Si la tendance se maintient, Boris Johnson a de bonnes chances de devenir le prochain premier ministre de la Grande-Bretagne.
Politicien atypique, gaffeur récidiviste qui passe pour ultrasympathique, issu d’un milieu très privilégié, mais souvent en révolte contre les « élites », Boris Johnson est surtout connu, aujourd’hui, pour son engagement résolu en faveur du Brexit. Il est attaché à la souveraineté britannique, qu’il veut restaurer, pour redonner à son pays une pleine maîtrise de ses destinées.
Pour cela, et bien d’autres raisons, les milieux bien-pensants cherchent à le faire passer pour le nouveau Donald Trump — il n’y a pas aujourd’hui de pire reproche à faire à quelqu’un. Radio-Canada, avec sa légendaire neutralité et son sens admirable de l’objectivité, demandait ainsi récemment si nous devions avoir « peur » de lui.
Objectivité
Je ne me souviens pas que la Société d’État nous aurait mis en garde contre Justin Trudeau, Hillary Clinton ou Angela Merkel, en nous demandant si nous devions avoir peur d’eux. À voir leur bilan, toutefois, nous aurions dû nous méfier !
On l’aura compris, contre Boris Johnson, tout est permis. Et on l’a encore constaté il y a quelques jours. Petit rappel des faits pour ceux qui auraient manqué l’histoire. Dans la presse anglaise comme dans la presse internationale, on apprenait que sa vie privée risquait de compromettre son élection. Pourquoi ? Parce que Boris Johnson s’est engueulé avec sa femme et qu’un voisin a appelé la police, en plus d’enregistrer la séance.
De quoi s’agit-il, exactement ?
D’une engueulade violente ? Non. Une engueulade avec des coups ? Non plus. Une engueulade comme il y en a chaque jour, même dans les couples les plus unis. Une engueulade qui fait partie de la vie. Il n’y avait pas de quoi faire une nouvelle politique. La police elle-même n’a absolument rien noté une fois sur place.
Mais puisque cela pouvait contribuer à lui coller la réputation d’un homme violent, la nouvelle a circulé, sans qu’on se demande si on ne violait tout simplement pas sa vie privée. Peut-on aujourd’hui se disputer en paix ?
On verra dans cet épisode un pas de plus vers une société de surveillance absolue, où chacun se transforme en policier espionnant son voisin. La vie privée semble de plus en plus appartenir au monde d’hier.
Retour à Johnson. Il ne s’agit pas de l’idéaliser, mais de constater que dès qu’une figure politique émerge contre l’idéologie dominante, les médias se donnent la permission de le présenter comme un diable ou un monstre.
Surveillance
À tout le moins, ils se croient appelés à le présenter comme un personnage inquiétant qui serait d’une manière ou d’une autre un danger pour la société et l’intérêt public. Si vous n’êtes pas dans le camp des progressistes, c’est-à-dire, dans le camp des gentils, on se permettra tout contre vous.
Quoi qu’on en pense, ce biais idéologique trop souvent présent dans les médias contribue à affaiblir la démocratie.