Lino Zambito fonce dans le tas. Il est à faire la tournée des médias afin de faire la promotion de son bouquin « Le témoin » dans lequel, si l’on se fie aux premières description qu’on en fait, il écorche pas mal le parti Libéral du Québec, la commission Charbonneau (CEIC) et l’Unité permanente anti corruption (UPAC) de Robert Lafrenière… J’ai bien hâte de lire ça, il va sans dire.
L’ancien témoin vedette à la CEIC Lino Zambito écorche d’entrée de jeu le très puissant (et intouchable?) argentier Libéral Marc Bibeau. On parle bien ici de celui qu’on a protégé soigneusement de la vindicte et de l’opprobre populaire en lui épargnant une comparution honteuse devant la commission Charbonneau. Pourtant, le nom de Marc Bibeau a été mentionné à maintes reprises à la CEIC, on a beaucoup pointé vers lui en matière de financement politique pour le PLQ, un élément central du mandat de la commission Charbonneau. Qu’il ne comparaisse pas à la CEIC a fait grincer bien des dents alors que tant d’autres ont dû s’y astreindre. Pourquoi pas lui?
Dans ce cas-ci, Zambito pointe vers une histoire de renouvellement de bail pour une commission scolaire dans un immeuble que possédait l’argentier libéral Bibeau. C’est qu’il connait le dossier et peut appuyer ses allégations. Au cours de différentes entrevues qu’il a donné, Zambito va cependant beaucoup plus loin. En entrevue de fond (plus de 23 minutes) avec Denis Lévesque, Zambito avance quelque chose de troublant sur Marc Bibeau, sur le PLQ et ses liens avec l’UPAC.
La haute direction de l’UPAC en contact avec le cabinet Couillard
Pour Lino Zambito, il ne fait aucun doute que Marc Bibeau est un intouchable. Non seulement Marc Bibeau n’a-t-il été que très peu embêté par la CEIC -il aurait dû être un témoin central, capital de la commission- mais semble-t-il que Bibeau pourrait bien jouir des largesses, de la complicité qui existe entre la haute direction de l’UPAC et le cabinet du PM Couillard. C’est précisément ce qu’évoque Zambito à partir de la 19e minute de cette entrevue. Il admet avoir pleinement confiance aux enquêteurs de l’UPAC et être certain que ceux-ci font un excellent travail mais quand vient le temps de parler de la haute direction de l’UPAC et du commissaire Lafrenière, le ton change: « je n’ai absolument pas confiance dans la haute direction de l’UPAC, en Robert Lafrenière et je sais de source sûre qu’il y a communication entre la haute direction de l’UPAC, Robert Lafrenière notamment et le chef de cabinet de Philippe Couillard« .
Voilà une affirmation très grave qui suggère une possible collusion politique, une complicité du moins, entre le corps de police chargé d’enquêter sur la corruption au Québec, des limiers qui mènent des enquêtes potentiellement explosives pour le PLQ, et le parti Libéral, visé par les dites enquêtes. Zambito affirme tout haut ce que bien des gens soupçonnaient tout bas. Le PLQ s’acharne à vouloir nommer seul le boss de l’UPAC, politise le processus de nomination des juges, s’assure que quiconque a des visées vers la magistrature soit excessivement prudent (ô l’euphémisme) quant au dépôt d’accusations qui puissent embarrasser le PLQ…
Ça dépasse l’entendement.
« Le MTQ n’est pas une cible mais un partenaire de l’UPAC »…
On se souviendra de cette déclaration surréaliste du grand patron de l’UPAC Robert Lafrenière pour expliquer au ministre Robert Poëti son refus d’enquêter sur les graves problèmes qui ont cours au ministère des Transports du Québec (MTQ) : « Le MTQ n’est pas une cible mais un partenaire de l’UPAC »… Le contexte ici, tiré de l’article de Louis Lacroix :
« Mais Poëti n’était pas le seul à s’inquiéter de ces manœuvres administratives. Selon nos informations, des employés du ministère des Transports auraient aussi porté plainte auprès de l’Unité permanente anticorruption, sans succès. La haute direction de l’UPAC aurait refusé d’enquêter. La directive viendrait directement du commissaire Robert Lafrenière, pour qui le MTQ «n’est pas une cible, mais un partenaire», indique-t-on. «Si on voulait enquêter, il fallait demander des documents, et ils ne nous les donnaient pas, nous dit notre informateur. La seule façon aurait été que l’escouade Marteau, le bras policier de l’UPAC, aille perquisitionner au ministère. Ça ne s’est jamais fait.» »
Dans son entrevue avec Denis Lévesque, Lino Zambito avance (à 16:20) un autre fait qui m’apparaît troublant, celui-ci affirme avoir rencontré les enquêteurs de l’UPAC plus de 35 fois mais que jamais on ne l’a questionné sur quoi que ce soit au MTQ. Jamais. Le ministère des Transports du Québec est le plus gros donneur d’ouvrage et les collusionnaires le visait particulièrement. Pourtant, encore aujourd’hui, tout semble être fait afin d’éviter que lumière soit faite sur les graves allégations qui visent des pratiques douteuses dans ce ministère. Robert Poëti paye très cher sa tentative de brasser de guêpier. Il est toujours en pénitence aujourd’hui. L’ex sous-ministre Dominique Savoie a réussi à avoir sa peau non sans avoir à le payer de son poste plus tard. On l’a rapatrié au conseil exécutif depuis…
Annonce de subventions pendant des événements de financement libéral…
Toujours lors de son entrevue avec Denis Lévesque, Zambito revient (à partir de 8:04) sur des événements de financement du PLQ pendant lesquels le parti récoltait de l’argent mais non sans en redonner en retour en quelque sorte puisque selon l’ex entrepreneur en construction, on annonçait des subventions en plein cocktail libéral au mépris de toutes les règles.
En terminant, dans la ronde des articles publiés sur les « révélations » de Lino Zambito, on portera attention à celui-ci de Kathleen Lévesque dans La Presse... Comment ne pas ressentir un petit malaise quand ce média en particulier traite des déboires de Marc Bibeau, un proche de la famille Desmarais. Au lendemain de la publication du rapport de la CEIC, le Journal de Montréal publiait ceci sur le financier libéral :
« Même s’il est relié au financement sectoriel dans le rapport de la commission Charbonneau et qu’il est écorché par plusieurs témoins, Marc Bibeau a toujours la confiance de la Corporation Financière Power où il siège au conseil d’administration.«
Ainsi dans le texte de La Presse sur Zambito et ses révélations concernant Bibeau la journaliste insiste à quelques reprises le fait qu’il s’agit de « sa version des faits », de « sa propre vérité ». Et plus loin :
« M. Zambito raconte que Marc Bibeau aurait aussitôt pris le téléphone pour discuter avec le chef de cabinet de Jean Charest pour s’assurer que le dossier débloque au Conseil des ministres. Lino Zambito dit s’en être étonné et rapporte ce que lui aurait alors expliqué Marc Bibeau : « Quand on a eu besoin de toi, t’étais là. Là, t’as besoin de nous. Faut qu’on soit là pour toi. Faut que l’ascenseur revienne. C’est comme ça que ça marche. » M. Bibeau aurait ajouté : « Quand on forme un Conseil des ministres, on est cinq dans le war room. Je suis un des cinq et les ministres le savent. J’ai du poids. Quand on a besoin qu’un dossier se règle, ils sont mieux de bouger. »
Marc Bibeau a refusé d’accorder une entrevue à La Presse, mais par l’entremise de son avocat, William Brock, il a toutefois tenu à affirmer que les événements décrits par M. Zambito sont des allégations « dénuées de tout fondement » puisqu’ils n’ont jamais eu lieu et que l’histoire du pseudo « retour d’ascenseur » n’est que « pure fiction ». »
Vous vous souvenez du député Amir Khadir qui n’avait pas hésité à renoncer à son immunité parlementaire pour accuser Jean Charest d’être à le premier suspect et à la tête d’une machine qui a commis des crimes…
Lino Zambito emprunte de la même stratégie quand il met au défi Marc Bibeau de le poursuivre. « Mais il ne le fera pas, il n’osera pas le faire pour éviter d’être assigner à témoigner lui-même » a avancé l’ex entrepreneur de Boisbriand.
Les langues se délient.
Et ce n’est pas fini. En fait, ça ne fait que commencer.
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