Comment construire une voiture à 2500$

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Braderie technique : Auto électrique - Brevets - moteur-roue

Anand Giridharadas - New York Times - Bombay, Inde


Que faut-il faire pour construire la voiture la moins chère de la planète? Pour Tata Motors of India, qui a dévoilé jeudi dernier la Nano, sa voiture ultra bon marché, la question qui se posait était plutôt la suivante: que faut-il enlever?
L'entreprise avait bien caché sa mini-compacte jusqu'au lancement du 10 janvier, mais des renseignements avaient filtré jusqu'au public. On savait par exemple que la voiture avait un volant creux, un coffre de la taille d'un porte-documents ainsi qu'un moteur à l'arrière qui ne dépassait guère en puissance celui d'une tondeuse autoportée.
Le grand attrait de la voiture était bien sûr le prix: 2500$. On doit en débourser autant simplement pour un lecteur de DVD dans le luxueux utilitaire Lexus LX 470. Mais le constructeur Tata ne cherche pas à commercialiser la Nano en Californie.
L'objectif, c'est d'offrir pour la première fois un mode de transport à quatre roues à des gens qui sont habitués à circuler en vélo ou à moto. Des centaines de millions de citoyens de l'Inde et d'autres pays en voie de développement entrent dans cette catégorie.
Influence
Malgré tout, le produit de Tata Motors pourrait influencer les habitudes des consommateurs et des constructeurs autour du monde, puisqu'il s'insère dans un mouvement vers la construction de voitures plus économiques. «Fondamentalement, on se débarrasse de toutes les notions traditionnelles de structures de coûts et on place devant soi une feuille blanche en se demandant: quelles sont les possibilités?» explique Daryl T. Rolley, directeur nord-américain et asiatique de la société Ariba, fournisseur de pièces pour Tata, BMW, Toyota et autres constructeurs. «Au cours des cinq à 10 prochaines années, l'industrie automobile tout entière sera mise sens dessus dessous.»
Le consortium franco-japonais Renault-Nissan et la coentreprise indo-japonaise Maruti Suzuki tentent également de concevoir des voitures ultra bon marché pour l'Inde. Pendant ce temps, les constructeurs occidentaux en difficulté jettent un regard attentif, espérant en tirer des éléments qui leur permettront d'améliorer leur rentabilité. Ford, par exemple, prévoit faire de l'Inde son principal centre de montage d'autos à bas prix.

La minuscule voiture à quatre portes (ou à hayon) a la forme d'un jelly bean, mince à l'avant et large à l'arrière pour réduire la résistance au vent et permettre un moteur moins cher.

Durant la chasse aux coûts, les ingénieurs de Tata se sont constamment posé la même question: avons-nous vraiment besoin de ça? Finalement, la version de base de la Nano n'a pas de radio, pas de servodirection, pas de vitres électriques, pas de compte-tours, aucune climatisation et un seul essuie-glace. La voiture utilise par ailleurs un indicateur de vitesse analogique plutôt que numérique. Pour économiser 10$, les ingénieurs de Tata ont aussi remodelé la suspension afin d'éliminer les actionneurs des phares.

Tata a aussi installé des roulements de moyeu qui s'useront très rapidement si la voiture dépasse les 70 km/h. L'usure des roulements réduira la durée de vie de la voiture sans pour autant menacer la sécurité du conducteur et des passagers, selon Ashok K. Taneja, ancien président de l'Association de manufacturiers de pièces d'auto de l'Inde.

La réduction du poids de la voiture a permis à Tata d'utiliser un moteur bon marché de 30 à 35 chevaux (il coûte environ 700$) construit par la société allemande Bosch. En comparaison, la Honda Fit - une des plus petites voitures disponibles aux États-Unis - a 109 chevaux. Les experts ont constaté que la Nano était dotée d'une transmission à variation de vitesse supérieure aux transmissions manuelles et automatiques. Ce type de transmission a déjà été répandu en Europe mais n'a jamais percé aux États-Unis à cause de son accélération trop souvent lente. On la retrouve cependant dans le Murano de Nissan et la Prius de Toyota.
Respect de l'environnement
Les critiques de la Nano craignaient qu'elle ne respecte pas les normes environnementales. Elle respecte en tout cas celles de l'Inde, moins sévères que dans plusieurs pays occidentaux. Mais la situation est appelée à changer. Les grandes villes de l'Inde prévoient adopter d'ici avril 2010 les normes d'émission EURO IV qui exigent une réduction importante des émissions de soufre (35 fois moins que la norme EURO III), affirme Anumita Roychowdhury, du Centre pour la science et l'environnement à New Delhi. Cette dernière annonce aussi l'adoption prochaine de règles imposant les coussins gonflables, les freins antiblocage et les essais de collision. Pour se conformer à ces nouvelles règles, le constructeur sera obligé de hausser le prix de vente.

«La Nano, consommant quelque cinq litres d'essence aux 100 km, répond à toutes les normes de sécurité internationales et sera la voiture la moins polluante d'Inde», a assuré Ratan Tata, patron du Groupe Tata, colosse industriel de 96 filiales qui vont du thé à la fabrication de camions en passant par la sidérurgie, la chimie, les télécommunications, l'informatique et les services financiers.
Dans une entrevue récente, Ratan Tata, président du groupe Tata, avait suggéré que le faible poids de la voiture favorisait la protection de l'environnement mais pas nécessairement la sécurité des passagers. «Nous avons des émissions bien plus faibles que les autres voitures d'entrée de gamme, disait-il. Mais il était bien plus facile de respecter les normes d'émission que de satisfaire aux essais de collision.»

Dans la plupart des voitures nord-américaines, les dispositifs de sécurité coûtent à eux seuls plus de 2500$, précise Adrian Lund, président de l'Insurance Institute for Highway Safety, à Arlington, en Virginie. Toutefois, dit-il, si la Nano «offre aux Indiens l'option d'abandonner les motos et vélos, sur lesquels ils sont à risque de collision avec de gros véhicules, (la Nano) peut constituer une amélioration sur le plan de la sécurité».
Fiche technique
Type: micro berline urbaine, cinq portes, quatre places

Empattement/longueur/largeur/hauteur (cm): 223/310/150/160

Moteur: bicylindre en aluminium, 623 cm3, 33 chevaux, situé à l'arrière

Transmission: propulsion, à variation continue ou manuelle 4 vitesses

Freins: disques avant, tambours arrière, non assistés

Performances*: 0 à 70 km/h en 14 s

Vitesse maxi*: 105 km/h

Prix annoncé: 2500$
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