Contrairement à ce qu’on pourrait souhaiter, voter est rarement un geste d’abord rationnel. D’ailleurs, la preuve en est qu’une partie des électeurs hésitent à choisir leur camp jusqu’aux derniers moments.
À part les citoyens au militantisme actif ou ceux qui votent toujours pour le même parti, ce qui représente moins de gens que par le passé, nombreux sont les électeurs qui demeurent hésitants. Malgré leurs convictions premières.
Par exemple, il serait normal que la majorité des Québécois qui appuient la laïcité votent contre Justin Trudeau, qui est le plus farouche des adversaires de la loi 21. Or une partie non négligeable des votes qu’il pourrait recevoir au Québec lui seront accordés par des défenseurs de la laïcité.
Cohérence
Tous ceux qui se définissent nationalistes, donc qui rejettent le multiculturalisme, que Justin Trudeau encourage par une politique vigoureuse et bruyante, devraient aussi voter contre lui. Et aussi contre le PCC, le NPD et le Parti vert. Or, ce ne sera pas le cas, bien sûr. En effet, le Bloc québécois ne peut guère retrouver ses scores des années fastes. Cela semble impossible à moins d’un miracle. Et la politique s’accommode mal des miracles.
Le Québec pourrait empêcher Justin Trudeau de décrocher une majorité de sièges au Canada et même de lui faire perdre le pouvoir au profit des conservateurs. Mais contrairement aux Anglo-Québécois, qui votent massivement pour le PLC, les francophones ne constituent pas un bloc monolithique. Politiquement, ils sont divisés, ce qui peut être considéré comme l’expression d’une diversité politique plus grande que celle des Anglo-Québécois.
Mais ce trait politique les dessert lorsqu’ils font preuve de contradictions. Peut-on être à la fois laïque et multiculturaliste ? Peut-on être nationaliste et multiculturaliste ? Cela prouve que voter est un geste aussi paradoxal et contradictoire que réfléchi. Humain somme toute.