Il aura fallu la manifestation « monstre » de mardi dernier - aux dires mêmes de La Presse qui a pourtant l’habitude de minimiser la portée de ce genre d’événement - et le déclenchement de l’opération casseroles pour que nos médias traditionnels se réveillent enfin à la réalité du Québec, un Québec très différent de ce qu’ils souhaitaient (pour certains) ou pensaient (pour d’autres) qu’il était.

À force de triturer et malaxer les données de sondages pour leur donner l’apparence qui leur convenait, ils avaient fini par confondre l’image qu’ils avaient façonnée de la réalité avec la réalité elle-même. Le réveil est donc brutal, et depuis mercredi, nos médias et leurs plumes sont en mode rattrapage.
Pourtant, ce ne sont pas les signes avant-coureurs qui ont manqué. Le degré d’insatisfaction à l’endroit du gouvernement Charest demeure anormalement élevé depuis maintenant plus de deux ans, et les motifs d’insatisfaction des Québécois sont nombreux et ne cessent d’augmenter.
À ce sujet, je vous invite fortement à prendre connaissance de la liste extrêmement bien documentée préparée par « Geneviève l’obstineuse » intitulée
Il y a déjà plus de deux ans, commentant la manière dont les Néo-Bruswickois étaient parvenus à empêcher la conclusion de la transaction qui aurait fait passer Énergie NB sous le contrôle d’Hydro-Québec, j’avais fait le parallèle suivant avec la situation au Québec :

Je le dis à la fois facétieusement et sérieusement, l’indignation et son corollaire nécessaire, la mobilisation, sont des muscles qui s’exercent ! Au Québec, ces muscles se sont singulièrement atrophiés au cours des dernières années.

La mode étant aux casseroles ces jours-ci, je préciserai que les derniers événements nous montrent que le muscle de la mobilisation n’a pas besoin de s’exercer, il se gonfle sous l’effet de la pression de l’indignation accumulée sous le couvercle de la marmite de l’opinion publique.
Ce qui devrait surprendre n’est donc pas tant que le couvercle ait fini par sauter, mais qu’il ait pris autant de temps à le faire. Si la grande patience des Québécois et leur hésitation à remettre en question l’ordre établi y sont certainement pour quelque chose, il faut aussi prendre en compte tous les efforts de conditionnement dont ils ont été les cibles depuis le référendum de 1995 pour leur enlever à jamais l’envie de s’émanciper.
Ces efforts se sont déployés sur deux axes : l’unité canadienne, et le modèle de société, les deux étant censés se renforcer mutuellement.
Rétrospectivement, il est très facile de voir comment cette stratégie aurait pu réussir si ce n’avait été de la crise financière mondiale de 2008. C’est en effet celle-ci qui allait modifier complètement la donne, comme j’ai commencé à le signaler dès le début de 2010 dans quelques articles comme « Attention M. Charest, la Reine est toute nue ! » , « Terminus : Tout l’monde descend ! » , ou « Jamais la conjoncture ne sera meilleure ».
J’ai la satisfaction de pouvoir vous dire aujourd’hui que la suite des événements allait me donner entièrement raison. Aujourd’hui, l’unité canadienne n’a jamais été si chambranlante pour toutes les raisons que j’avais alors identifiées et quelques-unes qui sont venues se rajouter. Le Devoir titre ce jour même « Ras-le-bol des idées néolibérales » , et le fleur-de-lysé effectue dans les manifestations un retour en force dont le sens n’échappe à personne.
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Le Québec a repris sa marche vers l’indépendance.
Et Jean Charest, mis en poste par « l’establishment » qui voyait en lui un nouveau Capitaine Canada, a tant perdu de crédibilité qu’il ne constitue plus un rempart efficace contre cette perspective.
C’est tout le dispositif qui s’écroule, au grand désarroi des instigateurs de cette stratégie, et c’est dans cette perspective qu’il faut envisager la suite des choses.
La situation est complexe car les fédéralistes québécois sont ceux qui profitent du système, et les circonstances les obligent maintenant simultanément à défendre un fédéralisme de plus en plus indéfendable, et à conserver le pouvoir politique qui est à la source de leur enrichissement des dernières années, et des profits encore plus énormes qu’ils comptaient faire dans l’avenir.
Qui plus est, il n’y a à l’heure actuelle personne pour remplacer Charest dont le discrédit est si grand qu’il va entraîner le PLQ dans sa chute. Un PLQ qui risque bien de connaître le sort du PLC et être incapable de s’en relever.
Si Jean Charest conserve encore le pouvoir contre vents et marées, c’est justement qu’il n’y a aucune relève au PLQ. Si certains ministres actuels seraient à la rigueur en mesure d’assurer l’intérim, aucun d’entre eux n’a l’image ou l’envergure pour briguer sa succession.
Donc non seulement le fédéralisme a-t-il du plomb dans l’aile, mais c’est également le cas du parti qui s’est toujours identifié à cette option. Si j’étais fédéraliste aujourd’hui, je serais très inquiet.
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Dans de telles conditions, la seule raison pour laquelle Jean Charest demeure encore en poste, c’est pour permettre de ficeler un certain nombre de dossiers au bénéfice de certains intérêts. Et c’est là que le retour de Dan Gagnier au poste de directeur du cabinet du premier ministre prend tout son sens.

En effet, Dan Gagnier ayant été associé de près à toutes les décisions (sauf les plus récentes) qui ont fait que Jean Charest se trouve aujourd’hui totalement discrédité et même haï s’il faut en croire certains chroniqueurs comme Denise Bombardier , on ne peut un seul instant penser qu’il puisse contribuer de façon positive à la solution de problèmes désormais insurmontables. Il est donc là pour d’autres raisons.
Les liens de Dan Gagnier avec les intérêts pétroliers et gaziers sont bien connus. Jusqu’à ces jours derniers, il était membre du comité consultatif de Talisman Energy, l’entreprise qui paie également les honoraires de Lucien Bouchard à la présidence de l’Association pétrolière et gazière du Québec, et qui joue un rôle central dans la stratégie pétrolière et gazière de l’Empire Desmarais .
Vous pouvez donc être assurés que ces intérêts ne sont pas étrangers au retour de Dan Gagnier au cabinet de Jean Charest et qu’il y consacrera une bonne part de son temps, notamment pour attacher les dernières ficelles de dossiers déjà avancés, et pour faire le ménage d’autres qui pourraient éventuellement se révéler compromettants.
Lorsque ce travail sera fait, Charest partira.

À moins que... l’Opposition officielle ne joue son rôle, et, s’appuyant sur l’illégitimité désormais acquise et constatée du régime, ne lance un avertissement public à toutes les parties faisant affaires avec le Gouvernement du Québec que toutes les ententes conclues d’ici aux prochaines élections générales feront systématiquement l’objet d’une vérification de conformité aux intérêts supérieurs du Québec et au bien commun advenant son élection, et que toute entente ne répondant pas à ces critères sera annulée sans compensation.
Avec une telle déclaration, les parties faisant affaires avec le gouvernement Charest comprendraient qu’elles n’auraient plus le moindre intérêt à son maintien en poste, ce qui pourrait accélérer son départ.
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http://www.vigile.net/Vers-une-reprise-de-la-lutte-des
_ http://www.vigile.net/Zero-sur-toute-la-ligne
_ http://www.vigile.net/L-autre-facon-de-proceder-en-toute
_ http://www.vigile.net/Le-pouvoir-de-la-rue

CHRISTIAN FEUILLETTE
Éditeur
Je suis libéral, car ce terme désigne de par son étymologie deux valeurs fondamentales : la défense des libertés et la générosité sociale.
Je suis libéral, dans la tradition de Wilfrid Laurier, préférant l'unité à la division, le dialogue à l'affrontement, l'ouverture à la haine.
Je suis libéral, dans la lignée de ceux qui ont combattu la Grande Noirceur et son «chef» Duplessis, grand amateur de loi matraque.
Je suis libéral, me reconnaissant dans «l'équipe du tonnerre» des bâtisseurs et des visionnaires de la Révolution tranquille, pas dans le ramassis actuel de notaires de village, boutiquiers et autres petits magouilleurs acoquinés à la mafia.
Je suis libéral, du parti de la générosité, du partage des richesses, de la péréquation et de la solidarité, du parti dont le programme a déjà inclus la gratuité totale de l'éducation, université comprise.
Je suis libéral, du parti qui nous a donné la gratuité universelle des soins de santé, reniée dans les faits par «l'injuste part» de la taxe santé du ministre Bachand, qui impose un tribut de 200$ annuellement à chaque citoyen, pauvre ou non.
Je suis libéral, car je suis fier de nos Chartes des droits et libertés, initiées par un grand premier ministre canadien dont le mot d'ordre était la «société juste» - Charte qui prévaut sur toute loi d'exception que tout gouvernement serait tenté d'imposer arbitrairement pour brimer nos libertés.
M. Charest, vous n'êtes pas un libéral et ne l'avez jamais été. Vous avez usurpé ce titre par soif du pouvoir. La crise actuelle a fait tomber les masques. Vous et votre cohorte de gérontocrates déconnectés êtes désormais complètement discrédités. Un grand ménage doit se faire dans ce parti afin qu'il reprenne contact avec ses vraies sources.
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L'auteur est un ex-candidat du Parti libéral dans le comté de Jeanne-Le Ber aux élections fédérales de 2008.