Contre toute attente, Hydro-Québec annonce qu'elle réduit de 4,8 % à 2,8 % sa demande d'augmentation des tarifs d'électricité pour 2007. Si la Régie de l'énergie y consent, les consommateurs profiteront d'un léger répit après une année 2006 marquée par une hausse de 5,3 %, la plus forte depuis longtemps. Bien naïf celui qui croira que c'est le climat de l'hiver dernier qui est à l'origine de ce revirement!
Depuis le dégel des tarifs d'électricité décrété par le gouvernement Charest, en 2004, les consommateurs québécois ont subi des hausses totalisant 11 % à ce jour, soit plus que l'inflation mais tout de même moins que le prix du mazout. L'augmentation de la demande d'électricité, causée par la bonne performance économique et le boum immobilier, expliquent ces hausses qui, en retour, ont eu pour effet de ralentir cette même croissance de la demande d'énergie.
On ne le redira jamais assez: l'énergie est un bien rare qui exige qu'on l'économise, ce que seule une politique tarifaire équilibrée et bien comprise peut permettre. C'est d'ailleurs pourquoi on ne peut pas appuyer le discours de groupes qui plaident pour un gel des tarifs qui inciterait encore plus d'entreprises et de ménages à opter pour l'électricité et exigerait qu'on investisse toujours plus dans la construction d'infrastructures et l'achat d'énergie à prix élevé en période de pointe. À moyen terme, les tarifs augmenteraient plus fortement qu'à l'heure actuelle, sans même que ces hausses profitent à l'actionnaire, le gouvernement du Québec.
Cela étant, s'il faut se réjouir de ce que les augmentations aient somme toute été modérées depuis quelques années, les changements de cap répétés d'Hydro-Québec en matière de prévisions et de tarification sont en train de miner sa crédibilité.
Rappelons que l'ancien président André Caillé promettait des hausses annuelles ne dépassant pas le taux d'inflation. Depuis l'arrivée du nouveau président, Thierry Vandal, on joue au yoyo.
En 2004, Hydro a demandé 6 % mais obtenu deux augmentations qui ont totalisé 4,4 %. L'année suivante, elle est revenue à la charge avec une demande limitée à 2,7 % et n'a obtenu que 1,8 %. Puis, surprise!, en 2006, la Régie obtempérait à une demande de hausse de 5,3 % tandis que, de son côté, Hydro nous prévenait que les tarifs devraient grimper d'autant que 12,2 % en 2007 et de 5,8 % en 2008.
Or, en juin dernier, sans explication, la société d'État révisait ses prévisions de façon radicale. Plus question d'une hausse de 12,2 % en 2007: 4,8 % suffiraient, et encore moins par la suite. Finalement, hier, nouvelle révision à la baisse: un taux de 2,8 % serait apprécié!
Comment expliquer autant de revirements importants en si peu de temps? Contrairement à ce qu'affirme la direction, l'hiver plus doux que nous avons connu en 2006 ne constitue pas une réponse satisfaisante. Pas plus que la conjoncture économique, qui n'a pas beaucoup changé entre-temps.
On a beau se creuser les méninges, deux motifs seulement peuvent expliquer ces changements de scénario. Le premier, c'est la manipulation des chiffres à laquelle on semble s'adonner au gré de la conjoncture, avec une grande légèreté, à la direction de la société d'État; le second, ce sont les élections qui s'annoncent pour bientôt. Comme tous ses prédécesseurs, M. Charest a besoin d'Hydro-Québec!
Même si la dernière révision a tout pour plaire aux consommateurs, l'approche imprévisible empruntée par la direction d'Hydro-Québec nuit à sa crédibilité, tant auprès des consommateurs que dans le monde des affaires.
Quoi qu'on en dise, en année électorale, il est impossible de croire à l'indépendance de la direction d'Hydro-Québec. À quoi faut-il s'attendre l'an prochain, lorsque le Québec aura élu un nouveau gouvernement?
j-rsansfacon@ledevoir.com
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