Contre la régression nominative canadienne-française
10 décembre 2021
Monsieur Huard,
Votre invitation soulève un des défis primordiaux du peuple québécois en suggérant le dialogue entre les gens de la capitale ou hors métropole et ceux de Montréal. Toutefois, c’est la responsabilité de tous les patriotes de participer à ce dialogue, chacun à sa façon et selon sa situation. Étant donné votre esprit volontaire, je suis convaincu que vous saurez vous aussi participer à ce dialogue, en y consacrant les efforts requis, puisque je présume que vous souhaitez que notre peuple parvienne à l’indépendance.
Il ne faut surtout pas sombrer dans l’illusion identitaire et politique en se trompant d’ennemi : c’est le régime canadien qui cherche à détruire le peuple québécois par l’immigration massive. Le premier chef du Parti québécois René Lévesque n’hésitait pas à dénoncer avec virulence la noyade migratoire organisée par Ottawa. Le gouvernement fédéral a donc intérêt à maintenir à Québec une succursale de lui-même, soit un État provincial, c’est-à-dire tronqué.
Les nationalistes de la région de la capitale ou hors métropole votent surtout pour les conservateurs au fédéral et les caquistes au provincial, mais voteront peut-être aussi pour les conservateurs lors de l’élection générale provinciale de 2022. Dans la région de Montréal, les francophones votent surtout pour les bloquistes au fédéral, mais sont partagés entre les péquistes, les qsistes et les caquistes au provincial.
Il est donc essentiel de se rendre compte de la nature des deux pôles qui animent le peuple québécois : le traditionalisme à Québec et le réformisme à Montréal. On a constaté ce phénomène lors de la Révolte des patriotes en 1837-1838. La vieille rivalité Québec-Montréal remonte en fait à l’époque de la Nouvelle-France.
Il faudra donc que les tenants des deux pôles arrivent à établir une entente minimale pour sauver le peuple québécois. Nous devrions imiter le grand personnage qui inspire le candidat présidentiel Éric Zemmour, nul autre que Napoléon : il affirmait assumer toute l’histoire de France, des rois au Comité de salut public.
Cela signifie qu’il y a des éléments de toutes époques ou tous régimes politiques qu’il faut savoir utiliser comme ressorts pour relever les défis d’aujourd’hui et se projeter dans l’avenir. Il est infécond de juger totalement obscure ou lumineuse quelque période historique que ce soit. On peut certes avoir des préférences selon notre sensibilité politique, mais nous devons tirer parti de tout. D’ailleurs, c’est un beau paradoxe de la vie qu’elle sache rebondir alors qu’on ne l’attendait plus dans une situation apparemment sans issue…