Blâmée pour son reportage sur le financement au PQ, Radio-Canada défend ses sources

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Radio-Canada et l’émission Enquête prises les culottes à terre


Le Conseil de presse du Québec blâme Radio-Canada d'avoir fait un usage, jugé imprudent, dans son reportage du 31 mars dernier, d'une source confidentielle qui croyait que des solliciteurs de fonds, comme Claude Blanchet, étaient au courant de l'utilisation de prête-noms pour financer des campagnes politiques.



Selon cette source du domaine du génie, M. Blanchet l'aurait abordée pour obtenir une contribution politique de 25 000 $ au printemps 2007. Cette source affirme avoir réuni cette somme auprès de son organisation et l'avoir remise, en chèques n'excédant pas 3000 $ par contribution,  à M. Blanchet.



Dans une décision rendue aujourd'hui, le Conseil de presse indique que le reportage d'Alain Gravel, de l'émission Enquête, diffusé une semaine avant les élections provinciales d'avril 2014, n'aurait pas dû aller de l'avant avec cette information sans qu'elle ait été corroborée par une deuxième source.



Le chef intérimaire du Parti québécois, Stéphane Bédard, s'appuie sur cette décision pour demander à Radio-Canada des excuses publiques au PQ et à Pauline Marois.



« Nous souhaiterions aussi que Radio-Canada, sans dévoiler le nom de la source anonyme, puisse nous dire si cette personne anonyme est une victime collatérale de la loi 1, portant sur l'intégrité en matière de contrats publics. »
— Stéphane Bédard, chef du PQ


La loi 1, adoptée à Québec en décembre 2012 par le PQ, intensifie la lutte contre la corruption et la collusion dans le système d'attribution des contrats publics, non seulement dans le secteur de la construction, mais dans tous les ministères et organismes de l'État.



Le Parti québécois demande également aux auteurs du reportage d'expliquer publiquement leur décision de diffuser leur reportage.



Radio-Canada réplique au Conseil de presse en soutenant que l'utilisation de cette source était indiquée, puisque ses affirmations avaient été corroborées :



« Contrairement à ce que soutient le Conseil, notre reportage s'appuyait aussi sur les révélations d'une autre source tout aussi inattaquable au cœur même du financement occulte et qui confirme en tous points les révélations de notre première source. »
— Radio-Canada, par voie de communiqué de presse


Radio-Canada soutient également qu'une de ces deux sources a témoigné sous serment à la commission Charbonneau et a confirmé devant les enquêteurs et procureurs tout ce que notre reportage a révélé.



Radio-Canada compte par ailleurs interjeter appel auprès du Conseil de presse dans ce dossier.



Utilisation de source anonyme



Dans sa décision, le Conseil de presse explique que Radio-Canada n'aurait pas dû rapporter l'opinion de sa source confidentielle voulant que les solliciteurs de fonds soient au courant de la façon de procéder des dirigeants d'entreprise dans le cadre de financements politiques, « car cette information n'est validée par aucune autre source indépendante ».



« En effet, il s'agit de la seule source - du moins parmi celles citées par le reportage - affirmant une telle chose, à savoir que M. Blanchet aurait fait preuve d'aveuglement volontaire », poursuit le Conseil de presse.



« Radio-Canada et son journaliste Alain Gravel ont fait preuve d'imprudence en publiant l'accusation voulant que M. Blanchet savait clairement que la loi électorale serait contournée par l'usage de prête-noms et donc qu'il se serait rendu complice d'une entorse à la loi sur le financement électoral. »
— Conseil de presse du Québec


Selon le Conseil, Radio-Canada et son journaliste Alain Gravel ont contrevenu aux normes de Radio-Canada et à celles du guide Droits et responsabilités de la presse en diffusant ces accusations.




Présentation tendancieuse de l'information



Le Conseil conclut également que Radio-Canada et son journaliste se sont rendus coupables d'une présentation tendancieuse de l'information en diffusant dans le reportage les images d'un échange d'enveloppes brunes, alors que l'on entendait Claude Blanchet nier catégoriquement l'existence d'un tel échange.



Selon le Conseil, ces images visaient à discréditer la version des faits de Claude Blanchet.



« En procédant ainsi, le Conseil est d'avis que les mis en cause ont "créé de la confusion sur le véritable sens de l'information transmise", et ont en conséquence commis une faute déontologique. »
— Conseil de presse du Québec


Reportage de l'émission Enquête



Le reportage d'Alain Gravel soutient que Claude Blanchet aurait sollicité deux dirigeants de firmes de génie-conseil en 2007 et en 2008 pour financer les campagnes politiques de sa femme, Pauline Marois. Le reportage indique que certains de ces dons auraient été faits par l'entremise de prête-noms.



Le reportage fait part de la déclaration assermentée d'un dirigeant d'entreprise dans laquelle ce dernier affirme avoir été sollicité par Claude Blanchet pour une contribution politique de 25 000 $. 



Cette source croyait que « les solliciteurs de fonds savent que ça se passe de même. Mais ils vont toujours le nier, en disant : "J'ai demandé des chèques, j'ai reçu des chèques. Je n'ai pas l'obligation de vérification." »



Un deuxième dirigeant d'une firme de génie-conseil a également affirmé à l'émission Enquête avoir été sollicité par Claude Blanchet, cette fois pour la campagne électorale de 2008. Il affirme qu'il lui a remis des chèques totalisant 5000 $ provenant d'employés de sa firme, qui ont ensuite été remboursés ou dédommagés par sa compagnie.



Pauline Marois a pour sa part toujours rejeté les informations contenues dans le reportage de Radio-Canada.




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