Après presque un demi-siècle, persiste encore une sorte de honte niaise. On continue, hélas, hélas, hélas, le silence total sur des garçons qui hypothéquaient courageusement leur avenir, qui agirent absolument librement et sans aucun profit appréhendé. Qui résistèrent quoi, armés de manière artisanale tout à fait comme ceux de Saint-Denis ou de Saint-Eustache au temps de la guerre anticoloniale des débuts du XIX siècle.
Ces « jeunes gens en colère », qui entrèrent dans la clandestinité, ceux des débuts de 1960 comme ceux de 1970, sont des inconnus pour les jeunes générations. Ils méritent de la lumière, non ? Ils montraient du courage, une audace terrible tant somnolaient la majorité des nôtres, sauf au RIN de Pierre Bourgault. Ils prenaient, oh oui, des risques énormes. Ils allèrent, la plupart en prison, quelques-uns pour longtemps, et en exil, tel Richard Bizier. Ils furent vendus.pour de vrais « 30 deniers », bien sonnants et bien trébuchants, furent trahis par des Judas-Jacques-Lanciault ou bien capturés par une puissante machine de répression militaro-policière avec immense filet mis en action par les agents zélés du fédéralisme canadian et par leurs inféodés au Québec même.
Les rebelles de 1837-1838, ces magnifiques « Patriotes » sont au calendrier et fêtés chaque novembre. Conspués par le haut-clergé froussard face aux « bons maîtres », interdits de sépulture chrétienne, ils sont devenus, le temps passant, des héros incontestables. Plus d'un siècle a passé, c'est bien ça ? On grave leurs noms sur des socles, on rend de justes hommages à ces héros antimonarchistes armés. Qui tuèrent parfois. Pour la cause sacrée. Pour les jeunes membres du FLQ rien, c'est un silence qui a assez duré. De jeunes historiens québécois devraient désormais enquêter et publier sur eux. On découvrira, me dit-on, des « qui-ont-mal-tourné », et après ? Dans n'importe quel groupe de libération, toujours, il y a eu des héros qui ont mal vieilli. Durant la Résistance en France comme parmi les batailleurs de l'Irlande-nord. Pas vrai ? Nul patriote n'est tenu de mener une vie exemplaire après le temps des combats. Et vive la liberté! C'est banal, normal, prévisible que certains comportements héroïques ne s'accomplissent que dans l'urgence d'un moment d'histoire, non ? Il s'agit de faire cesser un mutisme louche. De cesser d'intérioriser de façon fort malsaine la vision haineuse de nos desperados selon les vues forcément rapetissantes des ennemis de notre patrie. Je souhaite - et j'ose croire n'être pas le seul - mieux savoir qui étaient ces jeunes gens qui firent trembler pendant des mois, certaines années, les puissants et les assistants passifs de notre DILUTION ORGANISÉE. Tenez ces deux mots. Ils résument clairement ce qu'est l'Histoire du Canada. Cela depuis le goddam Durham jusqu'à la maudite tromperie faussement nommée : confédération.
Au temps des premiers bombardements felquistes, travaillant comme scénographe au « réseau français » (réseau tant craint par PET) de la CBC, je me souviens fort bien des mines d'enterrement de la riche English section de la dite Boadcasting Corporation, boulevard Dorchester à Montréal. Crispations partout. Énervements subits. Suspicions virant à la plus folle des paranos dans les couloirs, les bureaux et les salles de réunion. On peut imaginer les semblables désarrois ailleurs, à Ottawa comme à Toronto. Noyautage du personnel par des agents de la Police Montée déguisés en cadres. « Le cadre », petit, moyen, supérieur, c'est si pratique comme camouflage policier.
Ce fut un temps de panique, d'agitation bureaucratique allumée par ces quelques jeunes résistants impatients. Bombes donc ici et là ! Posées par qui ne croyaient plus aux faveurs d'une bien lente démocratisation entre les « deux solitudes ». Ainsi le Big Brother (et Big Boss) ce sinistre bloke, Gordon, proclamait scandaleusement que les Québécois, tous, n'étaient pas assez compétents pour obtenir la moindre promotion dans les grandes compagnies, publiques ou semi-publiques. Ainsi, soudainement, voici que des bombes éclataient, sans cesse, et voilà que nous pouvions lire (dans La Presse comme dans Le Devoir) des « avis de promotion » inouïs. Tiens, tiens ! Subitement les Québécois avaient des talents ! Brave et bonne conseillère, la violence ?
Quand les felquistes furent mis en cellules pas un seul de tous ces « frais promus » eut l'idée normale d'envoyer au moins des oranges ou des chocolats à ces très jeunes hommes enfermés en pénitenciers ! Oh, les ingrats. C'était de leurs actions intrépides, de la peur, que survenaient leurs neuves fonctions importantes, leurs nouvelles grosses gages. Ces jeunes garçons du FLQ avaient réveillé ces racistes francophobes, bonzes à clubs privés interdits aux nôtres, bonzes du Golden Mile, mandarins racistes des establishements. C'était donc la frousse-au-cul de ces damm blokes qui venait de permettre - à nos compatriotes doués - la fin du mépris raciste anglo et d'avoir droit à des postes de directeurs, de gérants, de surintendants, de directeurs, de vice-présidents. Ah oui, une belle bande d'ingrats ! Ou bien ils étaient tous des innocents, des mal-politisés, des aliénés à plaindre, des désinformés, des polis esclaves habitués aux reconnaisances très tardives. Eh oui, pas une seule orange donc dans ce temps-là. et, en 2005, pas encore un seul nom de ces résistants armés, nulle part, dans aucun manuel scolaire d'histoire, pas une seule mention à aucun anniversaire . anniversaire qui pourrait souligner « un tout-petit-peu-au-moins » les bénéfices cueillis à cette époque par les nôtres.
« Oui mais il y a eu des victimes innocentes », me dit-on aussi. Inévitablement. On n'a qu'à lire un peu à propos de tout mouvement d'émancipation, de révolte. Au Mexique des Zapata, des Bolivar comme aux jeunes Etats-Unis de 1776, il y eut des victimes, on peut citer mille villes et/ou pays, n'est-ce pas ? Il faut être d'une candeur rare pour imaginer une lutte, un combat armé et souhaiter qu'on n'y trouve aucun sang versé. Oui, il y a eu, hélas, cette dévouée simple secrétaire chez La Grenade Shoes, cet étudiant, kamikaze sans le vouloir, jeune et maladroit porteur de bombes sous Vallières et Gagnon, l'étudiant Corbo, 18 ans. Et cet agent de police devenu hélas handicapé, hélas aussi ce malheureux concierge, M.O'Neil, gardien d'une caserne militaire une certaine nuit de bombe. Et puis, il y a 25 ans maintenant, événement traumatisant, un député-ministre libéral, Pierre Laporte.
J'en oublie ? C'est possible. Encore une fois, cette partie de NOTRE histoire, gênante pour les timorés, qui est tue, cachée, doit désormais trouver de l'éclairage. Ces batailles, rarement meurtrières, devraient faire partie des manuels scolaires, sans aucune espèce de honte, avec vérité. En montrer avantages et désavantages, oui, ces graves inconvénients via la répression. Blocages de promotions pourtant méritée, mon cas à trois reprises à la SRC quand j'étais security risk n'est-ce pas, comme Gérald Godin, ou un Norman Lester, il y a pas longtemps. N'oublions jamais les ordres « implicites » de PET à la RCMP d'où vols des listes du PQ, (vraies) bombes, (faux) communiqués felquistes, incendiât de grange.
Oui, il est urgent maintenant qu'un chercheur sorte de l'ombre ces vaillants jeunes défenseurs des nôtres injustement enterrés vifs. Nous souhaitons ce (ou cette) amant de lucidité, de franchise. Que ce sain travail d'histoire normale se fasse dès à présent, presque 50 ans après les premiers gestes du FLQ. Ils sont des faits notoires. Facile à dénicher cette part d'histoire dans les archives des journaux. Maintenant pour rendre justice mais aussi pour faire enrager et nos adversaires néo-rodhésiens (1) et néo-chiens-couchant. Qu'ils en bavent ceux qui, salauds finis, inventent la nocivité et l'inutilité des actes terroristes en vue de notre liberté totale. Personne n'insulte la mémoire de M. Begin qui fut, lui aussi jeune, un fort actif terroriste aux aurores de l'installation de la patrie juive.
L'autre qui me dit aussi : « Oui mais le raciste Speak white montréalais des Square Heads, si insultant, on ne l'entend plus. Tout a changé maintenant, non ? » Je répond : raison de plus de revaloriser les premiers jeunes combattants de notre lutte d'émancipation. Ils furent héroïques, il ne faut plus craindre de le dire, de vanter ces gars-là, de narrer leurs actions illégales mais non « illégitimes », dans nos livres d'histoire. Seul le regard méprisant de nos vieux agents d'assimilation, celui des foremen de nos pères soumis, nous empêchant de crier : « Honneur à vous premiers combattants du milieu du 20ième siècle ! ». Et l'autre mal-décolonisé, aliéné qui me dit encore : « En 2005, pourquoi reparler de ces années noires ? » Parce que « je me souviens », parce que relater ce passé récent, c'est exactement le rôle de l'historien. Justement, en 2005, il faut en parler, il faut inscrire les faits, la courageuse action entreprise quand il y avait encore, malgré les promesses des quatre « L » (Lesage, Lévesque, Lajoie, Laporte) trop peu de progrès, et, partant, trop peu d'espoir. Les âmes délicates, les bons-ententistes à tout prix, les effaceurs des faits gênants, les révisionnistes patentés, tous ces cornichons frileux et hypocrites, ces carpettes de l'axe anglo-américain, ces lamentables cocus-contents, vous verrez, vont se pincer le nez, l'auriculaire en l'air, « Quelle horreur ! Ces bombes, pouah ! » Ce qui va ravir les anciens patrons blokes et leurs courroies dociles en fédérastie.
Au moment où le vaiseau coule, au moment où les rongeurs fédérats (afflublés du beau mot de créatifs publicitaires) se sauvent, se cachent.c'est bien, non ?, le bon moment de louanger des jeunes gens impétueux, d'un courage édifiant, et, je le répète, qui hypothéquaient leur avenir complètement. Agissant pas pour gagner des sous ô Juges Gomery de la terre, mais pour effrayer des racistes sourds à 85 % de la population les environnant; ce qui était un racisme québécois à la sauce « Afrique du sud » !
À partir de maintenant, de cet appel, j'ose espérer la rédaction généreuse d'une personne du monde des historiens. Justice sera enfin rendue. Un malodorant silence enfin brisé. Un tabou bien con enfin démoli. Tout un pan de notre histoire, celle de nos jeunes felquistes, n'a absolument rien de honteux.
Cette honte que la gent bien-pensante, languedebois-parlante, nous ordonne de nous taire sans le dire, elle fait exactement le jeu de nos dominateurs. Y compris le jeu de la horde des méprisables libéraux à commanditaires stupides, à vagues de pavillons unifoliés. Et le jeu des valets ottawaïens, des rois-nègres serviles, à la Georges-Étienne Cartier, le vire-capot, ou à la Louis St-Laurent, le tergiversationnaliste, ou encore à la PET-Trudeau, le jetsetter apatride et déraciné, enfin à la Jean Chrétien, cet ignoble Janus (à deux et quatre faces) le pire de notre histoire.
Eux tous et bien entendu de mèche avec nos adversaires les noyeurs intéressés de nations souveraines, les installateurs zélés de mosaïques et du multi-cul. instrument si pratique pour nous diluer au plus tôt : qui ?
Nous : les trop longtemps endormis Québécois bafoués, nous, la trop patiente naguère MAJORITÉ INVISIBLE, nous, les anciens mollassons « moutons », nous les ancien favorisateurs des ghettos, nous les jadis racistes invertis (nous n'étions que des crétins, c'est entendu.)., c'est terminé en 2005, enfin ! Combat essentiel en 2005 ! Eux, les à-abattre » électoralement désormais avec tous leurs parasites vénaux, des Chuck Guité graisseurs compulsifs jusqu'au « prophète indépendantiste » loufoque, le pourri revenant shakespearien du Danemark, l'Alphonso.
Je sais, je sens, que l'on va venir corriger cette part de notre histoire en 2005 et le vieil homme que je suis devenu en est si content, si léger, si fier. Je dis déjà merci à cette personne courageuse. J'ai déjà hâte à cette lumière. J'ai hâte déjà à toute la vérité. Comme je le fis, en 1965 en page de garde de mon roman populaire (ce qui enragea les abbés Marcotte de tout le territoire! ), « Pleure pas Germaine », je veux dédier ce petit pamphlet à (et peu m'importe s'ils ont bien ou mal tourné - et c'est quoi au juste « mal tourné » - ) à MM. Mario Bachand, Alain Brouillard, Richard Bizier (que je revois parfois), François Gagnon, Jacques Giroux, Gabriel Hudon (condamné 20 fois à la « perpétuité » et à qui, en 1980, je confiai mon « Contes du Sommet bleu » chez Quebecor), Yves Labonté, Denis Lamoureux (aidé à sa sortie de pénitencier par Pierre Péladeau), Eugénio Pilote, Gilles Pruneaux (rencontré à la célèbre « Taverne Royal Pub » en 1961), Pierre Schneider (aidé aussi chez Péladeau), Georges Schoeters, (émigrant du pays de Brel), Roger Tétreault, Raymond Villeneuve (encore actif chez les radicaux de la cause).
Vive TOUTE l'histoire !
CLAUDE JASMIN
(1 : « rodhésien » est l'infamante épithète publiquement utilisée pour nos racistes par René Lévesque face au racisme francophobe des anglos de son temps. C.J. ).
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé