Le président syrien Bachar al-Assad a promis jeudi de placer sous contrôle international ses armes chimiques, mais seulement si les États-Unis ne menacent plus son pays et cessent de livrer des armes aux rebelles, peu avant des négociations américano-russes à Genève.
«C'est un processus bilatéral (...). Quand nous verrons que les États-Unis veulent effectivement la stabilité dans la région, cesseront de menacer et de chercher à attaquer, et de livrer des armes aux terroristes, alors nous considèrerons que nous pouvons mener les processus jusqu'au bout et qu'il seront acceptables pour la Syrie», a souligné le président syrien, dans un entretien à la chaîne publique russe Rossia 24.
Dans le même temps, Bachar al-Assad, dont les propos étaient traduits en russe, a assuré que «dans quelques jours, la Syrie enverra un message à l'ONU et à l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques, dans lequels figureront les documents techniques nécessaires pour signer l'accord». Le dirigeant syrien a précisé que Damas acceptait de placer ses armes chimiques sous contrôle international «à cause de la Russie», assurant que «les menaces des États-Unis n'ont pas influé sur cette décision».
Quelques heures plus tôt, Washington avait expliqué attendre du régime syrien qu'«il déclare au plus vite l'intégralité de son arsenal» comme démonstration de son engagement, selon un haut responsable du département d'État accompagnant John Kerry, arrivé à Genève pour trouver un compromis avec son homologue Sergueï Lavrov.
L'objectif est «de voir si en fait il y a une voie crédible pour aller de l'avant, si les Russes sont sérieux dans ce qu'ils disent et, plus important, si Assad est sérieux dans ce qu'il dit», avait poursuivi ce responsable.
Le président Barack Obama a dit de son côté avoir «bon espoir» que les pourparlers de Genève aboutissent à des «résultats concrets».
Les discussions, prévues pour au moins deux jours, et auxquelles participent des experts en désarmement, vont porter sur la façon de placer l'arsenal chimique syrien sous contrôle international, une initiative lancée lundi par Moscou qui a éloigné la menace de frappes aériennes occidentales sur le régime de Damas.
«Il y a une chance pour la paix en Syrie et il ne faut pas la laisser passer», a jugé Sergueï Lavrov, pour qui «la Russie prend des mesures diplomatiques de manière active pour prévenir une intervention militaire extérieure, qui conduirait à déstabiliser davantage la situation».
Les Russes ont transmis aux Américains un plan en quatre étapes dont la première est l'adhésion de Damas à l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques (OIAC), selon le quotidien russe Kommersant. La Syrie devrait ensuite révéler la localisation de son arsenal, évalué par certains experts à 1000 tonnes, puis autoriser l'accès d'inspecteurs de l'OIAC et décider de la manière de le détruire.
«Rejet catégorique» pour les rebelles
À la veille de ces discussions, le président russe Vladimir Poutine s'est adressé au peuple américain pour mettre en garde contre une action militaire en Syrie.
Un recours à la force en dehors du cadre du Conseil de sécurité de l'ONU serait «inacceptable» et «constituerait un acte d'agression», a déclaré Vladimir Poutine, proche allié du régime syrien, dans une tribune publiée par le quotidien New York Times.
Le président russe a également imputé aux rebelles syriens la responsabilité de l'attaque chimique du 21 août près de Damas, qui a fait des centaines de morts, alors que les Occidentaux accusent le régime syrien.
La rencontre entre John Kerry et Sergueï Lavrov est censée rouvrir une voie diplomatique pour le conflit en Syrie, qui a fait plus de 110.000 morts en deux ans et demi. Elle vise aussi à repousser une éventuelle action militaire punitive des États-Unis et de la France après l'attaque du 21 août.
Paris a soumis à ses partenaires de l'ONU un projet de résolution qui prévoit, à propos du désarmement chimique de la Syrie, un éventuel recours à la force en cas de manquements à ses obligations, jugé «inacceptable» jusqu'à présent par la Russie.
Le général Sélim Idriss, chef de l'Armée syrienne libre (ASL, rebelles), a rejeté jeudi le plan russe, le jugeant insuffisant. Il ne faut «pas se contenter de retirer (au régime syrien) l'arme chimique, l'outil du crime, mais juger devant la Cour pénale internationale l'auteur du crime qui a reconnu clairement posséder cet outil et accepté de s'en défaire», a-t-il dit, en réclamant aussi aux pays soutenant la rébellion d'augmenter leurs livraisons d'armes.
Pour la Coalition nationale syrienne (opposition), l'initiative russe est une «manoeuvre politique destinée à faire gagner du temps» à Bachar al-Assad.
À Genève, avant de voir son homologue russe, M. Kerry a rencontré l'envoyé spécial de la Ligue arabe et de l'ONU pour la Syrie, Lakhdar Brahimi. L'ONU, Washington et Moscou ont depuis des mois le projet d'organiser une conférence internationale de paix, dite Genève 2, qui réunirait la communauté internationale autour du régime syrien et de l'opposition politique et armée.
Assad pose des conditions à l'abandon de son arsenal chimique
Joe Biddle - Agence France-Presse
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé