Le premier ministre Philippe Couillard a ouvert les hostilités de façon aussi brutale que grossière en associant Jean-François Lisée à l’extrême droite européenne, et il ne fait pas de doute que les questions d’identité occuperont une place importante dans le débat public d’ici les élections d’octobre 2018.
M. Couillard avait cependant noté autre chose dans ses premiers commentaires sur l’élection de M. Lisée : dans son interminable discours de victoire, il avait parlé d’à peu près tous les sujets, sauf d’économie. S’il a salué brièvement l’engagement de Martine Ouellet en faveur du « développement économique intelligent », le nouveau chef du PQ n’a certainement pas donné l’impression qu’il en faisait une grande priorité. En toute justice, sa plateforme incluait bien une série de propositions concernant la recherche et le développement, l’exportation, l’industrie manufacturière, l’énergie ou le maintien des sièges sociaux, mais il reste qu’il n’a pas jugé utile d’en parler ce soir-là.
Tout le monde attend avec impatience le premier face-à-face entre les deux hommes. Depuis les longues années de débat entre Robert Bourassa et Jacques Parizeau, l’Assemblée nationale n’a plus été le théâtre d’une confrontation entre deux protagonistes d’une telle envergure intellectuelle. M. Couillard se plaît à dire qu’il en sera à son cinquième adversaire péquiste, mais il a eu la partie relativement facile depuis qu’il est devenu premier ministre. Il aura maintenant un adversaire à sa mesure.
Les paris sont ouverts sur la première question que lui adressera le nouveau chef de l’opposition. S’ils sont aux antipodes sur les dossiers identitaires, qu’il s’agisse de laïcité, d’immigration ou de langue, l’économie n’en demeure pas moins la plus grande préoccupation des électeurs. L’imagination de M. Lisée est inépuisable et il ne demande certainement pas mieux que de surprendre le premier ministre, mais le célèbre mot de l’ancien conseiller de Bill Clinton, James Carville, demeure tout à fait d’actualité : « It’s the economy, stupid ! »
La semaine dernière, le premier ministre Couillard a annoncé la création d’un comité consultatif sur l’économie et l’innovation composé de 27 représentants éminents du Québec Inc. Il est difficile de s’opposer à la vertu, mais on ne peut pas attendre grand-chose à court terme, de ce énième comité.
Malgré les 38 000 nouveaux emplois recensés par Statistique Canada pour le mois de septembre, on est encore très loin des 250 000 en cinq ans que le PLQ avait promis durant la campagne électorale, et les prévisions de croissance ne sont pas très encourageantes.
Au contraire, le nouveau conflit sur le bois d’oeuvre avec les États-Unis, qui semble inévitable, aura des répercussions négatives sur l’ensemble de l’économie québécoise. Sans parler de la menace que le rejet par le Parlement wallon fait planer sur le traité de libre-échange entre le Canada et l’Union européenne, dont on espère la création de 80 000 nouveaux emplois au Québec.
Bref, M. Lisée n’a que l’embarras du choix et il ne demande sûrement pas mieux que de prendre le premier ministre de court. Ces dernières semaines, l’intégrité a été le sujet préféré du PQ lors de la période de questions, mais le ministre des Transports, Laurent Lessard, aura peut-être droit à un petit répit. Le faux pas de son nouveau leader parlementaire, Pascal Bérubé, qui a participé gratuitement à une annonce publicitaire d’un concessionnaire automobile de sa circonscription, n’est pas bien grave, mais il serait maladroit de permettre une diversion aussi facile.
Pierre Karl Péladeau avait bien des défauts, mais il était associé étroitement au développement économique, même si ses talents de gestionnaire ne faisaient pas l’unanimité. Si le PQ avait fait appel à lui, c’était précisément parce qu’il lui apportait une caution que même un économiste aussi réputé que Jacques Parizeau n’avait pas pu lui donner.
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé