Une négociation à faire entre les trois nations historiques
17 février 2018
Précisément M. Bouchard, les Canadien-Français ne sont pas concernés par les velléités de reconnaissance de droits compensatoires envers les Premières Nations promise par Justin Trudeau, mais l’État québécois l’est au premier chef.
Le Québec est la première des composantes administratives du cadre colonial britannique au Canada. Il a été créé par la Couronne britannique en 1763 et dirigé directement par ses serviteurs au moins jusqu’en 1849 et encore aujourd’hui puisque toujours soumis à Ottawa. En conséquence, si l’État du Québec participait à ces éventuelles négociations, il serait jugé par les Autochtones au même titre que l’État fédéral.
S’identifier à la Province de Québec, se faire Québécois, ne fut pas une simple erreur imposée par tous nos politiciens (PQ et PLQ d'abord), ce fut un reniement de notre identité ancestrale et des droits s’y rattachant. En ce sens, c’est en devenant Québécois qu’on a pleinement fait nôtre le récit des vainqueurs.
La nationalité canadienne-française posait réel problème aux vainqueurs, elle qui se rattachait toujours au Canada français, celui de la Nouvelle-France, elle qui rappelait aux vainqueurs qu’en dépit de toutes leurs exactions nous étions bien là et que notre question nationale n’était toujours pas réglée. D’ailleurs, les fédéralistes d’après-guerre ne la supportaient plus, elle en appelait par trop à notre reconnaissance politique.
Ça, c’était l’impensable pour Ottawa. Reconnaître politiquement le Canada français aurait signifié le partage du Canada, des négociations qui auraient concerné tous les territoires où nous étions majoritaires. C’eût été pour nous une revanche éclatante, une défait pour eux! la fin d’une domination de 300 ans. Malheureusement, la québécitude réussira alors à nous faire dévier de l’objectif.
À la fin des années 1960, au moment où la confrontation s’annonçait inévitable, apparaît une identité compensatoire, tirée des écrits néo-nationalistes, une identité promue par toutes nos élites provinciales : la québécitude selon laquelle on ne peut exister qu’en s’identifiant à un état existant (si croupion soit-il) et à l’ensemble des habitants francophones, anglophones ou allophones qui s’y trouvent. Curieusement, une identité territoriale parfaitement adaptée au cadre canadien qui ne remet plus rien en cause et qui a l’avantage d’induire une rupture identitaire qui réduira à néant la cohésion nationale des Canadiens-Français. Cela au moment même où, pour obtenir notre pleine émancipation politique, il eût fallu resserrer les rangs.
Et pour satisfaire aux plus nationalistes d’entre nous, on proposa, en remplacement de l’État national canadien-français de Johnson, la quête de la souveraineté du Québec par référendum, mais avec l’adhésion des minorités culturelles qui la composent. Une mission probablement impossible qui nous condamnait avec le temps à la voie d’évitement dans laquelle nous nous retrouvons aujourd’hui.
Me suivez-vous?