COMMISSION CHARBONNEAU

Pas terminé

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Un euphémisme !

Du feu d’artifice des débuts à une fin qui déçoit, les audiences publiques de la commission Charbonneau auront suscité autant d’intérêt que d’interrogations. Une certitude : l’exercice aura été utile, pour les lois, les mentalités, et pour les grandes leçons politiques à en tirer.
C'est en retournant en arrière, aux tout premiers jours de la commission Charbonneau en mai 2012, que l’on mesure le mieux le chemin parcouru.

Le Québec ne partait pas de zéro dans sa connaissance de la corruption qui régnait vu les nombreux reportages à ce sujet. Mais quand Jacques Duchesneau, l’un des premiers témoins, avait détaillé le phénomène du pantouflage, qui voyait de hauts fonctionnaires du ministère des Transports du Québec passer sans transition à des firmes de génie-conseil ; quand il avait qualifié d’« argent sale » 70 % des dons faits aux partis politiques, précisant que « des organisateurs de partis passeraient des commandes aux firmes de génie pour obtenir de l’argent », et non l’inverse, ses révélations avaient causé un électrochoc et même soulevé des doutes.

En novembre 2014, à l’heure où la commission Charbonneau met un terme à ses audiences, plus personne ne sourit ou ne doute.

Tous les gens concernés n’ont pas défilé sous les caméras de la commission, et celle-ci a bâclé le travail quand est arrivé le moment de s’attarder aux partis provinciaux. (À cet égard, la défense de la commissaire France Charbonneau voulant que son mandat fût de démontrer des stratagèmes, ce qui imposait un tri des témoins, est bien faible.) Mais chacun a compris quelle mascarade a été le financement des partis, au premier chef celui du PLQ.

Compris aussi à quel point le règne des copains était intégré dans l’appareil public, combien le crime organisé n’était jamais loin. Combien enfin les élus municipaux ou provinciaux soit étaient au coeur des magouilles, soit fermaient sciemment les yeux, soit se sont comportés comme des plantes vertes, ne posant jamais de questions.

Il est heureux que depuis, des lois aient été changées, des prises de conscience aient été faites, de nouvelles mesures sont à s’implanter dans les entreprises, les regroupements d’affaires ou les syndicats (à la notable exception de la FTQ-Construction, comme on l’a encore constaté cette semaine !), les ordres professionnels, les organismes de surveillance, etc. Il est clair que le rapport de la commission Charbonneau s’inscrira dans une société déjà influencée par ses travaux lorsqu’il sera remis au gouvernement en avril 2015.

Néanmoins, prenons garde aux satisfecit prématurés. Les experts invités par la commission Charbonneau ont fait des mises en garde : par exemple, un plafond trop bas de dons dans un contexte de désaffection politique comme nous en vivons présentement peut inciter les partis à trouver de l’argent par des moyens illégaux. Il ne faut pas non plus sous-estimer la capacité des magouilleurs en tout genre à se réorganiser. Un an après la mise en place, en 1977, de la loi du gouvernement Lévesque sur le financement des partis politiques, le système de collusion était remis en place. Ensuite, il s’est professionnalisé !

Or le détournement de fonds publics croit encore mieux dans un terreau fertile : celui où l’on ouvre largement les portes au privé pour s’occuper du bien public. En ces temps où, sous prétexte d’austérité, le gouvernement Couillard a entrepris de démoniser fonctionnaires et appareils d’État, la table est mise pour que des réseaux se rebâtissent. On est ici au-delà des lois, au-delà de la vigilance collective à laquelle appelait dans son discours de clôture la commissaire Charbonneau. On est dans les choix politiques et, leçon à retenir, ils viennent avec des conséquences.


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