La pression en vue d'une alliance entre les forces souverainistes va grandissant

Tribune libre

Par André Parizeau (*)
Un large front commun de personnalités publiques et d'artistes se sont mis en ensemble hier pour lancer un appel aux trois principales formations politiques que sont le PQ, Québec solidaire, et Option Nationale, de manière à ce qu'ils amorcent le plus rapidemment possible des négociations en vue de former une alliance électorale et ainsi augmenter les chances de se défaire des libéraux et de leur influence, lors des prochaines élections.
Plus de 2 400 personnes, dont le scénariste Dominic Champagne, le cinéaste Hugo Latulippe, et l'humoriste François Parenteau, ont signé cet appel.
Jusqu'à présent, seul le chef d'Option Nationale, Jean-Martin Aussant a indiqué être prêt à une telle option. Québec solidaire dit ne pas vouloir fermer la porte, mais est en même temps pris avec une décision de congrès qui s'objecte à une telle avenue. Pour pouvoir aboutir à une telle alliance, il faudrait, au préalable, que Québec solidaire puisse convoquer ses instances afin de reconsidérer un tel vote. Le probleme le plus important demeure en même temps le refus de la chef du PQ, Pauline Marois, de vouloir même considérer cette avenue (alors qu'elle avait pourtant manifesté une certaine ouverture l'automne passé).
Les signataires de l'appel suggèrent que le président de la centrale syndicale CSQ, Réjean parent, qui s'était déjà, il y a plusieurs mois, positionné lui-même en faveur d'une telle alliance, intervienne auprès de ces trois formations politiques pour essayer de faciliter un déblocage.
Cet appel rejoint de nombreuses autres prise de positions, y compris de notre part, au fil de la dernière année, insistant sur l'importance d'une telle alliance.
Au PCQ, nous appuyons bien évidemment, ainsi que de manière très claire, ce nouvel appel.
Un grand nombre de gens s'inquiètent du fait que la dispersion des votes, entre ces trois formations politiques, viennent faciliter une éventuelle réélection de Jean Charest et de son parti, ou encore, qu'elle permette à ceux-ci de continuer à détenir la balance du pouvoir, advenant que le PQ prenne le pouvoir, mais ne puisse acquérir une majorité à l'Assemblée nationale et que le total des députés élus sous la bannière du PQ, plus ceux et celles qui pouraient aussi être élus sous la bannière de Québec solidaire, ou d'Option nationale, ne puissent non plus permettre d'avoir une claire majorité.
Si l'un ou l'autre de ces scénarios devait effectivement se produire, et compte tenu de l'état actuel de crise sociale que nous vivons et qui continuerait alors à se perpétuer, cela pourait devenir, à la longue, très décourageant, avec toutes les conséquences que cela pourraient avoir, non seulement pour les étudiants qui forment toujours le noyau le plus actif de l'actuel mouvement de contestation sociale, mais aussi pour l'ensemble des autres couches de la population, tout aussi tannées des politiques des libéraux.
D'où l'importance, pour un nombre grandissant de gens, d'aller au delà des intérêts partisans des uns ou des autres, et de plutôt penser en termes du bien commun du plus grand nombre.
Si nous pouvions avoir un système de représentation proportionnelle, pour le choix des députés à l'Assemblée nationale, la situation serait sans doute moins préoccupante. Mais comme un tel système n'existe toujours pas, c'est tout l'avenir du Québec pour les prochaines années qui est présentement en jeu.
L'appel de ces plus de 2400 personnes survient quelques jours seulement après la tenue des élections partielles dans Argenteuil et Lafontaine, qui, au delà de l'exubérance manifestée par les péquistes, dès le lendemain de l'annonce des résultats, des suites de leur victoire dans Argenteuil, en a laissé plusieurs assez perplexe. Même si le PQ a finalement pu se faufiler, en définitive, tout en avant au niveau des votes, c'est loin d'être sûr que cela pourra se répéter partout ailleurs, dans une majorité des cas, à travers tout le Québec, à l'occasion d'une générale.
Il faut souligner un fait assez important et pourtant largement éclispé dans bon nombre de reportages portant sur ces partielles: une majorité de gens, y compris dans Argenteuil, ont soient voté libéral, ou pour la CAQ. Cela peut paraître assez contradictoire, quand on pense à tous les scandales qui entourent ce gouvernement, ainsi qu'au fait qu'une très large majorité de la population dit désapprouver les politiques de ce gouvernement. Cela demeure néanmoins un fait objectif qui ne saurait être sous-estimé.
En surplus, et considérant le fait que le camp des souverainistes demeurent toujours aussi divisés, et que dans la prochaine générale, notamment dans la grande région de Montréal, la division du vote, du côté des souverainistes, pourraient être encore plus marquée, si rien n'est fait en matière d'une alliance, bien malin pourrait être celui ou celle qui pourrait garantir comment tout cela pourrait finir ... et cela pourrait conséquemment aussi bien très mal finir. Est-ce vraiment cela que nous voulons ?
Récemment, un de nos camarades, nous faisait part, à la direction du PCQ, d'une discussion à laquelle il venait de participer, autour d'une bière, après une réunion de militants et de militantes de Québec solidaire, et où chacun et chacune y avait été de ses commentaires en lien justement avec toute cette question des alliances.
De manière plutôt encourageante, ce camarade nous rapportait le fait qu'une des participantes à cette discussion avait dit -- à noter, cette personne est elle-même une de celles qui furent choisies comme devant être porte couleur de Québec solidaire lors des prochaines élections -- être, dès maintenant, prête à appuyer un éventuel désistement de Québec solidaire, dans un nombre significatif de comtés, si cela pouvait garantir une défaite claire et nette des libéraux lors de ces prochaines élections.
Cette simple annecdote, qu'on aurait difficilement pu imaginer il y a quelques mois à peine, y compris et notamment au sein de Québec solidaire, démontre à quel point les choses continuent d'évoluer dans le bon sens, et qu'il est important, où que nous soyons, et indépendamment du fait qu'on soit plus pro-PQ, plus pro-Québec solidaire, ou plus pro-Option Nationale, de continuer à faire pression sur nos instances respectives pour qu'on puisse effectivement aboutir à une telle alliance. L'annonce de ce nouvel appel, de la part d'autant d'artistes et de personnalités publiques, nous le prouve également.
Cette question des alliances est l'un des deux principaux pivots qui pourraient nous permettre d'effectivement se débarraser de ce régime corrompu qui a déjà assez fait de mal à tout le Québec. L'autre aspect réside dans l'importance qu'il y aurait à ce que les trois grandes centrales syndicales s'impliquent beaucoup plus directement dans l'actuel mouvement de contestation social, via l'adoption par leurs propres instances d'un mandat de grève générale de 24 heures à exercer au moment jugé le plus opportun, et advenant que le gouvernement Charest continuerait dans sa ligne de confrontation.
Si tout le monde, chacun dans leurs milieux respectifs, peut pousser ensemble dans la même direction, et qu'on puisse ainsi, et ultimement fermer la porte à toutes les options d'évitement que ce même gouvernement tente encore de se garder, alors les choses pourraient commencer à regarder pas mal mieux. L'actuel mouvement de contestation sociale aurait aussi plus de chances de finir sur une très belle note.
(*) André Parizeau est le chef du Parti Communiste du Québec (PCQ) ([www.pcq.qc.ca->www.pcq.qc.ca])

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Chef du Parti communiste du Québec (PCQ), membre fondateur de Québec solidaire, membre du Bloc québécois, et membre de la Société Saint-Jean Baptiste de Montréal (SSJBM)





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6 commentaires

  • Archives de Vigile Répondre

    15 juin 2012

    En passant, et au moment d'écrire ces lignes, le nombre de signatures sur l'appel en faveur d'une alliance avait déjà passé, en l'espace de quelques heures, de 2400 ... à plus de 6000 !

  • Jean-Claude Pomerleau Répondre

    15 juin 2012

    M André Parizeau
    J'ai beaucoup de respect pour vous qui êtes un véritable patriote. Il aurait fallu que je précise que par l'ultra gauche je désigne le trotskisme :
    http://www.toupie.org/Dictionnaire/Trotskisme.htm
    Pour qui l"État national n'a que peu d'intérêt. Des alliés objectifs du mondialisme. Ils rejoigent dans cette lecture platonicienne, David Rockefeller :
    "(…). The supranational sovereignty of an intellectual elite and world bankers is surely preferable to the national auto-determination practiced in the past centuries." (Bidelberg à Baden-Baden (Allemagne) en Juin 1991 )

    JCPomerleau

  • Archives de Vigile Répondre

    15 juin 2012

    L'élection dans Argenteuil vient de mettre de l'eau dans le gaz.
    QS: 2,74%
    ON: 238 votes au final. Vers 21h30, leur manif était encore légale: 48 votes.
    Et ce n'était qu'une partielle, alors qu'on pourrait s'attendre à ce qu'on vote encore plus selon sa conviction que stratégiquement.
    Reporté sur la carte du Québec, on pourrait avancer que QS au mieux, ferait la lutte au PQ dans 3 ou 4 comtés de l'est de Montréal. Première force, deuxième force. Que le meilleur gagne.
    Ailleurs, pas l'ombre d'un gros troisième favorisant le passage d'un libéral ou d'un caquiste.
    Il faut se mettre à la place du PQ et de ses partisans qui sont à se demander s'il ne s'agirait pas plus d'un boulet que d'une bonne affaire. Il n'est pas question ici d'être fin ou pas fin. Les chiffres et les faits.
    Mon impression est qu'on sera dans le même autobus que lors du référendum.

  • Archives de Vigile Répondre

    15 juin 2012

    Je conviendrai avec un des derniers intervenants qu'il y au sein de Québec solidaire (tout comme au sein du PQ du reste) des gens qui ne veulent toujours rien savoir d'une alliance.
    Je pourrais paraphraser Daniel Breton, qui est lui-même candidat du PQ, que "la mauvaise foi est des deux bords". Je pourrais aussi ajouter qu'au lieu de vouloir blâmer dans son entiereté un parti, ou l'autre (et par ricochet tous ses militants et ses militantes) qu'il serait plus juste (et aussi plus utile) de mieux cibler ses critiques.
    Objectivement, j'oserais aussi dire que c'est bien plus ceux et celles qui, indépendamment de leurs affiliations politiques, s'objectent toujours à une alliance, qui font le jeu des libéraux, car, et en définitive, c'est d'abord notre désunion qui nous affaiblira.
    Un dernier mot: on pourra répéter à l'infini qu'il existerait au sein de Québec solidaire des gens qui ne seraient pas vraiment convaincu de la cause souverainiste, sauf que j'aimerai du même coup rappeler à ceux là-mêmes qui disent cela, qu'il y a au moins 3 des anciens chefs du PQ qui, de leur bord, ont depuis un certain temps déjà retourné leur veste. C'est quand même pas rien. Je pense ici de Pierre Marc Johnson (l'aurait-on déjà oublié), Lucien Bouchard, sans oublier aussi André Boisclair.
    À cette liste, on pourrait aussi ajouter les noms des non moins célèbres Francois Legault, Joseph Facal, et j'en passe. Alors, faudrait-il aussi en conclure que le PQ n'est pas plus souverainiste. Tant qu'à y être, on pourrait aussi tous et toutes se dire qu'il n'y a plus rien ... Non, mais... Tout cela ne mène finalement à pas grand chose. Alors pourquoi ne pas s'en tenir à l'essentiel ? Le plus important. Je crois sincèrement que cela serait pas mal plus productif. Et le plus important, c'est l'unité. Aucun peuple ne deviendra indépendant s'il n'est pas au départ prêt à faire l'unité.

  • Jean-Claude Pomerleau Répondre

    15 juin 2012

    Voter stratégique ou idiot utile ?
    Il n'y aura pas de pacte. Il faut lire la lettre de Mme Françoise David (Le Devoir, hier) pour le comprendre : C'est la base qui décide en définitive. Or il y a une faction ultra gauche anti- nationaliste (du racisme de droite pour eux) qui exerce un droit de veto de facto bloquant toute entente possible chez QS.
    Pour QS, l'axe gauche droite prime sur l'axe souveraineté fédéralisme ( F David).
    Faut arrêter de dormir pour mieux rêver.
    Dans la vrai vie, voter QS c'est devenir un allié objectif des libéraux ; bref c'est voter idiot utile.
    Compte tenue de la gravité de la situation, de l'urgence de prendre le contrôle de notre État des prédateurs qui le squattent, il faut revenir à nos sens et sur le seul choix véritable qui s'offre pour y parvenir : Le Parti Québécois.
    La souveraineté, il ne s'agit plus d'en parler il s'agit de la faire. Et ça commence dès la prise du pouvoir. Voic le déclencheur :
    http://pq.org/actualite/videos/maitres_chez_nous_phase_2_le_projet_dindependance_energetique_du_parti_quebecois
    JCPomerleau
    P.s Tout ce que peux faire ce groupe est de suggérer un vote stratégique dans certains comtés qui sera sans incidences réel sur le résultat du vote.

  • Stéphane Sauvé Répondre

    15 juin 2012

    Certains diront, "ca part mal quand votre texte se termine par Parti communiste du Québec. "
    J'entends déjà Charest crier sur tous les toits en s'esclaffant, "Voilà que Marois s'unit à une kyrielle de partis dont le parti communiste".
    Bon, vous me direz, cà c'est leur problème, et dans une grande mesure vous auriez raison de me répondre ainsi. Mais voilà, les polarisations s'accentuent et Charest veut faire des gains sur cette dynamique (qu'il encourage !)
    Je souhaite aussi cette union des forces souverainistes mais la lecture du dernier article de Nic Payne http://www.vigile.net/Le-fantasme-du-front-commun m'a convaincu que le moins pire des scénarios était d'en arriver à un gouvernement minoritaire libéral (ou Péquiste - mais là c'est loin d'être sûr que mme. Marois ne s'accroche au peu qui lui reste). Nic Payne présente un argumentaire très solide pour convaincre les plus convaincus.