Couillard manque de courage politique, juge Houda-Pepin

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Cela fait longtemps que nous le savons

L’ex-députée libérale, mais toujours profondément libérale, Fatima Houda-Pepin, est fort déçue du projet de loi 62 sur la neutralité religieuse de l’État qu’a présenté le gouvernement Couillard.

« Le projet de loi dénote un manque de courage politique sur une question fondamentale », affirme Fatima Houda-Pepin dans un entretien avec Le Devoir.

« C’est une coquille vide. C’est la montagne qui a accouché d’une souris », ajoute l’ex-député de La Pinière que Gaétan Barrette a remplacée à la dernière élection.

Le projet de loi 62 est essentiellement une copie à peine remaniée du projet de loi94 qu’avait présenté Kathleen Weil, alors ministre de la Justice, en 2010 et qui fut abandonné par le gouvernement Charest l’année suivante. « C’est du réchauffé et c’est insultant pour l’intelligence des gens », juge Fatima Houda-Pepin.

Tout d’abord, la neutralité religieuse de l’État n’est pas affirmée dans le projet de loi 62. L’an dernier, la députée de La Pinière avait déposé le projet de loi491 qui insérait dans la Charte des droits et libertés la notion de la neutralité de l’État envers les religions et l’affirmation que toute personne y avait droit. « Une neutralité qui n’est pas dans la Charte des droits, on parle de quoi ? » se demande-t-elle.

L’obligation de fournir et de recevoir les services de l’État à visage découvert pour desraisons de sécurité, d’identification et de communication lui apparaît comme une mesure hypocrite qui n’a rien à voir avec la neutralité religieuse de l’État. Ces critères n’ont aucun lien avec la religion, relève-t-elle. « Pourquoi on a peur de nommer les choses ? s’insurge-t-elle. Il faut que ce qui est interdit soit clairement dit, et non pas par déduction. Un juge trouverait que le texte de loi est bâclé. »

Pour ne pas confirmer que les employées de l’État pourront porter le tchador, la ministre de la Justice, Stéphanie Vallée, a déclaré que le gouvernement ne légifère pas pour des hypothèses. Si le port du tchador est une hypothèse, le port de la burqa et du niqab, que la règle du visage découvert empêche, l’est tout autant, fait-elle remarquer.

« Croyez-moi, moi, je sais ce qu’est le tchador. C’est vraiment le symbole de l’oppression de la femme », souligne-t-elle. Tout comme la burqa et le niqab, « ça n’a rien à voir avec la religion comme tel ».

Dans le projet de loi 491, le port de ces trois vêtements est interdit pour les employés de l’État non pas parce que ce sont des symboles religieux — ils n’en sont pas, réitère-t-elle —, mais « au motif qu’ils représentent un symbole d’oppression qui va à l’encontre du droit à l’égalité entre les femmes et les hommes ».

Que le port du tchador refasse surface lui arrache un rire jaune. Dans une lettre publiée en novembre 2013, elle s’était dite « sidérée, blessée et choquée » par les propos de son collègue Marc Tanguay, alors porte-parole libéral en matière de laïcité, qui avait déclaré que les candidates libérales pourraient porter le tchador. « Est-ce que les Québécoises ont fait tout ce chemin pour en arriver à prendre comme modèle de l’égalité hommes-femmes celui de l’Arabie saoudite ou de l’Iran des ayatollahs ? » avait-elle lancé, en refusant « toute dérive vers le relativisme culturel sous couvert de religion ».

Le projet de loi 491 reprenait la recommandation de la commission Bouchard-Taylor d’interdire à un agent de l’État en autorité contraignante, comme un policier, un agent correctionnel, ou un juge, de porter un signe religieux ostentatoire. Mais cela s’arrêtait là. La charte des valeurs québécoises ne convenait absolument pas, « un projet de loi raté », inspiré par « une stratégie à courte vue » et marqué par une insistance sur « les foulards ».

Fatima Houda-Pepin souhaite que les parlementaires, au-delà des enjeux partisans, poursuivent le combat québécois pour la neutralité religieuse de l’État, combat dont ils sont les héritiers.


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