Bientôt on se demandera: « Mais qui a lancé ce débat sur la Nation québécoise? » On pourrait dire que cela remonte à la naissance du Canada. Mais le débat actuel, celui qui amène un premier ministre du Canada à prendre l'initiative d'une motion sur la reconnaissance de la nation québécoise, c'est nouveau ça...
Non ce n'est pas Ignatieff. Non ce ne sont pas les Jeunes libéraux du Québec. Non ce n'est pas Gilles Duceppe. En fait, il faudrait d'abord remonter à André Boisclair qui provoqua Stephen Harper le 19 juin dernier. Puis comme l'intéressé faisait la sourde oreille, Gilles Duceppe relança la question. Excédé, le premier ministre du Canada finit par déclarer : « C'est un débat de l'Assemblée nationale. Je ne sais pas ce que cela représente du point de vue juridique. »
Le moins qu'on peut dire, c'est qu'on n'était pas parti pour le débat du siècle!
Pendant l'été, le débat s'est ensuite déplacé au sein même du Parti libéral du Canada. Michael Ignatieff faisait un peu cavalier seul en reconnaissant effectivement l'existence d'une Nation québécoise au Canada. Il avait même trouvé une jolie formule : « Le Québec est ma nation et le Canada est mon pays ». Cette question de la reconnaissance du Québec au sein du Canada devenait alors l'enjeu de la course au leadership du Parti libéral.
Alors, pourquoi Gilles Duceppe a-t-il voulu jouer au plus fin en le relançant ? Il était évident que la Chambre des communes rejetterait toute motion sur la question venant du Bloc. Le génie de Stephen Harper fut de reprendre l'initiative en proposant sa propre définition, en ajoutant en fait une précision : «au sein du Canada uni». Ben oui ! Il fallait s'y attendre...
Gilles Duceppe en fut tellement ébranlé qu'il a inventé une nouvelle formule, lourde, boiteuse, à la limite du ridicule, qu'il avait même du mal à expliquer. «Les Québécois forment une nation actuellement au sein du Canada... »
Le débat n'est pas fini cependant car Stephen Harper a commis deux erreurs cette semaine :
* Il a présenté sa motion dans un discours très partisan qui a immédiatement jeté une ombre sur sa sincérité. En fait, sa motion revient à nier le droit du Québec à l'autodétermination déjà reconnu par le Parti progressiste conservateur au temps de Brian Mulroney. Et il a laissé entendre que le Canada pourrait être appelé à se prononcer par référendum sur la question (Canadians have a say)...
* Et le premier ministre du Canada a sous-estimé l'opposition viscérale, dans tout le reste du pays, à toute forme de reconnaissance particulière du Québec. Que l'on appelle le Québec comme on veut, depuis l'échec du débat sur la société distincte, ce sera toujours un non retentissant.
Le pauvre Stephen Harper, quoi qu'il y paraisse aujourd'hui, n'est pas sorti du bois. Si jamais les Libéraux devaient rejeter la motion sur la reconnaissance du Québec comme Nation au cours de leur congrès, ce qui est toujours une possibilité, Stephen Harper se retrouverait plus isolé que jamais.
Enfin, une dernière note sur le débat qui s'est spontanément tenu mercredi sur la question. Jack Layton, au nom du Nouveau parti démocratique, a été le chef politique le plus honnête et le plus cohérent avec l'histoire de son parti. Il en a fait une question de respect. Cela ne sentait pas le calcul politique comme les discours des autres chefs de parti. Mais Layton a réagi en Québécois, lui !
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