L’Union européenne (UE) a affiché mercredi sa solidarité avec l’Irlande à la veille de la visite de Theresa May à Bruxelles, une journée marquée par la polémique créée par le président du Conseil européen, Donald Tusk, qui a prédit « une place en enfer » à ceux qui ont fait campagne pour le Brexit sans penser aux conséquences.
La petite phrase a fait de l’ombre à la visite du premier ministre irlandais, Leo Varadkar, qui a précédé de 24 heures son homologue britannique, attendue jeudi à Bruxelles pour tenter d’obtenir des modifications à l’accord de divorce, en particulier sur la frontière irlandaise.
La rencontre entre les deux hommes a été marquée par une pique de Donald Tusk à l’égard des partisans du Brexit qui, selon lui, n’ont jamais considéré les conséquences de ce divorce. « Je me demande à quoi cette place spéciale en enfer ressemble, pour ceux qui ont fait la promotion du Brexit sans même l’ébauche d’un plan pour le réaliser en toute sécurité », a lancé M. Tusk.
La réponse des unionistes du DUP, le petit parti nord-irlandais allié de Theresa May, a été immédiate, son porte-parole Sammy Wilson qualifiant le dirigeant polonais de « maniaque diabolique de l’Europe ».
« C’est à Donald Tusk de déterminer s’il considère que l’utilisation de ce genre de langage est utile », a commenté un porte-parole de Downing Street, rappelant que la campagne du référendum au Royaume-Uni avait été « solide et animée ». « Les gens ont voté pour partir, et tout le monde devrait se concentrer sur comment concrétiser le verdict du peuple britannique pour que l’on puisse quitter l’UE de façon ordonnée et avec un accord qui est dans le meilleur intérêt du Royaume-Uni et de l’UE », a-t-il ajouté.
Frontière irlandaise
Interrogé sur les propos de M. Tusk, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, qui a également reçu Leo Varadkar en compagnie du négociateur en chef de l’UE Michel Barnier, a répondu par une boutade, semblant vouloir désamorcer la polémique.
« Je suis moins catholique que mon bon ami, a-t-il répliqué. Je crois au paradis, et je n’ai jamais vu l’enfer sauf depuis que je travaille ici. »
Sur la question de la frontière irlandaise, qui reste le thème le plus délicat et le plus problématique du divorce, les dirigeants européens ont maintenu leur position.
« Nous ne pouvons pas accepter que l’accord de retrait soit rouvert » à la discussion, a souligné Jean-Claude Juncker en conférence de presse. « Et comme le backstop fait partie de l’accord de retrait, nous ne pouvons pas rouvrir la discussion sur le backstop », a-t-il insisté.
Le rejet par le Parlement britannique, à une très large majorité, de l’accord de retrait négocié entre les Européens et le gouvernement de May est en grande partie lié à l’introduction de ce « filet de sécurité » (« backstop », selon le terme anglais) destiné à éviter le retour d’une frontière physique sur l’île d’Irlande.
Ce dispositif ne serait activé qu’en dernier recours. Il prévoit que le Royaume-Uni resterait dans une union douanière avec l’UE, et l’Irlande du Nord dans le marché unique pour les biens, afin d’éviter des contrôles douaniers et réglementaires physiques, si aucune autre solution n’est trouvée au cours des négociations sur la future relation entre Londres et l’UE. Il est honni par de nombreux députés britanniques qui craignent de se retrouver « piégés » dans l’union douanière.
Theresa May sera reçue jeudi par Donald Tusk et Jean-Claude Juncker, qui ont tous deux assuré vouloir éviter le scénario redouté d’une absence d’accord. « J’espère que demain nous entendrons de la part de la première ministre May des suggestions réalistes sur la façon de mettre fin à l’impasse dans laquelle le retrait ordonné du Royaume-Uni de l’UE se trouve », a déclaré Donald Tusk, ajoutant qu’une « solution commune » est possible.