Les souverainistes qui rêvent de voir réunis sous la même bannière les trois partis favorables à l'indépendance du Québec risquent d'être déçus.
Tout indique qu'il n'est du tout réaliste d'espérer voir poindre une alliance de ce genre d'ici la prochaine élection générale.
Car aucune des trois formations souverainistes - le Parti québécois (PQ), Québec solidaire (QS) et Option nationale (ON) - n'est prête à jeter du lest pour favoriser à tout prix un front uni, et ainsi augmenter les chances du PQ de former la prochaine fois un gouvernement majoritaire susceptible d'enclencher la tenue d'un référendum.
Même si le gouvernement minoritaire de Pauline Marois risque d'être défait à tout moment, trop d'obstacles militent contre un rapprochement des partis souverainistes à temps pour le prochain scrutin.
Au Parti québécois, le sujet est devenu carrément tabou. Quand on pense qu'il y a un an à peine une possible alliance était présentée comme une bouée de sauvetage, le changement de cap est assez radical.
«Pas de commentaires», a indiqué le porte-parole du parti, Jean Bouchard, en guise de réponse à une demande d'entrevue sur le sujet avec le président du parti, Raymond Archambault. Donc non seulement on n'est pas prêt à passer à l'acte, mais on ne veut même pas aborder le sujet. Fin de la discussion.
Sur le même ton, le 7 décembre dernier, au terme de la session parlementaire, la première ministre Pauline Marois a semblé avoir jeté l'éponge. Interpellée à ce sujet en conférence de presse, sa réponse fut laconique.
«Pour l'instant, il n'y a pas de propositions qui sont sur la table et qui vont dans ce sens-là», a-t-elle indiqué à La Presse Canadienne, qui lui demandait quels étaient ses projets en la matière.
Elle a ajouté qu'il y avait eu des tentatives dans le passé «qui n'ont pas donné les résultats escomptés».
Elle faisait alors allusion au mandat qu'elle avait confié en novembre 2011 à Jean-François Lisée (devenu depuis ministre des Relations internationales) pour explorer, en vain, les possibilités d'alliance avec Québec solidaire.
À cette époque, après le départ de plusieurs députés, le Parti québécois traversait une grave crise de leadership. Certains députés, devenus depuis ministres, comme Bernard Drainville et Stéphane Bergeron, paniquaient, voyant le PQ chuter dans les sondages, tandis que Québec solidaire gagnait des points et que François Legault s'affairait à créer un nouveau parti. Ils voyaient alors leur salut dans une coalition des partis souverainistes.
«Je pense que ça prend une alliance avec Québec solidaire et avec les autres partis souverainistes et progressistes. On partage suffisamment de choses pour être capables de s'entendre sur l'essentiel», clamait Bernard Drainville, en janvier 2012, en entrevue au quotidien Le Devoir. Répéterait-il la même chose aujourd'hui? Impossible à dire, car il a refusé lui aussi une demande d'entrevue sur la question.
Pendant que le PQ a d'autres chats à fouetter, Québec solidaire et Option nationale ont tenté ces derniers mois un timide rapprochement, qui, encore là, paraît sans avenir.
En entrevue, le chef d'Option nationale et ancien député péquiste Jean-Martin Aussant reconnaît que la marche est haute, tout en convenant que dans un monde idéal ce serait mieux si les souverainistes se regroupaient.
«Tout le monde s'entend pour dire qu'il faut se parler avant la prochaine» élection, dit M. Aussant, en accusant «l'archaïque» régime parlementaire britannique d'être responsable de la division du vote souverainiste, par l'absence de représentation proportionnelle.
Sur le plan personnel, malgré une performance symbolique de son parti lors du dernier scrutin (moins de 2 pour cent du vote et zéro député) M. Aussant refuse toujours mordicus d'envisager un retour au bercail dans l'équipe Marois. «Un retour personnel de ma part est exclu, il n'y a pas de doute», tranche celui qui passait pour un pur et dur de la souveraineté quand il était dans le camp Marois.
Cette position montre à quel point l'approche de chaque parti par rapport à l'accession du Québec à sa souveraineté varie beaucoup d'un parti à l'autre et qu'il s'agit là du coeur du problème.
Il y en a «un qui dit: peut-être, l'autre dit: on en jasera, et nous, on dit: non, il faut être élu pour la faire», résume M. Aussant, allergique à l'idée d'envisager que la souveraineté puisse être placée sur la touche, comme c'est le cas présentement au gouvernement, selon lui.
Car tout en plaidant pour un rapprochement avec le gouvernement péquiste, il en profite pour l'égratigner, lui reprochant de renoncer à l'article un de son programme.
«Si un gouvernement souverainiste n'en parle pas, qui en parlera?», s'interroge le chef d'Option nationale, jugeant qu'un parti souverainiste doit agir en conséquence, «surtout quand on est au pouvoir».
La position d'Option nationale est connue: les trois partis souverainistes renonceraient à présenter un candidat dans les 125 circonscriptions. Pour ne pas diviser le vote souverainiste, on présenterait plutôt un seul candidat souverainiste par circonscription, celui ayant le plus de chances de l'emporter. Ainsi, on contournerait le système actuel, pour créer une «proportionnelle artificielle».
Mais jusqu'à maintenant, jusqu'à preuve du contraire, M. Aussant semble prêcher dans le désert.
Le député de Mercier, Amir Khadir, a bien résumé la situation, à la suite du dernier conseil national de Québec solidaire, en décembre, au cours duquel la question du rapprochement entre formations souverainistes a été abordée. À propos d'une alliance avec le Parti québécois, il a répondu sèchement: «C'est juste impossible».
Et à l'impossible, nul n'est tenu.
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