Ce physicien avait prédit la victoire de Donald Trump et la défaite d'Alain Juppé. Il démontre aujourd'hui pourquoi Marine Le Pen pourrait remporter l'élection présidentielle...
Serge Galam est physicien, chercheur au CNRS et inventeur de la sociophysique. Cette nouvelle discipline entend analyser les tendances politiques et sociales, sonder la population, pour établir un calcul susceptible de déterminer l'issue de l'élection présidentielle, relate Libération.
"Plafond de verre"
Équivalent du "cordon sanitaire" belge, le "plafond de verre" constitue l'obstacle éternel sur le chemin des ambitions de pouvoir du Front national. En effet, si le parti atteint le second tour, un "front républicain" s'organise pour barrer la route au FN et plébisciter son adversaire, quel qu'il soit. Tant que le score du parti d'extrême droite reste au-dessous des 50%, le blocage fonctionne. Exemple historique et révélateur: en 2002, plus de huit Français sur dix (82%) avaient voté en faveur de Jacques Chirac contre Jean-Marie Le Pen. Un sursaut national.
Dispersion des voix
Or, depuis 2002, les choses ont bien changé, confie le chercheur et une victoire de Marine Le Pen n'est plus "impossible": elle est désormais "probable". Facteurs déclencheurs, un climat politique chaotique, cacophonique et une campagne inaudible: plus personne ne fait l'unanimité. Une vague de "trahisons" mine le Parti socialiste, François Fillon s'embourbe dans de multiples "affaires" et l'inexpérimenté Emmanuel Macron ne semble pas convaincre outre mesure la France de province. Bref, non seulement l'issue du scrutin est indécise mais un phénomène pourrait même profiter à la candidate frontiste: l'abstention différenciée.
Abstention record
En effet, tous les sondages prédisent un taux d'abstention record pour l'élection présidentielle. Si au premier tour, chacun vote pour "son" parti en raison de la présence de tous les candidats, le citoyen doit revoter une seconde fois et se retrouver donc confronté à l'éventualité de choisir un concurrent à contre-coeur pour éviter le FN. Un électeur de François Fillon (LR) au premier tour pourrait ainsi être "contraint" de reporter sa voix sur Emmanuel Macron, Benoît Hamon ou encore Jean-Luc Mélenchon au second tour. Un électeur de la gauche radicale pourrait être invité à voter pour la droite libérale. Et vice-versa. Mais ce réflexe "historique" n'est plus aussi systématique désormais. Les abstentions au second tour pourraient donc bel et bien profiter au FN.
Calcul
Explications. Marine Le Pen pourrait remporter l'élection sans pour autant bénéficier de 50% des intentions de vote, et ce grâce à l'aide d'électeurs de partis totalement étrangers à sa cause. Car, si les partisans du FN se mobiliseront avec la même détermination lors des deux tours, son rival subira un traitement différent en raison de l'abstention de certains déçus du premier tour. On pourrait aisément imaginer qu'une poignée d'électeurs de Jean-Luc Mélenchon (gauche radicale) n'aille pas voter au second tour pour Emmanuel Macron ou François Fillon. Et la décision de cette portion invisible de la population peut bouleverser l'issue de la présidentielle.
Hypothèses et projections
Voici le calcul de Serge Galam: "Par exemple, pour une participation globale de 79% avec 44% d'intention de vote pour Marine Le Pen, elle obtient une majorité de 50,25% si la participation pour elle s'élève à 90% contre 70% pour son challenger. Ainsi, un différentiel d'abstention de 20 points permet de gagner 6,25 points, et transforme 44% d'intention de vote en 50,25% de votes exprimés faisant élire Marine Le Pen. Avec 76% de participation globale, toujours une participation de 90 % pour Le Pen mais seulement 42% d'intention de vote, elle gagne avec 50,07% si la participation pour son challenger est de 65%. Pour 77% de participation globale, mais une participation à 85% pour Le Pen, il lui faut 45% d'intention de vote pour gagner à 50,02% si la participation pour le challenger s'élève à 70%", confie-t-il dans une tribune de Libération.
L'analyse complète et le détail des calculs de Serge Galam sur le site The Conversation.
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