Le président russe vient d’annoncer un référendum visant à modifier profondément la constitution de son pays, suivi d’une démission surprise du gouvernement. Le but : se maintenir au pouvoir après la fin de son mandat.
Une énigme obsède la Russie et les chancelleries depuis des années : que va faire Poutine après la fin de son quatrième mandat présidentiel en 2024, lui qui est au pouvoir depuis vingt ans ? Elle vient de recevoir un début de réponse.
La Constitution lui interdit de se représenter à un troisième mandat consécutif. C’est la raison pour laquelle il avait dû, en 2008, céder sa place à son protégé Dmitri Medvedev et se contenter du poste de Premier ministre. Mais, chacun le sait à Moscou, l’expérience lui a déplu, Medvedev ayant pris des initiatives, notamment diplomatiques, que, redevenu chef de l’Etat en 2012, Poutine a par la suite publiquement désapprouvées. Il y a quelques années, il a mis au point un premier subterfuge en prolongeant le mandat présidentiel de quatre à six ans, si bien qu’il a été réélu en 2018 jusqu’en 2024.
Poutine ne veut apparemment pas faire voter un amendement à la constitution lui permettant de faire un troisième mandat consécutif, sans doute pour éviter d’apparaître tel un vulgaire dictateur du Tiers-Monde. Il se dit à Moscou qu’il a un temps imaginé prendre la présidence d’une Union entre la Russie et la Biélorussie, qui ne formeraient plus qu’un seul Etat, en négociation depuis des années. Cette solution aurait permis à Poutine de rester au centre du jeu. Seulement voilà : fin décembre, l’autocrate biélorusse Loukachenko a finalement dit non à cette Union qui l’aurait mis, lui, sur la touche.
Scénario sophistiqué
Alors Poutine a imaginé un scénario plus sophistiqué, à la chinoise, semble-t-il. Lors de la présentation de ses vœux, ce mercredi 15 janvier, il a proposé un référendum sur un changement de la Constitution. Un discours immédiatement suivi de la démission surprise du gouvernement.
L’idée ? En gros, il s’agirait de réduire les pouvoirs du président et d’accroître ceux de la Douma, du Premier ministre et de la Chambre haute, le Conseil de la Fédération qui rassemble les gouverneurs des régions et des républiques autonomes de Russie dont le rôle serait grandement renforcé.
En 2024, Poutine, qui aura alors 72 ans, aurait donc le choix entre deux solutions. Soit rejouer 2008 et redevenir le Premier ministre renforcé d’un président affaibli. Mais c’est peu probable. Soit prendre la tête de ce Conseil de la Fédération, devenant ainsi la figure tutélaire du régime, une sorte de leader suprême sur le modèle de Deng Xiaoping en Chine dans les années 1980. C’est l’hypothèse que retiennent aujourd’hui les analystes politiques russes.