Alors que le Québec ouvre ses portes à un plus grand nombre d’immigrants année après année, le gouvernement Charest n’offre pas davantage de cours de français aux nouveaux arrivants qu’il y a cinq ans.
Pourtant, dans des documents officiels, Québec reconnaît lui-même que les besoins en matière de francisation s’accroissent, notamment parce que les immigrants ne connaissant pas le français sont plus nombreux qu’auparavant.
Depuis 2002, environ 20 000 immigrants sont inscrits chaque année à des cours de français, autant à temps complet qu’à temps partiel. Ils étaient 20 146 en 2006-07, contre 19 204 en 2002-03. Leur nombre fluctue légèrement au fil des ans.
Or, au cours des dernières années, le nombre de nouveaux arrivants admis au Québec a bondi de 19 %. Il est passé de 37 629 en 2002 à 44 686 en 2006. Québec donne donc des cours de français au même nombre d’immigrants qu’avant alors que la clientèle augmente sans cesse.
Les données publiées par le ministère de l’Immigration et des Communautés culturelles (MICC) démontrent que les besoins sont plus importants que jamais. Des 44 686 immigrants admis au Québec en 2006, 8789 (19,7 %) connaissaient l’anglais, mais ignoraient le français. Ils étaient beaucoup moins nombreux en 2002, c’est-à-dire 5954. Cette catégorie d’immigrants a gonflé de 47 % en quelques années seulement.
De plus, 10 102 immigrants (22 % de l’ensemble des admissions en 2006) ne connaissaient ni l’une ni l’autre des deux langues officielles du Canada. Mais cette catégorie est de moins en moins imposante.
Le nombre de nouveaux arrivants qui connaissaient le français (mais pas
l’anglais) au moment de leur admission a, lui, à peine augmenté. En 2006, ils étaient 10 696 (23,9 % de tous les immigrants admis), par rapport à 9183 en 2002.
Le Québec accueille davantage d’immigrants qui connaissent à la fois le français et l’anglais. Leur nombre a grimpé de 62 % depuis cinq ans pour atteindre 15 099 en 2006. C’est 33,8 % de tous les immigrants admis cette année-là.
Des cours en demande
Québec se félicite que la proportion d’immigrants « connaissant le français » soit en hausse et atteigne maintenant 57,7 %. Mais cette statistique doit être analysée avec prudence. Elle regroupe autant des immigrants qui ont une connaissance très élémentaire du français que ceux qui maîtrisent bien cette langue. Notons toutefois qu’au moment de la sélection des immigrants – du moins pour ce qui est des travailleurs qualifiés – plus un candidat maîtrise le français, plus il a de chances d’être accepté.
« On ne peut pas dire que les immigrants qui ont une connaissance du français n’ont pas besoin de cours », confirme le porte-parole du MICC, Claude Fradette.
Les cours de français sont justement en demande. Parmi tous les immigrants qui ont entrepris un cours à temps complet en 2006, 4467 (76 %) ont pu le faire trois mois après avoir déposé une demande de formation, c’est-à-dire à l’intérieur du délai que s’est imposé le Ministère. Les autres (24 %) ont dû s’inscrire sur une liste d’attente. Depuis deux ans, les délais sont moins longs, car « il y a plus de classes de français qu’avant », estime Claude Fradette. Il n’en demeure pas moins que le nombre d’immigrants inscrits aux cours n’a à peu près pas changé.
Dans plusieurs documents officiels, le gouvernement Charest reconnaît pourtant que les besoins en matière de francisation sont en hausse. « Le nombre de personnes ne connaissant pas le français s’accroît depuis plusieurs années en raison de l’augmentation du volume total d’immigration. Cette situation provoque une demande accrue de services de francisation », peut-on lire dans le plan stratégique 2005-2008 en matière d’immigration.
« Il y a tout lieu de croire que ces besoins vont continuer d’augmenter au cours des prochaines années », indique le document de consultation sur la planification de l’immigration 2008-2010.
« Les bassins de sélection d’immigrants francophones étant limités, il pourrait s’avérer difficile de continuer d’accroître la proportion d’immigrants connaissant le français. Par ailleurs, quantité d’immigrants considérés comme connaissant le français au moment de leur sélection n’auront pas acquis le niveau de maîtrise de la langue requis par leur profession. Toute augmentation des volumes globaux d’admissions entraînera en outre une hausse de la demande. »
Investissements supplémentaires
L’automne dernier, la ministre de l’Immigration et des Communautés culturelles, Yolande James, a indiqué que le gouvernement veut accueillir 49 000 immigrants en 2008 et jusqu’à 55 000 en 2010. Elle n’a toutefois pas annoncé des investissements supplémentaires dans la francisation des nouveaux arrivants.
Québec alloue 51 millions de dollars à la francisation cette année. En 2003, il avait accordé 45 millions à cette fin. La hausse du budget a permis de réduire les délais d’attente, surtout à Montréal où les listes s’allongeaient.
Les cours de français sont donnés dans des cégeps, des universités et des organismes communautaires. Les étudiants inscrits à temps complet peuvent, à certaines conditions, toucher une allocation financière du MICC.
(Photo Patrick Sanfaçon, La Presse)
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Plus d’immigrants, pas plus de francisation
Au cours des dernières années, le nombre de nouveaux arrivants admis au Québec a bondi de 19%.
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