Rien ne peut garantir le niveau exact de participation des entreprises à la Stratégie maritime 2015-2030 du gouvernement Couillard, dévoilée officiellement lundi, mais Québec et le milieu des affaires insistent : le privé sera au rendez-vous.
Sur les 9 milliards visant à optimiser le rôle économique du Saint-Laurent tout en renforçant la protection de sa biodiversité, 5 milliards viendront de fonds publics et 4 milliards viendraient du privé, un ratio qui s’observe « lors de projets semblables » dans le monde, selon le premier ministre Philippe Couillard.
« L’effet de levier est presque automatique », a affirmé M. Couillard. « Le signal que le secteur privé attend, c’est notamment le signal des infrastructures d’accueil. Je suis très confiant », a-t-il dit en ajoutant que le gouvernement a fait valider ce ratio à l’externe.
« Notre mission, c’est de mettre en place l’environnement qui favorise l’investissement privé », a ajouté le premier ministre. Québec est « convaincu » qu’avec cette « mise de fonds, l’effet de levier va se manifester ».
Selon le gouvernement, 30 000 emplois pourraient voir le jour sur 15 ans, dont 11 000 dans les « pôles logistiques » de Contrecoeur et de Vaudreuil-Soulanges. Lors de sa campagne électorale, le Parti libéral s’était engagé à ce que l’économie québécoise crée 250 000 emplois sur cinq ans.
Réactions
Plusieurs ministres étaient présents, dont Jean D’Amour, le responsable de l’implantation de la stratégie. Étaient aussi sur place le maire de Montréal, Denis Coderre, la direction du Fonds FTQ et des gens du monde des affaires.
Alors que le privé et la Communauté métropolitaine de Montréal se sont réjouis, l’opposition a critiqué le plan. Le Parti québécois a rappelé les récentes pertes d’emplois au chantier maritime Davie, tandis que la CAQ a affirmé que Québec ne s’occupe pas assez des régions éloignées du fleuve, comme l’Outaouais, la Beauce et l’Abitibi-Témiscamingue.
Le gouvernement fédéral brillait par son absence. Un attaché du ministre fédéral Denis Lebel a affirmé par courriel que le cabinet de ce dernier n’avait pas reçu d’invitation.
Le document de 80 pages contient de multiples références au fait que Québec veut « travailler de concert » avec le gouvernement fédéral, notamment dans l’amélioration des ports. « Ils sont au courant du plan. Ils vont certainement vouloir s’y allier », a dit M. Couillard. « C’est à eux d’occuper leur champ de responsabilité et d’agir. Il y a des élections fédérales également, ce qui risque de changer l’environnement au cours des prochains mois. »
En janvier 2015, le gouvernement fédéral a promis 44 millions pour appuyer un accroissement de capacité au Port de Montréal, un projet global de 130 millions. Mais la Chambre de commerce du Montréal Métropolitain a rappelé lundi qu’Ottawa n’avait toujours pas confirmé sa participation financière à la réfection du quai Iberville, dans le Vieux-Port de Montréal, et de la jetée Alexandra, contrairement à Québec, à Montréal et à l’Administration portuaire de Montréal.
« Ottawa chapeaute le tout, fait la réglementation et détient les ports. Mais ce que Québec met en place, c’est un contexte incitatif pour l’industrie. Il fait des investissements stratégiques », a dit Philippe Filion, directeur des affaires publiques du Groupe Océan, propriétaire d’un chantier naval à L’Isle-aux-Coudres. L’entreprise est très satisfaite du plan.
De grands pans de la stratégie avaient été révélés au cours des derniers mois, d’abord dans le budget Leitão de mars 2015, qui a publié un cadre financier de 1,5 milliard sur cinq ans, puis dans divers médias.
Plusieurs volets
Entre autres choses, le projet vise à développer des pôles logistiques à Contrecoeur et à Vaudreuil-Soulanges, investir dans la formation de la main-d’oeuvre, promouvoir le tourisme maritime, renforcer les « zones industrialo-portuaires » et créer un centre d’expertise sur les interventions d’urgence aux îles de la Madeleine.
Le gouvernement veut miser sur la place du Québec et de Montréal comme « porte d’entrée » sur le marché du nord-est du continent américain. Le Port de Montréal, qui possède le site de Contrecoeur, fait concurrence aux centres portuaires de la côte est des États-Unis et attend avec impatience l’entrée en vigueur de l’accord de libre-échange Canada-Europe.
« C’est difficile de confirmer les chiffres [de l’éventuelle participation du privé] de mon côté, mais je peux confirmer l’intérêt du privé. Lorsque le gouvernement met en place les conditions nécessaires, comme la fiscalité, la réglementation, les infrastructures ou la formation, le secteur privé saisit les occasions », a dit l’économiste en chef du Conseil du patronat du Québec, Norma Kozhaya, en marge de l’événement. « On jugera l’arbre à ses fruits, mais je crois que le plan rassemble des mesures dont on a besoin. »
Le gouvernement Couillard voulait dévoiler sa stratégie au début du mois, mais avait reporté l’annonce en raison du décès de l’ancien premier ministre Jacques Parizeau.
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