’elle va faire. Nous mettons la probabilité d’un "Grexit" à 50/0 environ à court terme… et plutôt 80/20 à long terme. Personne ne sait exactement ce que ça signifiera… mais ça signifiera sans aucun doute quelque chose.
Il faut très probablement compter avec un euro encore plus bas. Et peut-être un effondrement de la dette gouvernementale subprime libellée en euro. Que vaudront les obligations du Portugal, de l’Espagne et de l’Italie une fois que la Grèce aura fait défaut ?
Ce marché — la dette souveraine européenne — est plus important que le marché de l’immobilier US. Lorsqu’il craquera, il y aura des feux d’artifice. Parce qu’environ 26 000 milliards de dollars de produits dérivés y sont liés.
Et le pétrole ?
Au début, la chute du prix du pétrole a été considérée comme une bonne chose. Les consommateurs dépensaient moins pour le faire le plein. Cependant, une chute de 60% du prix de la matière première la plus importante au monde ne peut se produire sans causer de perturbations majeures.
Bon nombre de décisions financières étaient basées sur un pétrole à plus de 75 $ le baril. Maintenant qu’il est à 50 $, 25 $ manquent sur chaque baril vendu. Soit 25 $ qui ne sont pas utilisés pour forer de nouveaux puits, embaucher de nouveaux ouvriers, acheter des camions ou louer des bureaux à Houston.
En parlant de ça, nous avons lu cette semaine un article disant que jusqu’à un sixième des nouveaux bureaux aux Etats-Unis se construisent dans la région de Houston, au Texas… et les locataires potentiels deviennent difficiles à trouver.
Ils pourraient devenir encore plus rares si les nouvelles prévisions pétrolières de Citibank se révèlent exactes. Les analyses de Citi voient le prix de l’or noir chuter jusqu’à 20 $ le baril cette année :
"Le marché du pétrole devrait atteindre son plancher entre la fin du premier semestre et le début du second semestre, à un prix significativement plus bas dans le canal des 40 $ — suite à quoi les marchés devraient commencer à s’équilibrer [...]. Il est impossible de définir un prix plancher, qui pourrait, suite à une surabondance de l’offre et au fonctionnement des stocks, chuter bien au dessous des 40 $ le baril pour le WTI, peut-être même jusque dans le canal des 20 $ pendant un temps".
Que se passerait-il si le pétrole chutait à 20 $ ? Nous n’en savons rien. Mais déjà, 90 puits ferment tous les mois. Il ne peut qu’y avoir des conséquences, visibles et invisibles, à une nouvelle chute du prix du pétrole. Et elles ne seront pas toutes positives.
La sur-construction est un problème mineur aux Etats-Unis. En Chine, il est gigantesque. Houston fois 100. La Chine a le plus gros tas de dollars au monde. Elle a obtenu l’argent en imprimant de la devise locale et en achetant des billets verts. La majeure partie de ce nouvel argent est allé à l’immobilier. Lorsque les prix chuteront, des milliers de milliards de dollars de dette adossée aux prêts immobiliers chuteront aussi.
Et le dollar ?
Une autre couture se défait sur le marché des devises. A la fin de l’année dernière, les Etats-Unis avaient transmis le relais de l’impression monétaire aux Japonais, aux Chinois et aux Européens. Depuis, cet argent brûlant s’est précipité aux Etats-Unis, en quête de sécurité et de profits. Cela a fait grimper le dollar vers des niveaux qui mettent le système tout entier sous pression.
Là encore, l’annonce d’une hausse du dollar a d’abord été accueillie par des hourras, du moins aux Etats-Unis. Les Américains pensaient avoir gagné la Coupe du Monde.
Mais attendez… Il y a quelqu’un de l’autre côté de chaque transaction. Pour la majeure partie du monde, une augmentation du dollar agit comme une augmentation de l’impôt sur le revenu. Pour les Américains, c’est comme une augmentation de la taxe à l’exportation. A mesure que le dollar grimpe, il étouffe la renaissance industrielle américaine. Cela, accompagné du déclin de l’investissement dans le pétrole de schiste, induira moins d’emploi aux Etats-Unis, moins de revenus pour les entreprises US et des ciels assombris sur l’hémisphère nord.
La majeure partie du commerce mondial se fait en dollar. Le billet vert est la devise de réserve mondiale, le soleil autour duquel les autres devises sont censées orbiter. C’est le point fixe qui sépare la nuit du jour, l’hiver de l’été, le profit de la perte, la solvabilité de la ruine. Que se passe-t-il quand le soleil se met à divaguer ? Eh bien, c’est ce que nous commençons à voir.
Attendez-vous à de la volatilité.
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