Le propre des crises comme celle que nous tentons de traverser est de révéler des vérités qu’on aimerait bien tenir cachées. Des vérités qui montrent combien notre « vernis civilisationnel » est peu épais, prêt à craquer à la moindre contrainte dans notre temps où l’égoïsme est roi.
Vérité des États et des peuples aussi, pour autant que cette mondialisation qui nous saute « viralement » à la gorge laisse encore s’exprimer un peu les mentalités profondes qui nous façonnent.
Partie vers l’Amérique du Nord en traînant les pieds – habitée par l’étrange pressentiment que ce voyage serait un fiasco –, j’en suis rentrée en catastrophe, sans même pouvoir retourner embrasser ceux que j’étais venue retrouver. On m’accusera sans doute, ici, d’être injuste avec le président Trump que beaucoup portent aux nues dans ces pages, mais j’ai pu constater qu’entre ce qu’on en perçoit ici et ce qui est là-bas existe un gouffre qui n’est certes pas à l’avantage du président des États-Unis. Bref, clamant à longueur de temps que son pays est « le plus fort, le plus inspirant et le mieux préparé » (sic), force m’a été de constater que l’impréparation est, au contraire, totale et les mesures de précaution, qu’elles concernent le Covid-19 ou, pire encore, le contrôle des bagages, sont quasi inexistantes. Ainsi, bien que la ville soit bouclée, aucune consigne de distance dans l’aéroport de Boston surchargé, pas de produits à disposition pour le lavage des mains, des bagages acceptés en cabine sans contrôle ou presque… Mais un bravo à Air Portugal, qui a pris soin de faire monter les passagers dix par dix et de les installer en quinconce dans l’avion.
Révélations, donc, et ce que l’on découvre en arrivant ici est loin d’être glorieux. C’est, hélas, la confirmation que la France des « quartiers » est devenue incontrôlable. La preuve que les discours misérabilistes qui, depuis des décennies, nient puis justifient la constitution des ghettos mafieux récoltent aujourd’hui leurs fruits pourris.
Nous sommes en situation d’urgence, c’est-à-dire dans un moment où doivent prévaloir le civisme et la cohésion sociale. Or, que voit-on ? Après 24 heures, seulement, de confinement, des échauffourées, des bagarres, des pillages dans les commerces d’alimentation… On découvre un monde habitué à vivre hors la loi commune, à vivre souvent aussi de la prédation et qui ne voit pas au nom de quoi il devrait y renoncer. Des vidéos de bagarres circulent, prises sur le vif par des passants effarés. On brûle des voitures en Seine-Saint-Denis pour mieux attirer les pompiers dans des guet-apens ; de même à Lyon, dans le quartier de La Duchère, où « une cinquantaine de jeunes y ont mis le feu à des poubelles et des voitures avant de s’en prendre aux pompiers et aux policiers venus escorter ces derniers », renouvelant l’opération le lendemain, comme le rapporte L’Opinion.
Ici même, à Toulon où j’habite, j’ai pu constater que c’était business as usual, à savoir que les dealers étaient à leur poste habituel en centre-ville. Comme le dit un policier du syndicat Synergie, « il est illusoire de penser que certains individus des quartiers sensibles se plient au civisme en l’état de la législation actuelle ». Sauf à être d’une naïveté complice, on ne voit pas, en effet, qui pourrait croire les ramener dans un chemin où, pour certains, ils n’ont même jamais mis les pieds !