David Boivin Paul-Émile Ottawa Christian Awashish - Respectivement chefs du Conseil des Atikamekws de Wemotaci, de Manawan et d’Opitciwan
Les Atikamekws ainsi que d’autres communautés des Premières Nations demandent à avoir leur mot à dire dans l’exploitation des ressources naturelles au Québec.
Inquiétude et indifférence sont les réactions manifestées à notre campagne visant la protection de nos droits sur le Nitaskinan, notre territoire ancestral. Nous comprenons les inquiétudes. Elles sont légitimes et peuvent être facilement calmées si le gouvernement du Québec accepte d’entamer avec nous une négociation quant à notre place dans le développement des ressources naturelles du Nitaskinan.
Car notre intention n’est pas de nous opposer au développement économique. Au contraire, nous sommes favorables à un développement économique qui respecte les principes de développement durable et, surtout, qui tient compte de nos droits et de nos intérêts. Comme toutes les autres nations du monde, nous voulons nous aussi prospérer et offrir un avenir meilleur à nos enfants et petits-enfants.
L’indifférence manifestée à l’égard de nos actions nous amène à nous interroger sur le sérieux accordé à nos droits, nos intérêts, voire à notre existence. Nous ressentons cruellement le qualificatif de « peuple invisible » qu’avaient utilisé Richard Desjardins et Robert Monderie en parlant de la nation algonquine dans leur documentaire Le peuple invisible. Souvent, nous ressentons ce phénomène d’un peuple que l’on oublie et que l’on refuse de voir.
C’est donc avec un espoir de changement que nous amorçons cette campagne qui vise notamment à bloquer les opérations forestières de l’entreprise Kruger et d’autres entreprises forestières privées opérant en Haute-Mauricie. À titre de chefs élus de la nation atikamekw, nous sommes présents et nous portons les aspirations de notre peuple pour des conditions meilleures.
Le principal souhait que nous avons, c’est que le gouvernement du Québec accepte de prendre un virage draconien afin de renouveler notre relation pour qu’elle devienne une véritable relation « de nation à nation ».
Toujours victimes d’un système
Nous attendons ce geste depuis plus de 12 ans, c’est-à-dire depuis la publication du rapport de la Commission royale sur les peuples autochtones. Dans ses toutes premières pages, d’un rapport faisant plus de 1000 pages, la Commission affirmait que « les Canadiens rejettent le paternalisme du passé et reconnaissent que les autochtones sont les mieux placés pour définir leurs intérêts et en assurer la promotion ».
Or, que ce soit au niveau fédéral ou provincial, nous sommes toujours victimes du même système paternaliste et colonialiste qui nuit au développement de notre peuple. Encore aujourd’hui, le gouvernement du Québec octroie des permis d’exploitation de notre territoire, sans aucunement tenir compte de nos droits qui font pourtant l’objet de négociations territoriales depuis plus de 32 ans.
Cette réaction crée certainement une grande surprise chez plusieurs, puisque la nation atikamekw est surtout connue pour son caractère calme, un sens aigu de bonté et, bien sûr, son magnifique sens de l’humour. Il en aura donc fallu beaucoup pour nous faire sortir de nos gonds et ériger des barricades. Nous tenons toutefois à préciser que ces actions ne sont pas faites contre les Québécois, mais visent essentiellement le gouvernement du Québec.
Nous aurions aimé utiliser d’autres moyens, moins nuisibles pour les travailleurs et la population en général. Devant le mur d’intransigeance du gouvernement, il semble que nous n’avions pas d’autres choix. Cela étant, nous sommes convaincus que nos demandes sont raisonnables et qu’une entente Atikamekw-Québec permettrait la construction d’un nouveau partenariat bénéfique pour nos deux nations.
«Paix des braves»
Comme les Québécois, nous formons une nation unie, fière de notre histoire et de notre identité. Nous poursuivrons nos actions tant et aussi longtemps que nos demandes ne feront pas l’objet de réponses. […]
Nous demandons la négociation d’une entente semblable à celle de la « paix des braves » conclue avec la nation crie en 2003. Ce type d’entente politique et économique peut être conclue indépendamment des négociations territoriales visant la conclusion d’un traité.
Nos actions sont aussi conformes à la Déclaration de l’ONU sur les droits des peuples autochtones, qui reconnaît notamment le droit au « consentement libre et éclairé » des peuples autochtones touchés par des activités d’extraction sur leur territoire. Elles seront menées de manière pacifique et ordonnée.
Nous demandons le respect intégral de nos droits inhérents, reconnus en droit canadien et en droit international. Concrètement, nous voulons notamment conserver l’accès, sans entrave, à nos territoires ancestraux, favoriser l’harmonisation des opérations forestières et de nos activités traditionnelles, retirer des bénéfices de l’exploitation des ressources, ainsi que devenir des partenaires du développement, ce qui nous permettra de développer notre économie et mettre fin à nos situations chroniques de pauvreté.
Nitaskinan
Nos terres et nos droits méritent le respect
Les Atikamekws ainsi que d’autres communautés des Premières Nations demandent à avoir leur mot à dire dans l’exploitation des ressources naturelles au Québec.
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