Comment tuer la politique

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L'immigration sera le sujet chaud de l'élection

M’est avis que la campagne électorale actuelle devient jour après jour un repoussoir pour nombre de Québécois.


La notoriété permet un accès direct aux citoyens. L’on devient soi-même un baromètre permettant de prendre le pouls du moment.


Je suis donc plus que stupéfaite de constater que dans mes rencontres fortuites avec le public, de même que lors de repas pris en commun, les Québécois, sauf exception, évitent de parler de la campagne en cours.


Une seule femme m’a abordée à Sherbrooke pour connaître mon intention de vote. Péquiste inquiète — on le serait tous —, elle cherchait un réconfort.


De mémoire, je n’ai jamais assisté à pareille campagne. Les candidats, même ceux de QS écartés du pouvoir, sont non seulement stressés, mais ils tanguent, dérivent avant de changer de cap en fonction des réactions de leurs adversaires plutôt que de s’appuyer sur leurs convictions. En un sens, ce sont des « réactionnaires ».


Immigration


Mais on s’approche bientôt de la vérité crue. Car le thème de l’immigration vient d’entrer dans la campagne. C’est François Legault qui a ouvert le bal mercredi en affirmant que l’immigration menace le français au Québec.


Si l’on croit que les invectives, les demi-vérités et les approximations ont déjà envahi les débats, on n’a rien vu.


Même si aucun parti politique québécois ne s’oppose à l’immigration avec la même détermination que certains pays européens, la Hongrie par exemple, il faut s’attendre à des dérapages incontrôlés.


Une des faiblesses majeures de François Legault sera alors exploitée. En effet, le chef de la CAQ — il en est conscient, d’ailleurs — marche sur des œufs lorsqu’il parle. Car il maîtrise mal les mots, ce qui l’empêche sans doute d’énoncer clairement sa pensée. Il peut alors compter sur Jean-François Lisée pour le désarçonner sur la question aussi piégée que fondamentale de l’immigration et de son lien avec l’identité québécoise.


Parler français


Le chef du PQ l’accuse déjà de vouloir faire entrer annuellement 40 000 immigrants qui ne parlent pas français. Jean-François Lisée promet, lui, de voter une loi qui stipulerait que tout immigrant devrait parler français avant de venir s’installer au Québec.


Or, on peut penser que si cette promesse du PQ avait été faite par la CAQ, Jean-François Lisée aurait été le premier à la dénoncer avec force et indignation.


Le débat sur l’immigration permettra à Philippe Couillard de marteler davantage son argument massue selon lequel la politique d’immigration de la CAQ et du PQ pourrait provoquer un terrible risque économique, car il y a une pénurie de main-d’œuvre que seule l’immigration peut combler, selon lui.


Nous nous dirigeons donc vers des affrontements sanglants entre les candidats où resurgiront des accusations de xénophobie endémique chez des nationalistes, la charte des valeurs sera réutilisée à n’en point douter sous les applaudissements de ceux, nombreux, qui encouragent Philippe Couillard à poursuivre sa politique d’immigration calquée sur son multiculturalisme triomphant.


Pendant ce temps, le PQ tirera à boulets rouges sur la CAQ.


Qui a cru que, sans enjeu référendaire, cette campagne électorale serait civilisée et raisonnable ?