Beaucoup d'entreprises d'économie sociale sont encore méconnues de la population québécoise. En organisant les Foires de l'économie sociale et du commerce équitable dans cinq villes du Québec, le Chantier souhaite permettre au public d'entrer en contact avec une foule de ces entreprises axées sur la rentabilité sociale plutôt que seulement économique.
L'économie sociale joue un rôle important dans le développement du Québec depuis une centaine d'années avec, à l'époque, les Caisses Desjardins et les coopératives agricoles. Maintenant, les entreprises d'économie sociale ont investi pratiquement toutes les sphères d'activité et le développement se poursuit. Pour souligner son 10e anniversaire, le Chantier d'économie sociale organise cet automne la Saison de l'économie sociale et solidaire, avec des foires et différentes activités destinées au grand public qui se tiendront dans quelques villes de la province. Le Sommet de l'économie sociale et solidaire viendra clôturer les célébrations, histoire de faire le bilan des avancées et de cibler des points à améliorer dans l'avenir.
«Lorsque je faisais mes chroniques à la radio et que je parlais d'entreprises d'économie sociale, je recevais beaucoup de courriels d'auditeurs qui voulaient en savoir plus. Beaucoup de ces entreprises sont connues à l'intérieur d'un réseau particulier, mais elles ne le sont pas à l'échelle du grand public puisqu'elles n'ont pas les moyens de se payer beaucoup de publicité. Les foires permettront aux gens de mieux connaître ces belles initiatives», explique Laure Waridel, présidente et cofondatrice d'Équiterre, organisme très impliqué dans l'organisation des foires.
Un sommet, cinq porte-parole
Le Sommet de l'économie sociale et solidaire se tiendra les 16 et 17 novembre, à Montréal. Ce sera l'occasion pour les différents acteurs du domaine de l'économie sociale de faire le bilan de la dernière décennie et de se mobiliser autour de projets communs. «Pour s'y préparer, nous avons formé des comités pour travailler sur différentes thématiques, soit entreprendre solidairement, développer nos territoires solidairement, travailler solidairement, investir solidairement, consommer de façon socialement responsable et mondialiser solidairement», explique la présidente-directrice générale du Chantier de l'économie sociale et porte-parole du sommet,
Nancy Neamtan.
En plus de Mme Neantan, quatre porte-parole de générations et d'horizons différents ont été choisis pour le sommet. Par leur vision et leur expérience différentes, chacun vient enrichir à sa façon l'événement.
Pour Claude Béland, président du Mouvement Desjardins de 1987 à 2000, l'économie sociale et solidaire a joué un rôle capital dans la province. «Si je regarde l'évolution du Québec, pour moi, le fil conducteur dans le miracle de la survivance de notre peuple francophone en Amérique du Nord est notre grande capacité de solidarité. Petit à petit, nous avons fait l'exercice de la démocratie qui, en fait, témoigne de la volonté que la majorité cesse d'être dominée par une minorité. Et c'est ça l'économie sociale. C'est la capacité d'un peuple de travailler ensemble pour s'en sortir», explique-t-il.
Combattre l'inégalité, respecter l'environnement
Selon Laure Waridel, également porte-parole du Sommet, l'économie sociale et solidaire est un moyen que les citoyens ont pour contribuer à développer une économie qui soit au service des gens plutôt qu'une économie qui asservit. «En ce moment, le système économique dominant augmente les inégalités et surexploite l'environnement. L'économie sociale et solidaire est un moyen de replacer l'humain et l'environnement au coeur des préoccupations», affirme-t-elle.
La Caisse d'économie solidaire Desjardins est l'institution financière qui soutient les entreprises d'économie sociale en leur offrant différents outils de financement. Son coordonnateur général, Clément Guimond, est aussi porte-parole du sommet. «Beaucoup de gens dans le milieu des finances nous disent que nous prêtons de l'argent à ceux à qui personne ne veut prêter. Ils croient que nos pertes sont épouvantables, mais ils seraient surpris. En général, les entreprises collectives sont beaucoup plus durables que les entreprises privées car leur motivation centrale n'est pas l'appât du gain. Dans le privé, si le gain n'y est plus, on ferme et on recommence sous un autre nom. On ne voit pas ça dans l'entreprise collective», explique M. Guimond.
Enfin, la jeune écocommunicatrice K, qui tient la chronique écolo à l'émission Têtes@Kat de Radio-Canada et fut l'artisane responsable de la coordination lors de l'aventure télé Les Artisans du rebut global de Télé-Québec en 2005, est également porte-parole du sommet. «Pour moi, l'économie sociale, ça va de soi. Ma compagnie est incorporée, mais je fais quand même de l'économie sociale. La planète est actuellement en situation d'urgence et nous sommes à l'ère de la responsabilisation des entreprises. Il ne faut pas oublier qu'il n'y a pas de "business" à faire sur une planète morte», soutient la jeune femme de 30 ans.
Une voie d'avenir
Le sommet permettra aux différents acteurs de l'économie sociale de se doter d'une orientation stratégique pour prendre davantage de place dans la structure économique du Québec dans l'avenir. «Après 20 ans de néolibéralisme, nous nous retrouvons devant l'échec de l'utopie conservatrice. Et juste avant, nous avons eu l'échec du socialisme. Maintenant plus que jamais, la porte est ouverte pour remettre à l'ordre du jour un projet progressiste, un nouvel imaginaire économique qui permettra aux citoyens de mieux vivre ensemble», soutient M. Guimond.
M. Béland croit, lui aussi, que les promesses de la mondialisation ne se réalisent pas. «Le partage des richesses est pire que jamais et si on regarde vers l'Amérique du Sud, on voit que les gens s'organisent autrement. Ils n'acceptent plus de se faire dominer. On sent maintenant cette tendance s'étendre dans le monde et le Québec devrait en profiter», affirme-t-il.
Le commerce équitable et l'économie sociale sont même des moyens, selon Laure Waridel, de lutter contre le terrorisme. «En ce moment, le système économique dominant contribue à augmenter les inégalités et, par le fait même, la frustration. Si les gouvernements investissaient davantage dans le développement de l'économie sociale et solidaire plutôt que dans l'industrie militaire, il y aurait beaucoup moins de problèmes dans le monde. Ainsi, l'économie sociale n'est plus seulement de belles petites initiatives, mais une réponse à des problématiques globales», conclut-elle.
Pour s'informer: http://www.chantier.qc.ca
Collaboratrice du Devoir
Le Québec a rendez-vous avec la solidarité
« Les entreprises collectives sont beaucoup plus durables que les entreprises privées car leur motivation centrale n'est pas l'appât du gain »
Laissez un commentaire Votre adresse courriel ne sera pas publiée.
Veuillez vous connecter afin de laisser un commentaire.
Aucun commentaire trouvé