Une fête pas comme les autres

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Malgré son orientation politique, Ravary pose une bonne question : « Mais que fêtons-nous au juste ? »

Le 24 juin me précipite dans la nostalgie pour l’enfance et pour l’innocence que représentait le tableau vivant du petit Saint-Jean-Baptiste accompagné de son mouton, le moment fort du défilé d’avant 1964, quand les deux frisés ont été congédiés.  


La fête, version actuelle, confirme par contre mon allergie aux mers de drapeaux, aux discours patriotiques, au nationalisme décérébré de ceux qui crient encore ‘vive le Québec libre’ et à toutes ces manifestations d’amour pour... pour quoi au juste ?


Et puis, qu’avons-nous fait des Canadiens-français, dont la Saint-Jean était aussi la fête et à qui nous avons tourné le dos ?


Difficile de trouver des réponses dans nos manières de célébrer.


Party échevelé


Le 23, les Québécois sortent leurs caisses du symbole brassicole des États-Unis qu’est la Budweiser ou mettent au frais quelques bouteilles de sauvignon blanc néo-zélandais Kim Crawford, les deux plus gros vendeurs au Québec. Pas une bière de micro-brasserie locale ou un blanc québécois.


Les plus vieux qui fêtent chez eux vont ressortir leurs records de Beau Dommage ou de Gilles Vigneault et les quelques ‘jeunes’ que la Fête nationale inspire écouteront du rap, du Hubert Lenoir ou peut-être du gros rock sale allemand. Au Québec, nous aimons notre vin sucré et notre musique métallique. Tant que ce n'est pas l'inverse...


Quand j’étais petite, dans Hochelaga-Maisonneuve, les voisins organisaient une fête de quartier. Chaque année, l’un d’entre eux sortait son ‘kit de drums’, sur lequel il tapochait toute la soirée au son des Led Zeppelin, Grand Funk Railroad ou Black Sabbath, enfilant Labbatt 50 après Labbatt 50.


Il gardait In-a-gadda-da-vida pour la fin mais il était tellement saoûl à ce moment qu’il fallait être aussi bourré que lui pour reconnaitre sa version de l’opus des Papillons de fer de 1968.


Personne ne criait ‘en français’ et le Québec n’a pas viré anglo pour autant mais les quelques anglais de la rue Jeanne d’Arc restaient chez eux.


Avec le vieux défilé, ce party de ruelle est mon meilleur souvenir de la fête. Suivi de la Saint-Jean sur l’acide dans le Vieux-Montréal dont je ne suis pas certaine de bien me rappeler.  


La fête de quoi ?


Nous fêtons le 24 juin depuis 1874. Mais que fêtons-nous au juste ?


Le territoire du Québec ? Les gens du Québec ? Les succès des Québécois ? Leur survivance ? Le français que l’on massacre sans culpabilité ? Nos traditions, notre histoire, quand on la connait ? Aimer sa patrie, qu’est-ce que cela veut dire aujourd’hui ? Nous nous disons fiers d’être Québécois mais comment peut-on être fiers de quelque chose qu’on n’a pas choisi ?


Et si les bonnes questions étaient ‘le Québec peut-il être fier de moi ? Est-ce que je mérite le Québec ? Peut-il être fier de la personne que je suis devenue, grâce à ses largesses ?


Nous lui tendons souvent la main mais pensons-nous aussi à redonner ?


C'est la pensée qui m'occupe en ce 24 juin.


Bonne Saint-Jean, bonne Fête nationale chers lecteurs.