Précurseur de la sociologie politique

Saint Augustin actuel

Indirectement à lʼorigine de la notion de « société civile »

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Chronique de Rémi Hugues

Le dernier numéro du magazine LʼHistoire (n° 488, juin 2018) est consacré au premier grand philosophe de lʼÉglise, Augustin dʼHippone, qui vécut au IVème siècle sur lʼactuel territoire algérien, à lʼépoque une province de lʼEmpire romain1.


Signe de lʼesprit propre au temps présent, le revue insiste sur le rapport dʼAugustin à la sexualité. Lʼauteur des Confessions – il fut lʼinventeur du genre autobiographique – livra effectivement à la postérité ses désirs les plus profonds, certains pouvant être considérés comme coupables. Mais à réduire saint Augustin au libidinal, au charnel, au désir sexuel, à ce quʼil y a de plus frivole au fond, lʼon omet de dire lʼessentiel sur ce grand artisan de lʼédification du théologico-politique chrétien, qui sʼingénia à opérer la synthèse entre les héritages gréco-latins et hébraïques, à la lumière de ce que les Évangiles relatent sur la vie de Jésus, et particulièrement sur la Passion christique.


Augustin fut plus quʼun passeur. Il fonda une tradition nouvelle, vivifia les philosophies antiques, qui étaient devenues sclérosées, et sʼappliqua à aider chacun à mieux comprendre les mystères contenus dans la Bible. Sa prose nous aide par exemple à mieux entendre ce très mystérieux texte quʼest lʼApocalypse johannique : « Dans ce livre qui a pour nom lʼApocalypse, il est sans doute beaucoup de propos obscurs, destinés à exercer lʼesprit du lecteur, et il en est bien dʼassez clairs pour permettre de se lancer, et non sans peine, sur le reste, dʼautant quʼil répète les mêmes choses de tant de façons quʼil semble dire des choses différentes, alors quʼon sʼaperçoit quʼil dit les mêmes, mais de manière différente. »2


La rédaction de LʼHistoire a été judicieuse dans son choix de nous rappeler lʼimportance de de lʼœuvre de lʼévèque dʼHippone, notamment du livre La Cité de Dieu. Il y a bel et bien une actualité de saint Augustin. Pour comprendre les enjeux de lʼheure, lʼétude de sa pensée est très précieuse.


Nous nous arrêterons sur trois points qui nous paraissent les plus notables : Augustin, ce précurseur de la sociologie politique (I), a inspiré Karl Marx et sa théorie du matérialisme historique dialectique sans que lui-même en soit réellement conscient (II), et nous a donné de solides clefs pour nous aider à théoriser le phénomène Daech, le problème le plus crucial de notre époque (III).


Penser, cʼest-à-dire représenter le réel, nécessite de disposer dʼune matière bien précise. Ce matériau, on lʼappelle en philosophie le concept. Grâce à saint Augustin, il est possible de développer une interprétation pertinente sur lʼessor du takfirisme, le terrorisme des musulmans sunnites dʼinspiration wahhabite, et de Daech en particulier, à lʼaide ce qui est le plus précieux en philosophie, et qui est même lʼessence de la philosophie, à savoir le concept.


LIEN SOCIAL ET SOCIÉTÉ CIVILE


Un concept très en vogue aujourdʼhui chez les sociologues a justement été inventé par Augustin dʼHippone. Ce concept, cʼest celui de lien social. Dans La Cité de Dieu, il définit une cité – au sens antique de ville-État, dʼentité politique, polis – selon les termes suivants : « une multitude dʼhommes, rassemblés par un lien social »3. Ce lien social quʼAristote voyait comme consubstantiel à lʼhomme, dans sa nature propre ; dʼoù sa fameuse sentence du livre I des Politiques : par essence lʼhomme est un animal politique. Opinion que partage également Augustin.


Tant la vulgate universitaire (bourdieusienne ad nauseam) que le discours médiatico-politique usent sans limite de ce vocable de lien social. Les uns déplorent le délitement du lien social, les autres justifient tel point de leur programme en affirmant que la mesure quʼils préconisent dʼinstituer recréera du lien social. Comme si générer du lien social était synonyme de produire du bonheur public.


Ainsi lʼœuvre dʼAugustin préfigure la discipline moderne, qui se veut une science, appelée sociologie. Le vocable a été inventé par le révolutionnaire Sieyès, popularisé par Auguste Comte et Émile Durkheim en posa les jalons épistémologiques. Cette science de lʼhomme nʼenferme-t-elle pas lʼhomme dans un carcan, le privant de sa liberté, en le réduisant à un objet dʼétude, à une chose objectivable, tel le précipité du chimiste ou la mouche drosophile du biologiste ? Cette volonté de réifier lʼhomme dans ses interactions avec autrui, Durkheim lʼexprime ainsi : il sʼagit de traiter les faits sociaux comme des choses.


Charles Baudelaire suggère cela dans un poème publié dans le recueil Le Spleen de Paris qui est une critique radicale du positivisme comtien, et qui a pour titre le « Le joujou du pauvre ». Cette poésie, composée au milieu du XIXème siècle, peut être également vue comme une réflexion sur la question sociale, apparue durant ce siècle, cʼest-à-dire la question ouvrière, ainsi quʼune réponse à la théorie de la lutte des classes de Karl Marx, théorie que le communiste allemand nʼinventa pas mais reprit aux historiens libéraux français Guizot et Augustin Thierry, tout en lui donnant un autre sens, transformant les classes laborieuses, considérés chez ces derniers comme une classe dangereuse, en classe messianique.


Les pionniers de la sociologie, Comte puis Durkheim, nʼétaient, cʼest le moins que lʼon puisse dire, aucunement des fidèles du dogme catholique quʼAugustin contribua à forger. Néanmoins il devrait avoir sa place, avec Montaigne et Tocqueville, au sein de la catégorie des sociologues dʼavant la sociologie désignés par Raymond Aron dans Les étapes de le pensée sociologique4.


Il faut connaître, dans un premier temps, les ambitions politiques dʼun autre sociologue, lʼAllemand Werner Sombart, pour saisir lʼinfluence majeure quʼa eue la pensée augustinienne sur la naissance de la sociologie. Sombart, lʼautre grand fondateur de lʼécole allemande de la sociologie avec Max Weber, était un socialiste de conviction, quand ce dernier était de tendance libérale. Sombart entendait restaurer la communauté (Gemeinschaft), que la modernité capitaliste avait dissoute et remplacé par la société (Gesellschaft). Pour lui lʼorganisation syndicale était lʼinstrument de cette restauration.


Or cette notion de « société », raccourci de « société civile », a précisément une origine augustinienne. Dominique Colas, qui enseigne lʼhistoire des idées politiques à Sciences Po, met en évidence dans son ouvrage intitulé Le glaive et le fléau que le concept de société est une sécularisation de celui, forgé par lʼévèque dʼHippone, de Cité des hommes ou Cité terrestre. Augustin a déduit des propos tenus par Jésus-Christ selon lesquels il sʼagit de rendre à César ce qui appartient à César et à Dieu ce qui appartient à Dieu quʼil existe deux ordres coexistants, la Cité céleste et la Cité terrestre, et à partir de cela deux types de pouvoir, le pouvoir spirituel étant relatif à la première et le pouvoir temporel à la seconde.


Comme « le royaume du Christ nʼest pas de ce monde, son nom ne peut être invoqué pour appeler à la destruction par le glaive des royaumes terrestres afin dʼédifier la Jérusalem céleste sur les ruines de Babylone, la putain. »5 Ce dualisme politique théorisé par Augustin a pour conséquence de condamner toute révolte violente contre le souverain en vue dʼétablir un Éden, une utopie. Le seul sacrifice légitimé sʼapplique à une configuration bien précise : le fidèle doit être prêt à mourir si le souverain le persécute en tant que pratiquant de sa foi. Tel est le vrai sens du mot « martyre ». Accepter la violence faite contre soi, refuser dʼexercer la violence à lʼencontre des autres ; on appelle généralement cela lʼaugustinisme politique, tant décrié par les marxistes pour qui il est lʼun des piliers de lʼ « opium du peuple »6, autrement dit de la manière dont ils conçoivent la religion chrétienne.


Opium au sens non de poison mais dʼanesthésiant, de produit soporifique, qui inhibe lʼinclination de chacun à mener des actions visant à renverser un ordre établi qui sème injustices, misère et chaos. Lutter, « au nom de la Cité céleste, pour lʼabolition de la société civile »7 est, dans cette perspective, abusif.


Chez Dominique Colas les termes « cité terrestre » et « société civile » sont utilisés comme sʼils étaient interchangeables. Pour lui, la société civile est « le lieu licite de la recherche par chacun de lʼutile qui est le sien »8. Cʼest effectivement lʼordre dont le processus de régulation sʼeffectue par le truchement de deux instances, le Marché et le Droit. « Car la promotion de la société civile comme valeur est aussi bien celle de la tolérance que celle du « bourgeois », la promotion de la liberté de pensée que celle du libre marché. »9


Augustin nʼest donc pas seulement lʼinventeur de lʼexpression « lien social », il est aussi indirectement à lʼorigine de la notion de « société civile », mutation moderne de celle de « Cité terrestre ».


Être sociologue, ce qui signifie examiner la société, lʼétudier, cʼest reprendre – sans souvent dʼailleurs même le savoir – des catégories qui ont été établies par Augustin avant dʼêtre laïcisées. Tout sociologue est de ce fait un peu augustinien. Car en vérité la sociologie se borne à analyser la cité des hommes, à observer les dynamiques qui la traversent.


Par ailleurs, dans le même texte, Colas place sur le même plan fanatiques musulmans, comme ceux qui agréent « lʼincitation de lʼayatollah Khomeyni à exécuter Salman Rushdie »10, et révolutionnaires laïcs, marxistes en tête, désignés comme les représentants des « opprimés qui font entendre la prophétie dʼune Cité juste »11, « des exclus de ce monde animés dʼune espérance impatiente »12, qui agissent au nom dʼune « loi inflexible »13. Lʼentreprise fanatique consiste ainsi à sʼengager en faveur de la destruction de la société civile, pour y substituer un paradis terrestre, une Cité de Dieu sur la terre.


La distinction augustinienne entre les deux Cités veut être abolie par le fanatique, qui entend faire réapparaître le Jardin édénique, revenir à lʼâge dʼor originel. Le fanatisme, écrit Colas, « taraude la modernité tout entière »14


Le projet moderne, qui a accouché du triptyque Renaissance – Lumières – Révolution française, est en réalité le fanatisme même, le fanatisme chimiquement pur : « La nouvelle cité idéale est purement humaine et lʼeschatologie est comme absorbée dans une idée du progrès. Lʼâge dʼor est à portée de main grâce à la science. »15 La science remplace la religion comme clef permettant dʼouvrir les portes du paradis, un paradis qui nʼest plus céleste mais terrestre.


LES SOURCES AUGUSTINIENNES DU MATÉRIALISME DE MARX


La science est la religion des modernes. Karl Marx disait de son socialisme quʼil était « scientifique », pour mieux se distinguer des socialistes français quʼil voyait comme des doux rêveurs. Marx, en composant sa doctrine du « socialisme scientifique » a accompli la synthèse de lʼéconomie politique britannique (Adam Smith), du socialisme français (Pierre-Joseph Proudhon), de la philosophie idéaliste allemande (Hegel) et du messianisme juif (Isaac de Louria16).


Une telle représentation de marxisme nʼa rien dʼoriginal. Jacques Attali la développe dans la biographie quʼil a consacré à Marx17. Cependant il semble que personne nʼa identifié les sources augustiniennes de la loi de lʼHistoire fondée par Marx, qui reprend la prophétie kantienne qui vise à trouver une solution à lʼépineux problème du millénarisme, de la paix cosmopolitique perpétuelle future, mais sʼen détache par son matérialisme, tandis que Kant voit dans le progrès de la raison le moteur du changement politique et social aboutissant à lʼavènement de lʼhomme moral de la fin des temps.


Voilà pourquoi le matérialisme de Marx est qualifié dʼhistorique. Son matérialisme sert à déterminer les ressorts de sa loi scientifique de lʼHistoire : lʼévolution des sociétés humaines, selon lui, est fonction des mutations des modes et des rapports de production. Elle est fonction, faut-il ajouter, des contradictions de la sphère économique. Car la pensée de Marx, outre quʼelle est scientifique et matérialiste, sʼavère dialectique.


Dʼaprès la méthodologie marxienne, le dynamisme du moteur de lʼHistoire résulte dʼune opposition entre les deux forces constitutives du processus de production, exploiteurs et exploités. Dans la Préface à la critique de lʼéconomie politique (1859), il montre que « dans la production sociale de leur existence les hommes entrent en des rapports déterminés, nécessaires, indépendants de leur volonté, rapports de production qui correspondent à un degré de développement déterminé de leurs forces productives matérielles. Lʼensemble de ces rapports de production constitue la structure économique de la société, la base concrète sur laquelle sʼélève une superstructure juridique et politique et à laquelle correspondent des formes de conscience sociale déterminées.18 » Les champs autres que lʼéconomique – la superstructure : la politique, le droit, lʼart, la morale, la religion, les idées, etc. – se modéliseraient ainsi à partir de lʼinfrastructure économique, cʼest-à-dire quʼils auraient un rapport de dépendance vis-à-vis dʼelle.


« Le mode de production de la vie matérielle conditionne le processus de vie sociale, politique et intellectuelle en général. Ce nʼest pas la conscience des hommes qui détermine leur être ; cʼest inversement leur être social qui détermine leur conscience.19 » Une vision du monde donnée voit sa substance, dans la logique de Marx, être définie par le contexte socio-économique au sein duquel est plongé lʼindividu ou le groupe qui fait exister cette vision du monde. Toutefois les marxistes ont rapidement fait en sorte de ne pas réduire cette explication de la dynamique sociale à une approche purement mécaniste. Cʼest pourquoi ils ont tenu à accoler lʼadjectif « dialectique » au matérialisme dialectique. Par conséquent lʼéconomique est devenu en dernière instance surdéterminant, pour reprendre lʼexpression consacrée, ce qui laisse aux autres sphères de la vie sociale une certaine autonomie, certes assez limitée.


Dans le marxisme le terme « dialectique » a deux aspects : confrontation des forces productives (dominants / dominés) dʼune part, et interaction entre deux éléments, lʼinfrastructure et la superstructure dʼautre part ; interaction asymétrique, comme au fond le choc perpétuel dʼun marteau et dʼune enclume où le marteau symbolise la superstructure, affectant lʼenclume de façon résiduelle, et où lʼinfrastructure est représentée par lʼenclume, qui use substantiellement le marteau.


Cʼest lʼacolyte et mécène de Marx, Friedrich Engels qui est à lʼorigine de cette précision théorique. Dʼabord dans une lettre de septembre 1890 adressée à Joseph Bloch, où il est écrit : « Dʼaprès la conception matérialiste de lʼhistoire, le facteur déterminant est en dernière instance la production et la reproduction de la vie réelle. Ni Marx ni moi nʼavons jamais affirmé davantage. Si quelquʼun dénature cette position en ce sens que le facteur économique est seul déterminant, il le transforme en une phrase vide, abstraite, absurde. »20 Ensuite dans un courrier destiné à Conrad Schmidt, daté dʼun mois plus tard, dʼoctobre 1890 : « Il y a interaction entre deux forces inégales : action du mouvement économique, dʼune part ; de lʼautre, action du pouvoir politique, créé par lui, doué dʼune autonomie relative, qui se manifeste dʼune part dans la puissance de lʼÉtat, et de lʼautre dans lʼopposition, née de cette dernière. »21 On peut noter quʼen sʼefforçant de ne pas réduire le politique à un simple reflet de lʼéconomique, Engels tend à réduire la superstructure au politique. Il déforme – les marxistes diraient révise – la pensée de son ami qui entend la superstructure comme lʼensemble de la sphère sociale auquel on retranche lʼéconomique.


Quelque part ailleurs Marx essaye de trancher cet impondérable de la philosophie quʼest le débat idéalisme / matérialisme en avançant que les idées sont in fine des choses, de la matière : les idées ne sont rien dʼautre que les choses matérielles transposées et traduites dans la tête des hommes.


Comme tout bon moderne qui se respecte, Marx sʼattache à rompre avec la Tradition, ce qui le pousse à adopter le matérialisme, inspiré quʼil est tant par Héraclite que par lʼéconomisme des philosophes anglais. La pensée traditionnelle est en réalité plus spiritualiste quʼidéaliste. Elle est fondée sur le postulat suivant : un Esprit suprême, Dieu, a, suite à un acte impératif, créé la matière ex nihilo. Le Verbe divin créateur façonne le monde physique, et non comme le croyaient gnostiques et cathares, le dieu mauvais, le démiurge.


Grégoire de Nysse, qui vécut comme Austin au IVème siècle, en Cappadoce, une région de la Turquie actuelle, explique que la matière naquit de lʼinteraction, de lʼinterférence, entre des puissances spirituelles. Il dit en effet que « la nature spirituelle donne lʼexistence à des forces spirituelles et la rencontre de celles-ci donne naissance à la matière. »22 Chez Marx le cœur du problème réside non pas dans la création de la matière, sa mise en effectivité, mais dans sa transformation. Qui contrôle le processus de transformation de la matière, la gestion de lʼutile et du nuisible, quelles types de machines sont utilisées, quel est le statut juridique du lieu de cette transformation, ainsi que le statut juridique de ceux qui sont les exécutants, ceux qui plus prosaïquement reçoivent les ordres...


Mais le matérialisme de Marx est inséparable de son athéisme, forme radicale du rationalisme. Il participe pleinement à ce processus que Friedrich Nietzsche appellera dans Ainsi parlait Zarathoustra la « mort de Dieu », la sécularisation. Une autre expression de Nietzsche sʼapplique parfaitement à Marx : celle dʼinversion ou de renversement des valeurs. Lʼun des traits caractéristiques du système philosophique composé par ce dernier est lʼantinomisme, lʼhostilité à la Loi du Père.


À la loi du Père suprême, que lʼon retrouve explicitement exposée chez son propre gendre Edward Aveling, dans la stance The Prince of Darkness :


« Telle la tombe qui étend ses ailes


Il passe, ô peuple, Satan le grand !


Salut grand défenseur de la Raison !


Vers toi monteront lʼencens sacré et les vœux


Tu as détrôné le dieu du prêtre. »23


Un antinomisme visiblement typique des socialistes, comme en attestent ces lignes écrites de la main de Pierre-Joseph Proudhon dans De la justice dans la Révolution et dans lʼÉglise : « Viens, Satan, viens le calomnié des prêtres et des rois, que je tʼembrasse, que je te serre sur ma poitrine ! »24


Mais aussi cette hostilité vise le père symbolique de Marx, son maître à penser, à savoir Hegel. Le jeune Marx appartenait même à un groupe qui se faisait appeler les « hégéliens de gauche ». En 1844 Hegel est lʼobjet dʼune diatribe de la part de son ancien disciple, publiée dans les Annales franco-allemandes. Marx y écrit : « Hegel va presque jusquʼà la servilité. On le voit totalement contaminé par la misérable arrogance du fonctionnarisme prussien, qui, dans son étroit esprit bureaucratique, regarde la confiance en soi-même de lʼopinion (subjective) du peuple. »25


Conséquence de cette rébellion contre le père, Marx oppose, à lʼidéalisme de Hegel, le matérialisme. Il renverse également le rapport de détermination établi par Hegel entre lʼÉtat et la société civile.


Hegel défend lʼidée selon laquelle lʼÉtat, en tant que garant de lʼordre, assure aux individus la sécurité, qui est la première des libertés. Cʼest le sens de sa définition de lʼÉtat comme réalité effective de la liberté concrète. Lʼexistence de lʼÉtat est la condition de possibilité de la vie menée collectivement par les hommes au sein dʼassociations en tout genre (familles, tribus, églises, guildes, entreprises, clubs, etc.), hormis la vie de lʼÉtat lui-même, qui correspond à lʼadministration de la coercition (police, justice, et armée ; les fameuses fonctions régaliennes de lʼÉtat).


Cette vie hors de lʼÉtat, Hegel lʼappelle dans Principes de la philosophie du droit État « extérieur », État « de la nécessité et de lʼentendement », ou plus simplement société civile bourgeoise. Jean-François Kervégan met en évidence que Hegel est à lʼorigine de « la conceptualisation dʼune société civile bourgeoise qui, enracinée dans le mécanisme du monde moderne (capitaliste) dʼéchanger et de produire, est à la fois distincte de la sphère proprement politique et nécessairement coordonnée et subordonnée à celle-ci. »26


Il y a en somme pour Hegel un lien de dépendance de la société civile vis-à-vis de lʼÉtat. Lʼune est subordonnée à lʼautre. Selon lui le politique est principe : à la fois premier, originaire, et prescripteur, organisateur de la vie sociale en général. Rapport qui chez Marx est inversé : la société civile (bourgeoise) installe, fonde, lʼÉtat.


Le politique, sʼil est pensé comme subordonné à lʼéconomique, perd de sa substance, voire de sa puissance, de son pouvoir, ce qui est pour le moins paradoxal. Il nʼest quʼun reflet, une superficialité. Karl Marx, en élaborant cette théorie du matérialisme historique (dialectique), a été inconsciemment guidé par la doctrine politique de saint Augustin.


Cʼest lʼaugustinisme politique qui a façonné de manière décisive lʼarchitecture du théologico-politique médiéval. Or, peut-on constater, la distinction fondamentale entre les deux Cités, qui est au cœur de la pensée augustinienne, provient de la réponse donnée par Jésus-Christ aux pharisiens, qui voulant le piéger, désignant une pièce de monnaie lui posèrent la question suivante : « à qui doit-on verser lʼimpôt ? »


La philosophie politique du Moyen Âge avait pour base, pour infrastructure devrait-on dire, une pièce de monnaie à lʼeffigie de César. Cʼest cet objet – économique par excellence – qui en a déterminé la nature. Si dénier son autonomie au politique relève de lʼaporie, il nʼy a pas lieu de voir dans lʼidée que cʼest la société civile qui détermine lʼÉtat (autrement dit lʼéconomique qui détermine le politique, un renversement de la thèse hégélienne sur la « bête sauvage » opéré par Marx) une ineptie totale.


Il y a une force des idées : elles nʼagissent pas seulement dans la conscience des hommes, mais aussi dans leur inconscient. À certains égards Karl Marx est un chrétien, un augustinien, qui sʼignore. Mais à la différence de lʼévèque dʼHippone, il exalte le fanatisme, quand ce dernier, qui fut un modèle de piété, place la foi en Dieu au-dessus de tout. Le fanatisme pouvant être compris comme lʼusage dévoyé de la foi, une fétichisation, une idolâtrie, de la foi, qui devient alors presque divinisée, au détriment de lʼamour raisonnable de Dieu, et donc de son prochain.


COMPRENDRE DAECH AVEC SAINT AUGUSTIN


Si le fanatisme signifie le projet de destruction de la société civile, il sʼapplique autant au marxisme et à sa promesse du règne de la justice universelle à la suite du dépérissement de lʼÉtat et de la disparition des classes sociales quʼau takfirisme, lʼextrémisme islamiste sunnite dʼessence wahhabite, qui invoque le Coran et les hadiths (les paroles rapportées du prophète Mahomet, les évangiles musulmanes en quelque sorte) pour annoncer lʼimminence de ce même règne de la justice universelle, mais en présence de Dieu dans ce cas.


LʼÉtat islamique (Daech), qui apparut en 2014, prétendait être un royaume de pureté et de sainteté. La théocratie dʼAbu Bakr al-Baghdadi, calife autoproclamé de Daech, soutenait quʼelle mettrait un terme à lʼoppression, garantirait le bonheur authentique aux musulmans pieux. Daech se voulait Cité céleste, royaume de Dieu, sur terre, un nouvel Éden des temps de la fin, ceux qui sont précédés par les « signes de lʼheure ».


La première occurrence du takfirisme, al-Qaïda, insiste surtout pour lʼabolition dʼune société civile quʼelle associe à lʼAmérique, cʼest-à-dire aux États-Unis. En 1996 Oussama Ben Laden, depuis lʼHindou Kouch, le Khorasan, la région montagneuse de lʼAfghanistan oriental, annonce publiquement quʼil veut libérer la terre sacrée dʼArabie et lance un appel à la guerre sainte contre le « Grand Sheitan » américain.


Appel concrétisé par les attentats du 11 septembre 2001 visant New York, la putain babylonienne moderne, capitale symbolique dʼune nation qui se conçoit comme un nouvel Empire romain. Dans La Cité de Dieu, Augustin avance justement que Rome est une seconde Babylone. « Rome fut fondée comme une seconde Babylone, et comme une fille de Babylone, dont il plut à Dieu de se servir pour soumettre par les armes la terre entière27. »


Ben Laden, manipulé par la coterie mondialiste, voyait dans le World Trade Center une nouvelle tour de Babel à abattre, non cette fois par la volition de Dieu mais par la main de lʼhomme lui-même. Il nʼétait quʼun pion à la disposition des intérêts sionistes, au sens de mondialistes, puisque Sion désigne Jérusalem, qui pour certains a vocation à devenir la capitale dʼun monde rassemblé autour dʼun gouvernement unique28.


Pour accomplir ce but messianique les sionistes ont décidé de sʼappuyer sur le takfirisme, dont la fonction est comparable à celle de Goldstein dans 1984 de George Orwell.


Voici lʼapport décisif de saint Augustin pour comprendre notre époque troublée : on retrouve dans sa Cité de Dieu la définition du concept qui permet dʼexpliquer lʼémergence du takfirisme. Dans un passage qui commente lʼApocalypse, chapitre 20, versets 7 et 8 : « À la fin de mille ans le Satan sera délié de sa prison. Il sortira égarer les nations aux quatre coins de la terre, Gog et Magog, les rassemblera pour la guerre eux dont le nombre est comme le sable de la mer. »


Lʼessor du takfirisme est lié avec lʼirruption de la guerre de Gog et Magog, qui a démarré, comme le signala le président George W. Bush à son homologue Jacques Chirac, le 11 septembre 2001. « Les prophéties bibliques sont sur le point de s’accomplir, Gog et Magog sont à l’œuvre au Proche-Orient. Les attentats du 11 septembre, ajoute-t-il, en sont la preuve : une armée islamiste fondamentaliste mondiale menace le monde occidental qui soutient Israël29. »


Les armées dʼal-Qaïda et de Daech sont multi-ethniques, multi-nationales, mondiales. Augustin dit que Gog et Magog sont des peuples qui « sont sur la terre entière », en sʼappuyant sur le passage cité plus haut de lʼApocalypse où il est écrit que Gog et Magog sont des nations qui sont aux quatre angles de la terre.


« Quant aux peuples qu’il appelle Gog et Magog, il ne faut pas les entendre comme d’éventuels barbares établis en un lieu quelconque de la terre, qu’il s’agisse des Gètes et des Massagètes, comme le pensent quelques-uns en raison des initiales de leurs noms, ou d’autres peuples étrangers échappant à la juridiction de Rome.


Il nous est bien indiqué, en effet, que ces peuples sont sur la terre entière quand il nous est dit "les nations qui sont aux quatre angles de la terre", et il ajoute que ces nations sont Gog et Magog. »30


En outre, Augustin dʼHippone sʼefforce dʼanalyser ces termes mystérieux de Gog et Magog à partir de leur signification étymologique : « Voici l’interprétation que nous avons trouvée pour ces noms : Gog, « toit », et Magog, « du toit », c’est-à-dire la maison et celui qui en sort. »31


Gog est lʼempire qui a expulsé de lui-même un royaume afin quʼil lui fasse la guerre, Magog. Autrement dit, Magog est engendré par Gog : lʼOccident a fait naître le takfirisme, comme en atteste la déclaration de Roland Dumas faite en juin 2013 sur La Chaîne parlementaire (L.C.P.) : dès 2011 « il se préparait quelque chose en Syrie », « lʼAngleterre préparait lʼinvasion des rebelles en Syrie ». « Cette opération vient de très loin, elle a été préparée, conçue, organisée… dans le but très simple de destituer le gouvernement syrien parce que dans la région il est important de savoir que ce régime syrien a des propos anti-israéliens. Moi jʼai la confidence dʼun ancien Premier ministre israélien qui mʼavait dit "on essaiera de sʼentendre avec les États autour et ceux avec qui on ne sʼentendra pas on les abattra"32. »


Dans un livre paru avant le Printemps arabe, lʼessayiste Gordon Thomas, spécialiste des services secrets, en plus dʼindiquer quʼIsraël, via le Mossad, est « très actif » en Irak, Syrie, en Iran et en Afghanistan, révèle que les milices qui ont lancé lʼoffensive en 2012 contre Bachar al-Assad avaient pour soutien lʼÉtat hébreu. LʼArmée syrienne libre (A.S.L.), sorte de couverture destinée à lʼorigine à masquer lʼaide apportée à Daech, est appuyée par lʼE.R.D. (le département des relations extérieures) du ministère israélien de la Défense, « lʼun des services les plus puissants et les plus mystérieux de lʼespionnage juif. »33


Gordon Thomas affirme en effet que la branche la plus importante de lʼE.R.D., le S.I.M., était « chargé de fournir une "assistance spéciale" à un nombre toujours croissant de "mouvements de libération" en Iran, en Irak et, dans une moindre mesure, en Syrie et en Arabie Saoudite. »34


De même, quand le Hezbollah intervient dans le sud de la Syrie pour contrer lʼavancée des troupes takfiries, ces dernières voient leur allié israélien les soutenir en lançant une attaque, généralement par voie aérienne, contre les militaires du parti islamistes chiite libanais. Le premier ministre Benjamin Nethanyahou nʼavait-il pas prévenu la France que si elle embrassait la cause palestinienne elle serait châtiée par le terrorisme islamiste ?


Le mondialisme est tel le dieu des Étrusques Janus. Il est bicéphale. Première face : Gog, lʼatlantisme qui aspire à lʼhégémonie en semant partout le chaos. Deuxième face : Magog, qui rassemble ceux qui sont les victimes de ce chaos, et qui répliquent à cette violence par la violence. La maison et ce qui en sort. Il nʼy a pas de formule plus exacte que celle-là pour décrire la relation qui existe entre lʼO.T.A.N et Daech. Et cette formule nous la devons à saint Augustin.


Sans la sagesse de lʼévèque dʼHippone il serait beaucoup plus ardu dʼoser exprimer une thèse si subversive, à lʼimage du message de paix si subversif délivré par Jésus-Christ à lʼhumanité.


Au sujet du déchaînement du princeps hujus mundi, du diable, qui se manifeste par lʼirruption de Gog et Magog et leur affrontement, saint Augustin précise que « plus le choc de la guerre sera terrible, plus il y aura de gloire à ne pas céder, et plus riche sera la couronne du martyre. »35


Il y a une universalité du concept de Gog et Magog, que lʼon retrouve également dans le judaïsme et lʼislam.


Dans le corpus vétéro-testamentaire, on retrouve ces figures pleines de mystères notamment dans le livre dʼÉzéchiel. Jean Vacquié signale la chose suivante : « Deux chapitres d’Ézéchiel sont entièrement consacrés à Gog et Magog, les chapitres XXXVIII et XXXIX. Dieu parle à Gog et lui dit : ʽʽEn ce jour-là, des pensées s’élèveront dans ton cœur, et tu concevras un mauvais dessein. Tu diras : Je monterai contre un pays ouvert ; je viendrai vers ces gens tranquilles qui habitent en sécurité, qui ont des demeures sans murailles, qui n’ont ni verrous ni portesʼʼ (Ézech. XXXVIII, 10-11). Telle est l’activité de Gog, couverte et dissimulée, qui s’empare sournoisement des demeures sans serrures. Magog est, à l’origine, le nom de l’un des sept fils de Japhet. Le prophète Ézéchiel l’emploie dans un autre sens. Il en fait le pays qui sert de refuge à Gog et d’où il s’élance à la tête de ses peuples. Dans sa marche conquérante, Gog le rusé, prend comme point de départ Magog, le pays de la violence. Les chapitres XXXVIII et XXXIX d’Ézéchiel sont à lire attentivement ; ils fournissent une vue prophétique sur les grandes guerres mondiales modernes. »36


Enfin, deux sourates du Coran mentionnent Gog et Magog, Yâjuj wa Mâjuj en arabe. La sourate XVIII appelée « La Caverne » et la sourate XXI qui a pour titre « Les Prophètes ». Les figures de Gog et Magog sont décrites comme des forces destructrices qui sont alliées avec le diable contre lʼhumanité et son Créateur.


Dans cette troisième guerre mondiale qui oppose des structures réticulaires transnationales désirant la domination planétaire – soit une ploutocratie protestante protégée par sa citadelle insulaire se prenant pour le gendarme du monde, qui soutient une théocratie juive qui entend déployer ses frontières du Nil jusquʼà lʼEuphrate, et qui combat après lʼavoir suscitée une théocratie musulmane qui projette de reconstituer un califat sʼétendant cette fois du Maroc à lʼIndonésie – les nationalistes français nʼont pas à prendre parti. En optant pour la neutralité ils échappent au piège tendu par le princeps hujus mundi.


Nous nʼavons pas à choisir entre Gog et Magog, entre le terrorisme dʼÉtat et lʼÉtat terroriste. Nous nʼavons pas à nous engager dans ce que lʼon nous présente comme une guerre entre le Bien et le Mal.


Ce nʼest pas la science qui nous enseigne cela, mais la culture. Voilà pourquoi la seconde est supérieure à la première. La science est sans conscience, elle nʼa que la détermination du vrai, par le truchement dʼabstraites formules mathématiques, comme objet. Elle est recherche de la vérité pour la vérité, sans lien avec un but supérieur. Elle sépare lʼhomme de toute transcendance, qui à cause dʼelle voit son univers être désenchanté.


Alors que la culture contient une visée morale. Elle est connaissance au service de principes moraux. Dans Essais sur la théorie de la science Max Weber a souligné quʼil y a dans le notion de culture une dimension éthique, un rapport avec les valeurs : « La signification de la structure dʼun phénomène et le fondement de cette signification ne se laissent tirer dʼaucun système de lois, si parfait soit-il, pas plus quʼils nʼy trouvent leur justification ou leur intelligibilité, car ils présupposent le rapport des phénomènes culturels à des idées de valeur. La réalité empirique est culture à nos yeux parce que et tant que nous la rapportons à des idées de valeur ; elle embrasse les éléments de la réalité et exclusivement cette sorte dʼéléments qui acquièrent une signification pour nous par ce rapport aux valeurs.37 »


Commentant le verset 23 du chapitre VII de lʼÉvangile de Matthieu, Grégoire de Nysse fait remarquer que la science est le « pur savoir » tandis que la connaissance est une « disposition intérieure vis-à-vis de ce qui nous est agréable. »38 Elle est la condition du progrès moral de lʼhomme, de son bien-être, de son bonheur.


Mais une culture qui nʼest pas transmise est une culture en voie de disparition. Il faut conserver et diffuser ce que nous a amené saint Augustin. Car cʼest le moyen le plus précieux pouvant nous aider à emprunter la voie qui mène au salut. La lecture des textes écrits il y a des siècles par lʼévèque dʼHippone reste indispensable. Elle est un viatique : elle nous permet de faire les bons choix.


Ne méprisons pas la pensée de ce père de lʼÉglise : elle est pleine de sagesse, et en aucun cas dépassée ou datée. Il y a bien une actualité de saint Augustin, mais la revue LʼHistoire a échoué à en restituer tout son sens. Ses rédacteurs nʼont pas intériorisé lʼaxiome central de lʼaugustinisme, qui est au fondement de la distinction entre les deux Cités : deux amours ont fait deux cités : lʼamour de soi jusquʼau mépris de Dieu, la cité terrestre, lʼamour de Dieu jusquʼau mépris de soi, la cité céleste. Les historiens stipendiés du magazine LʼHistoire préfèrent ainsi relayer la mémoire des vainqueurs, guidés par leur amour-propre.


À la recherche de lʼexactitude des faits, qui peut amener à nier ce qui paraît le plus évident – et même à nier ce que depuis 1990 la Loi ordonne de croire – ils préfèrent leur confort personnel (entendu plus comme intellectuel que matériel au demeurant) et les égards du monde.



RÉFÉRENCES


1Ce choix éditorial se justifie par la publication, en ce printemps, des Aveux de la Chair, le quatrième tome de lʼHistoire de la sexualité de Michel Foucault, chez Gallimard, où les Confessions de saint Augustin sont examinées minutieusement. Ce dernier est né le 13 novembre 354 à Thagaste (petite ville au sud dʼHippone).


2Saint Augustin, La Cité de Dieu, II, Paris, Gallimard, 2000, p. 928.


3Ibid., p. 609.


4Raymond Aron, Les étapes de la pensée sociologique, Paris, Gallimard, 1967.


5Dominique Colas, Le glaive et le fléau. Généalogie du fanatisme et de la société civile, Paris, Grasset & Fasquelle, 1992, p. 11.


6Dans Critique de la Philosophie hégélienne du Droit, Marx affirme : « La misère religieuse est à la fois lʼexpression de la misère réelle et la protestation contre celui-ci [lʼordre social, N.D.A.]. La religion est le soupir de la créature accablée, le cœur dʼun monde sans cœur, comme elle est lʼesprit dʼune existence sans esprit », cité par Lucien Goldmann, Recherches dialectiques, Paris, Gallimard, 1959, p. 299.


7Dominique Colas, ibid.


8Ibid., p. 12.


9Idem.


10Ibid., p. 13.


11Ibid., p. 12.


12Idem.


13Idem.


14Ibid., p. 13.


15Patrick de Laubier, Lʼeschatologie, Paris, P.U.F., 1998, p. 79.


16Il « est né en 1534 à Jérusalem, dʼun père originaire dʼAllemagne et dʼune mère séfarade dʼÉgypte […]. Selon une source traditionnelle, il aurait étudié avec un maître de la kabbale polonais à Jérusalem. », Youssef Hindi, Occident & Islam, I, Alfortville, Sigest, 2015, p. 59-60. Marx reprend à Louria lʼidée dʼun Messie-collectif, qui nʼest plus le peuple juif mais le prolétariat. Tant Emmanuel Lévinas que Jacques Attali sont revenus à la conception lourianique du Messie-collectif.


17Jacques Attali, Karl Marx ou lʼesprit du monde, Paris, Fayard, 2005.


18Karl Marx, Friedrich Engels, Œuvres choisies, I, Moscou, Éditions du Progrès, 1978, p. 525.


19Ibid., p. 525.


20Cité par Maurice Moissonnier, « Matérialisme historique », in Georges Labica, Gérard Bensussan, Dictionnaire critique du marxisme, Paris, P.U.F., 1985, p. 729.


21Karl Marx, Friedrich Engels, Œuvres choisies, III, Moscou, Éditions du Progrès, 1978, p. 514.


22Grégoire de Nysse, La création de lʼhomme, Paris, Cerf, 1943, p. 195. Ce traité date de 379 environ.


23Cité par Rolland Villeneux, Dictionnaire du diable, Paris, Omnibus, 1998, p. 72.


24Cité par ibid., p. 876.


25Karl Marx, Œuvres philosophiques, IV, Paris, Ivréa, 1981, p. 254.


26Jean-François Kervégan, Hegel Carl Schmitt. Le politique entre spéculation et positivité, Paris, P.U.F., 1992, p. 186-187.


27Saint Augustin, op. cit., p. 789.


28Le sionisme peut ainsi être défini comme lʼentreprise visant à faire de Jérusalem (Sion) le siège du gouvernement de lʼÉtat-monde.


29 Éric Mandonnet, « Chirac, Bush et lʼapocalypse », LʼExpress, 26 février 2009.


30Saint Augustin, op. cit., p. 918.


31Idem.


32 https://www.youtube.com/watch?v=VIXdL1ZZmJg


33Gordon Thomas, Histoire secrète du Mossad de 1951 à nos jours, Paris, Nouveau Monde, 2006, p. 197.


34Idem.


35Saint Augustin, op. cit., p. 920.


36https://bibliothequedecombat.wordpress.com/2013/03/08/gog-et-magog-les-deux-visages-de-la-bete/


37Cité par Freddy Raphaël, Judaïsme et capitalisme, Paris, P.U.F., 1982, p. 8.


38Grégoire de Nysse, op. cit., p. 176.


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