Une «internationale populiste»?

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«Vaffanculo !»

« Votez avec votre ventre ; méfiez-vous de votre tête ; ils essaient de vous manipuler l’esprit ! » En une phrase, vendredi soir à Turin, Beppe Grillo, le comique génois devenu agitateur public avec son Movimento Cinque Stelle, a bien résumé « l’esprit » de sa campagne référendaire, et plus généralement de son action politique… ou antipolitique.

La nette victoire du « non », dimanche au référendum constitutionnel du premier ministre italien, Matteo Renzi, est un triomphe pour Grillo. Chez cet agitateur public, artiste de l’insulte, comédien qui « surjoue » la colère avec talent, la posture d’opposition systématique l’emporte sur toute considération de fond.

Pour le Mouvement Cinq Étoiles — déclinaison italienne d’un cri de rage qui, un peu partout, remet en question la démocratie occidentale —, il ne s’agissait pas de dire si la proposition constitutionnelle du premier ministre était en elle-même valable. Si la fin du « bicaméralisme parfait » (l’égalité de pouvoir entre Sénat et Chambre des députés) était souhaitable, ou s’il fallait centraliser le système. Il ne s’agissait pas vraiment de confronter avec attention des points de programmes, des valeurs ou des curriculum vitae.

Pour Grillo, il faut jeter au contraire à la poubelle tous ces raisonnements trop fins, trop subtils, formulés par les intellectuels, journalistes et autres « spécialistes » méprisables. Selon les termes de M. Grillo, le « non » visait essentiellement à faire un gigantesque bras d’honneur aux « élites ». Ce qui donne le fameux mot italien « Vaffanculo ! » dont il use, abuse, et qui résume bien son programme.

Par contre, en Autriche où l’on votait le même jour, les débats de la présidentielle — en tout cas, jusqu’au face-à-face télévisé de jeudi soir, assez agité — ont été généralement plus polis, entre Alexander Van der Bellen, le Vert finalement gagnant par 53 %-47 % selon les projections d’hier soir, et Norbert Hofer. Hofer, le candidat « populiste »… aussi aimable et souriant que Beppe Grillo se montre hurlant et grimaçant.


Y aurait-il donc, en ce début de XXIe siècle, une nouvelle « internationale » du populisme ?

A priori, pas vraiment, si l’on regarde les origines diverses de tous ces mouvements : vieux nationalisme campagnard et restes de pangermanisme en Autriche ; hostilité aux Maghrébins en France ; révolte contre les combinazioni et la classe politicienne en Italie, déclin industriel dans certaines régions aux États-Unis, dont Donald Trump a très habilement fait son beurre en 2016.

Et puis, par définition, des nationalismes qui cultivent leur différence devraient être irréductibles les uns aux autres, et avoir du mal à s’entendre.

Pour autant, quand même un peu, il y a comme un mouvement transnational. Dans les deux pays où l’on a voté dimanche, et tout particulièrement en Italie, des phénomènes se sont manifestés, qui frappent par leurs similitudes avec la « vague Trump » des 18 derniers mois aux États-Unis.

Grillo (comme Trump) se moque des faits, diffuse ou laisse diffuser des tonnes de contrevérités qui attisent la haine, la méfiance et la colère sur les réseaux dits sociaux. Ces derniers jours, des rumeurs comme « La femme de Renzi vote non » ou « Les crayons et bulletins de vote sont truqués » ont eu leur effet.

L’antipoliticien de Gênes a décrit la situation du pays — et du monde — en des termes apocalyptiques, accusant pêle-mêle les « invasions barbares » (les migrants), les « politiciens Dracula » (qui sucent le sang du petit peuple) et un premier ministre Matteo Renzi qualifié de « truie blessée ».

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François Brousseau92 articles

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François Brousseau est chroniqueur et affectateur responsable de l'information internationale à la radio de Radio-Canada.





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