Ce que j'ai à vous dire n'a rien d'original, certains le trouveront particulièrement banal, voir un peu moralisateur, mais il est essentiel de le rappeler. J'ai même envie de le crier. Il y a des moments ou crier est la seule façon de rappeler l'essentiel.
Chers concitoyens, je ne vous dirai pas précisément pour qui vous devriez aller voter, mais je vous invite à être nombreuses et nombreux à occuper les bureaux de scrutin le mardi 4 septembre prochain. Vous avez toutes les raisons du monde pour le faire. Ce n'est pas une élection comme les autres. C'est la santé de notre démocratie qui est en jeu.
Allez-y voter, d'abord parce que voter n'est pas un privilège mais un devoir citoyen. Un des plus importants pour lutter contre le cynisme en politique et pour couper avec l'insupportable sentiment d'être mal représenté.
Allez-y voter, parce que comme dirait Ruy Barbosa "La pire des démocraties est de loin préférable à la meilleure des dictatures..". Je ne suis pas le seul à avoir eu cette impression, dans les dernières années, que nous avions côtoyé la dictature et ce par notre propre faute.
Allez-y voter, parce qu'aux dernières élections de 2008, nous n'étions pas nombreux à porter le flambeau de la démocratie. Seulement 57,3% des électeurs québécois s'étaient déplacés pour voter. On n'avait pas noté un si bas niveau de participation aux élections depuis plus de 70 ans. Si je ne me trompe pas, c'était à l'époque de Duplessis! Avec les résultats que nous avons subis, combien parmi ceux qui n'ont pas allé voter en 2008, pensent encore que voter ne sert plus à rien ?
Allez-y voter, parce que c'est la seule façon de protéger un grand héritage de civilisation. Je pense à tous ceux et celles qui ont sacrifié leur vie pour que la démocratie triomphe. Pour qu'elle passe d'une main à l'autre tel un flambeau qu'il faut garder allumé quoi qu'il arrive. Je pense à ceux et celles qui mènent actuellement un combat quotidien pour introduire et cultiver la démocratie dans leurs pays. Des milliers d'hommes et de femmes croupissent dans des oubliettes avec le sentiment du devoir accompli. Ils croient fermement que c'est le prix à payer pour que leurs concitoyens puissent un jour jouir du droit de vote.
Allez-y voter, parce que cela vous donnera toute la légitimité de manifester vos états d'âme et vos critiques à l'égard du prochain gouvernement. Cela vous donnera aussi toute la légitimité de pratiquer cette démocratie parallèle qu'on appelle participative parce qu'elle n'attend pas une campagne électorale pour se manifester.
Allez-y voter pour donner sens à des mois de mobilisation d'une jeunesse québécoise qui s'est tenue debout en redonnant à des milliers de québécois un grand sentiment de fierté. Ce qui a forgé l'identité québécoise à travers l'histoire, c'est aussi la capacité des québécois de dire souvent NON aux pouvoirs dominants. En tout cas, moi, je ne me suis jamais senti aussi fier d'être québécois. Les élections du 4 septembre me donneront l'occasion de donner vie et sens à la devise du Québec, "Je me souviens".
Allez-y voter aussi pour remédier à la division d'une gauche qui semble soudainement aveuglée par l'ambition du pouvoir dès que les élections sont annoncées. Une gauche qui se tire dans les pieds en oubliant toutes ses promesses de coalition et d'union. La division de la gauche a toujours favorisé le règne de la droite. (J'aurais aimé que tu t'en souviennes Gilles!).
http://www.youtube.com/watch?v=M9xCYqN8pR8&feature=related
Allez-y voter, parce que pour plusieurs parmi vous, c'est la seule façon de donner tort à certains médias dominants inféodés à des grands intérêts. Votre X sur le bulletin de vote sera la meilleure réplique à des analystes qui vous prennent pour des cons; ceux qui parlent plus des politiciens que de politique. Plus d'enjeux de coulisses que d'enjeux réels de société. Plus de l'impact des candidats vedettes que de l'impact des idéologies derrières les programmes. Comme si vous n'étiez pas capables de déceler la complicité de certains médias avec certaines politiques. ( Qui font de twitter le centre de leurs analyses!!)
Allez-y voter, parce que faire de la politique autrement c'est aussi en faire l'affaire de tous et chacun. Ce n'est qu'en étant nombreuses et nombreux à aller voter qu'on redonnera à la démocratie son sens originel: Le pouvoir du peuple par le peuple et pour le peuple. Si nous sommes au moins 90% à aller voter, malgré les vacances, malgré l'été, malgré le goût de garder ses pieds dans l'eau et malgré le choix ouvertement machiavélique de la date des élections, nous aurons récupéré une bonne part de notre pouvoir trop longtemps resté entre les mains des grands intérêts particuliers. Chaque candidat, homme ou femme, qu'il soit au pouvoir ou à l'opposition, notera ce taux de 90% comme un signe fort, comme un message clair: Le patron, c'est nous..
Allez-y voter, parce que tout a été planifié pour que vous soyez nombreux à être absents le jour du vote. Il vous appartient d'être présents pour ne pas vous faire avoir, pour déjouer la combine.
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Et pour tout vous dire, je vous raconte pourquoi, moi, je vais aller voter le 4 septembre prochain.
Durant le dernier mois, j'ai accompagné une personne très chère à l'hôpital, de son admission à l'urgence jusqu'à sa sortie. Ma vision des choses et du monde sera à jamais marquée par cette épreuve. La maladie d'un proche aura laissé des traces plus profondes que si c'était la mienne. J'en sors avec l'esprit et le cœur troublés pour ne pas dire ailleurs...
Je ne devrais même pas connaître la date des élections, tellement je me sens ailleurs. Et pourtant, je ne manquerai pour rien au monde ce rendez-vous avec la liberté. Avec l'espoir.
Ma dernière visite à l'hôpital date d'une semaine. Je l'ai quitté en espérant ne plus y remettre les pieds, du moins pas avant très longtemps. Cependant, je ne remercierais jamais assez les médecins, les infirmiers et tout le personnel soignant. Des élections auront lieu bientôt. C'est pour tous ces hommes et ces femmes de service que j'irai voter.
Des personnes dont l'humanité n'a nul besoin d'être appuyée ou illustrée par des discours, par des stratégies, encore moins par des manipulations sémantiques. Des hommes et des femmes qui n'ont pas besoin des médias comme béquilles pour accomplir leur travail, leur mission.
Quand j'ai tourné le dos à l'hôpital, je n'avais pas de mots assez forts pour exprimer toute ma reconnaissance. J'ai à peine balbutié un "Merci", trop timide pour dire toute ma gratitude.
Oui, je vais voter en pensant à ces hommes et ces femmes dont le travail est de servir au meilleur de leurs compétences pour redonner la santé aux citoyens atteints de maladies. Évidemment, ces professionnels de la santé sont tous payés, certains même bien payés. Mais, ces personnes ont tous en commun le fait de travailler pour un service public, un service accessible à tous. Ce service est le fruit d'une longue maturation politique qui a aboutit, il y a 40 ans, à notre assurance santé. Un système de santé public, universel et gratuit.
Ce bien commun (qui englobe notre système de santé, notre système d'éducation et nos richesses naturelles) est de plus en plus menacé par des intérêts privés. Notre modèle québécois, en justice sociale, en partage des richesses est bien sûr appelé à évoluer, mais ce n'est pas en l'abandonnant aux intérêts privés qu'on y arrivera. La seule façon de renverser la tendance, c'est une mobilisation sans précédent le jour du prochain vote pour surprendre les astucieux et les stratèges.
Souvenez-vous des élections de 2003 ? Le thème de la santé au Québec avait dominé toute la campagne électorale. On avait instrumentalisé la souffrance des malades et les longues attentes aux urgences à des fins électoralistes. D'après le slogan de certains candidats, le Québec était devenu un hôpital et les québécois, tous, des malades. Cela a marché, mais pas pour moi. Je n'ai jamais mordu à ce genre d'astuces. En matière de santé, le pouvoir politique s'est révélé, après 2003, au service des intérêts privés qui d'ailleurs, ne cachent plus rien sur leurs intentions de nous voler ce qui reste de notre bien commun.
Le 4 septembre, je vais me joindre à vous au bureau de scrutin, en espérant de vous voir former une longue fille d'attente. Aussi grande que mon espoir.
Mohamed Lotfi
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