On croyait avoir vu le pire en Syrie. Eh non, on ne l’avait pas vu, avant ce pilonnage sans précédent, il y a exactement une semaine, d’un convoi humanitaire du Croissant-Rouge arabe syrien. Les tirs de missiles aériens ont été méthodiques et ont duré deux heures, contre 31 camions non armés, transportant nourriture et médicaments, et dont l’identité ne faisait aucun doute.
Le bout de l’horreur, ce sont aussi les raids aériens systématiques des derniers jours, qui ont suivi ce « massacre des saints innocents humanitaires », à Alep.
Selon le patron de l’ONU, Ban Ki-moon, les derniers jours nous ont fait voir des sommets inégalés dans l’horreur et la cruauté, alors qu’on croyait avoir déjà tout vu en Syrie. Il a ajouté que cette guerre était une catastrophe pour les Nations unies, pour leur prestige et leur capacité d’agir.
Car le corollaire, on pourrait dire naturel, de ces violences inouïes sur le terrain, c’est un naufrage diplomatique en bonne et due forme. Il a été consommé ce week-end à l’ONU… alors que Russes et Américains avaient voulu, ces dernières semaines, nous faire croire à de véritables négociations de paix.
Dimanche à New York, les Occidentaux en choeur ont accusé les forces russes de s’être rendues complices, voire directement coupables, « d’actes barbares ». La partie russe au Conseil de sécurité s’est bornée à répondre que « les vrais coupables », ce sont les groupes rebelles et « terroristes » plus ou moins soutenus par Washington. Vitali Tchourkine a conclu que « la paix est aujourd’hui impossible en Syrie ».
Au moins dans cette dernière phrase, l’ambassadeur russe dit la vérité.
Rappelons pourquoi la responsabilité de la Russie dans l’épisode des tirs sur le convoi humanitaire ne fait pratiquement aucun doute.
Les preuves et les témoignages convergent : les bombardements sur ce convoi humanitaire du Croissant-Rouge arabe venaient du haut des airs. Ce n’étaient pas des tirs d’artillerie. Même Moscou a abandonné, après 48 heures, la version fantaisiste selon laquelle il se serait agi d’un véhicule rebelle tirant des obus de mortier.
Si c’étaient bien des missiles aériens, alors aucun groupe rebelle ne peut avoir fait le coup : les rebelles n’ont ni avions ni hélicoptères.
Les Américains ? Les Russes ont brièvement parlé, mercredi, d’un « drone américain » qui serait passé par là, mais n’ont pas longtemps insisté. Les Turcs ? Ils ont déjà, occasionnellement, pénétré en Syrie par la voie des airs, pour aller taper sur les Kurdes. Mais jamais aussi loin qu’Alep, qui est à plus de 40 kilomètres de la frontière.
La vérité, c’est que depuis leur intervention militaire massive d’il y a un an en Syrie, les Russes sont devenus les maîtres absolus de l’espace aérien dans le nord et l’ouest du pays. Et dans le cas spécifique des tirs sur le convoi humanitaire, lundi dernier, même les forces gouvernementales syriennes sont probablement hors de cause.
Selon un spécialiste comme Jean-Pierre Filiu (dans son blogue sur le site du Monde), les forces aériennes syriennes, ou ce qu’il en reste après cinq ans et demi de guerre, seraient totalement incapables d’exécuter des sorties et des frappes nocturnes. Or, le massacre a eu lieu tard en soirée.
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Un massacre russe en Syrie
François Brousseau, dans le caniveau de la propagande de l'Empire du chaos
François Brousseau92 articles
François Brousseau est chroniqueur et affectateur responsable de l'information internationale à la radio de Radio-Canada.
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