L'exercice auquel vient de se livrer le ministre des Finances, Michel Audet, tient davantage du bilan comptable de quatre années de pouvoir du gouvernement que d'une manoeuvre destinée à insuffler une énergie nouvelle au Québec. Pas de doute, les finances du Québec sont toujours dans un état précaire, mais jusqu'à quel point un gouvernement peut-il compter sur un autre, celui de Stephen Harper, pour lui fournir les munitions nécessaires pour gagner des élections?
Le ministre Michel Audet a présenté son dernier budget avant sa retraite de la politique. De son propre aveu, M. Audet ne laissera pas le souvenir d'un artificier en mal de «feux d'artifice», mais plutôt celui d'un bon père de famille. Il faut dire que la situation financière du Québec n'a toujours rien de réjouissant et que certaines priorités -- la santé et l'éducation -- accaparent une fois de plus la plus grande partie de l'augmentation des dépenses. N'oublions pas que, malgré la prévision répétée d'un équilibre budgétaire, le Vérificateur du Québec a clairement démontré l'existence d'un déficit accumulé de plus de cinq milliards de dollars que seule la comptabilité créatrice du ministère des Finances permet de camoufler au fil des ans.
Cela dit, comme les budgets précédents, celui-ci contient quelques mesures peu spectaculaires et peu coûteuses qui sont tout de même intéressantes. On pense, par exemple, à l'augmentation des crédits d'impôt pour les aînés et les aidants naturels, à la hausse du remboursement de TVQ à l'achat d'une voiture hybride, à la création d'un nouveau crédit pour les familles qui participent au Régime d'épargne-études fédéral ou encore à la contribution au déficit du métro de Montréal, qui permettra de limiter les hausses de tarifs pour les usagers. Mais même en additionnant toutes les mesures fiscales lancées depuis 2003, nous sommes bien loin des cinq milliards de baisses d'impôt promises lors de la dernière campagne électorale!
En revanche, on ne retrouve à peu près rien pour soutenir le secteur manufacturier, aux prises avec une grave crise causée par la concurrence étrangère et la valeur du dollar canadien.
Campagne électorale oblige, Québec s'intéresse plus que jamais aux régions... et même à Montréal. Il y a deux semaines, le maire Gérald Tremblay avait demandé qu'on accorde de nouveaux pouvoirs de taxation à la métropole. Le gouvernement Charest ne donne pas suite à cette requête mais, comme prix de consolation, la Ville de Montréal recevra un petit 17 millions à gérer elle-même à des fins de développement. Même modeste, ce geste constitue une sorte de reconnaissance du rôle de ville-région joué par la métropole. Quant aux régions, elles recevront aussi une petite part du gâteau avec l'injection de 121 millions en 2007-08, tant pour les mines et la forêt que pour l'investissement en entreprises.
Voilà aussi des choix corrects, certes, mais qui ne sont que des miettes à l'échelle des 60 milliards de dollars de dépenses annuelles, dont plus de sept milliards en intérêts sur une dette qui continue de croître malgré l'équilibre comptable. Avec une telle obligation héritée du passé et des revenus qui n'augmentent toujours pas au rythme des dépenses essentielles au bon fonctionnement des services publics, le Québec a besoin plus que jamais de l'argent des transferts du gouvernement fédéral.
En accédant au pouvoir, en 2003, le gouvernement Charest avait tenté d'imposer des réformes teintées de conservatisme, mais il a vite compris qu'il n'avait pas été élu pour négocier un tel virage à droite. S'ensuivirent des mois d'inaction qui lui ont permis de reprendre un peu du poil de la bête. S'il est une chose qui ressort avec force de ce dernier budget Audet, c'est que M. Charest fait aujourd'hui le pari qu'il est préférable de terminer son mandat sans faire de vagues. Compte tenu de l'impopularité de son gouvernement, n'est-ce pas risqué de miser ainsi sur la continuité?
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j-rsansfacon@ledevoir.com
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