Pourquoi craindre autant que le peuple soit consulté?

Ces prophètes qui savent tout du peuple !

N'est-ce pas le temps de donner tout son sens à la démocratie?

Tribune libre

Depuis plusieurs semaines, des voix prophétiques nous font savoir que le peuple Québécois n’est pas mûr pour débattre et décider de son avenir national, que ce serait une erreur de le soumettre à un référendum portant sur l’indépendance du Québec.
Ce fut d’abord la voix de Lucien Bouchard qui s’est fait entendre à l’effet qu’il ne verrait pas de son vivant ce jour de l’indépendance du Québec. Puis vint par la suite M. Claude Morin, prenant acte que l’indépendance à court terme n’était pas possible, qu’il fallait inventer d’autres voies pouvant conduire à moyen terme à des résultats nous en rapprochant. Une sorte d’étapisme repensée pour les temps que nous vivons. Plus récemment c’est François Legault et d’autres compagnons de route qui ont repris l’idée, déjà avancée, qu’il valait mieux régler les problèmes de nos finances publiques avant de penser à nous donner un pays. Comme si notre dépendance nationale n’était pas un irritant important à notre développement économique. Enfin, comme dernière tentative pour nous convaincre, c’est Joseph Facal, en des mots tendres, tout enveloppé d’un nationalisme à toute épreuve, qui nous rappelle que le peuple n’est pas encore prêt à faire ce choix.
« Nul n’est devin, mais la souveraineté me semble, pour l’avenir prévisible et en l’absence d’événements que rien ne laisse présager, une réponse à une question que notre peuple ne veut pas confronter. »
Mais enfin, peut-on me dire, quelle autorité ont ces gens pour nous dire ce que veut ou ne veut pas le peuple. La seule manière de le savoir n’est-ce pas de le lui demander directement? N’est-ce pas le sens d’un référendum ? Il y aura toujours un gagnant et un perdant, comme c’est le cas pour toute consultation démocratique. Pourquoi craindre autant que le peuple soit directement consulté?
Que fait-on de la démocratie qui consiste justement à faire débattre par le peuple des questions le concernant directement? Faut-il le consulter uniquement lorsque l’une des parties est certaines de sa victoire ou doit-on le consulter pour savoir ce qu’il veut?

Certains diront, dont Jean Charest et beaucoup de ces prophètes, qu’un référendum divise et affaiblit la cause des perdants. Faudrait-il alors mettre un terme à l’existence des partis politiques qui divisent eux aussi et attendre le bon moment pour faire des élections gagnantes en faveur du parti au pouvoir? Ce raisonnement ne tient pas la route et va tout droit à l’encontre de la démocratie.
Ce qui divisent un peuple ce ne sont pas les référendums ni les élections, mais les injustices, la corruption, la manipulation, les fraudes fiscales, les mensonges, les privilèges concentrées entre les mains de quelques privilégiés et plus que tout le manque de respect aux droits les plus fondamentaux des personnes et des peuples. Ce qui divise le peuple c’est le manque de démocratie qui le laisse à l’écart des grandes décisions qui se prennent, souvent à son insu et à son encontre. On considère le peuple comme une masse que seuls les lucides peuvent orienter et décider de ce qui est bon pour lui. Dans les régimes communistes, sous l’ex Union Soviétique, cette fonction appartenait au Parti communiste qui lui savait être le guide pouvant le mieux guider le peuple. Les temps ont changé et les peuples aussi.
Dans les démocraties participatives qui émergent dans certaines régions du monde, le peuple retrouve de son pouvoir. Par exemple, au Venezuela, la constitution prévoit que 25% des citoyens inscrits sur les listes électorales peuvent exiger la tenue d’un référendum révocatoire soit d’un Président soit d’un élu à mi-mandat. Ce ne sont pas les sages et les lucides qui décident, mais les électeurs et les électrices. Dans pareil contexte, 25% des Québécoises et Québécois, inscrits sur les listes électorales, seraient en mesure d’exiger la tenue d’un référendum sur l’avenir constitutionnel du peuple Québécois, peu importe le parti au pouvoir.
Plus j’entends des appels à sursoir à un prochain référendum, plus je perçois que le temps est venu de passer à l’action. Pourquoi pas? Si nous le gagnons, ce sera une étape importante de franchie, et si nous le perdons, le peuple aura eu l’occasion, une autre fois, de se prononcer sur cette question plus que fondamentale. Et comme disait René Lévesque, « ce sera pour une prochaine fois ». Ce n’est tout de même pas la fin du monde que de permettre, une fois tous les 15 ans, au peuple Québécois de se prononcer sur son avenir comme peuple et comme nation. La division qui existe, avec ou sans référendum, est toujours là. Inutile de nous compter des histoires. Les 30% à 40 % d’indépendantistes ont le droit de sonder les reins et les cœurs de ces 20% à 30% qui ne savent pas trop. Peut-être sauront-ils cette fois-ci où se trouvent leurs véritables intérêts.
Ne craignons pas de donner une autre chance à la démocratie. C’est le temps de passer à l’action comme le signalait si bien [Marius Morin dans sa toute dernière intervention sur Vigile->32014].
Oscar Fortin

Québec, le 30 0ctobre 2010

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citoyen du Québec et du monde

Formation en Science Politique et en théologie. Expérience de travail en relations et coopération internationales ainsi que dans les milieux populaires. Actuellement retraité et sans cesse interpellé par tout ce qui peut rendre nos sociétés plus humaines.





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3 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    31 octobre 2010

    Monsieur Fortin
    D'accord à 100% avec votre texte qui est d'une grande clarté. À un moment donné, il faut bouger afin de faire évoluer le peuple québécois vers une autre grande prise de conscience collective qui nous mènera plus rapidement qu'on le pense vers le pays du Québec. La panique est en train de s'installer chez les fédéralistes, c'est un bon signe pour se préparer à un autre référendum qui j'espère sera gagnant cette fois-ci. Il m'a fait plaisir.

    André Gignac patriote 31/10/10

  • Archives de Vigile Répondre

    31 octobre 2010

    En effet, pourquoi avoir si peur du peuple québécois et qu’il soit consulté? Je crois qu’il y a deux raisons. Les politiciens qui ont déjà formé le gouvernement et goûté au pouvoir, (à l’exception des partis Action démocratique du Québec, Québec solidaire, Parti communiste du Q., Parti démocratie chrétienne du Q., Parti communiste du Q., Parti égalité, Parti indépendantiste, Parti république du Q., Parti marxiste-léniniste du Q., Parti vert du Q.) ne veulent plus s’en séparer. Ces politiciens croient savoir ce qui est bon pour le peuple québécois. Ils affirment vouloir d’abord s’occuper des « vraies affaires » de l’État. Comme si l’État était séparé du peuple. Alors qu’ils n’ont de pouvoir que ce que le peuple veuille bien leur concéder.
    Deuxièmement, les politiciens ne sont pas prêts pour un référendum. Les 15 dossiers sur la souveraineté québécoise que j’ai mentionnés dans mon article « Cessons de parler de souveraineté, mettons-nous au travail! » sont-ils débattus présentement, font-ils partie de l’agenda des partis politiques? Non! Nos politiciens ont-ils quelque chose de concret à présenter à la population? Non! Depuis 1995, les dossiers de la souveraineté n’ont pas évolué. Comme si l’État était à l’opposé du droit du peuple à disposer de lui-même. Assez de « parlementries », passons à l’action. Formons des équipes de travail. Qu’est-ce qui est mieux, briser le Canada ou briser le Québec, demeurés colonisés ou devenir souverains?

  • Lise Pelletier Répondre

    31 octobre 2010

    Bonjour M. Fortin,
    En effet, quel manque de respect envers la population que de parler en son nom.
    M. Charest qui se targue d'être le PM (?) d'un grand peuple et qui depuis 2 ans refuse d'écouter 80% des gens qui demande une enquête publique sur la construction et le financement des partis.
    M. Charest qui fait adopter par le baillon son budget Bachand malgré une manifestation d'environ 50,000 personnes à Québec.
    M. Charest qui fait adopter par un autre baillon la loi 115
    qui affaiblit encore plus la loi 101, par malheur nous ne fûmes qu'environ 2000 pour contester.
    Quelle écoute ce gouvernement, vraiment !!
    Vivement les élections, ça presse, car les médias Gesca vont tout faire pour empêcher le peuple de s'exprimer.
    Lise Pelletier