Monsieur,
Dans un article du journal que j’ai lu avec grande attention, une journaliste relate quelques-uns de vos récents propos. Vous y dites que «...la côte nord de la Colombie Britannique n'est pas pour les superpétroliers...», qu’il serait «absolument fou de permettre à des superpétroliers transportant du bitume brut d'emprunter cet étroit passage » et que la route prévue pour exporter du pétrole vers l'Asie «n'a aucun sens» [1].
Je vous invite ici à utiliser exactement le même argumentaire pour militer contre le pipeline de TransCanada Est et son port pétrolier de Cacouna situé dans l’estuaire du fleuve St-Laurent, juste en face du parc marin du Saguenay.
Comme l'énonce le proverbe anglais «What is sauce for the goose, is sauce for the gander»; ce qui est mauvais pour la Colombie Britannique est également mauvais pour le Québec! C'est seulement en respectant cette logique que votre parti pourra tirer son épingle du jeu dans notre province lors de l'échéance électorale de 2015.
En effet, l'histoire et la logique du jeu politique n'ont jamais été favorables à votre parti. Avant le 2 mai 2011, seuls Phil Edmunston dans une élection partielle vers 1988 et vous-même avez réussi à vous faire élire sous la bannière du NPD. Il y eut bien sûr la vague orange québécoise, mais si vous comptez former le prochain gouvernement, vous ne devez pas prendre le vote des Québécois pour acquis et je vous explique pourquoi.
Avant 2011, le jeu politique se faisait strictement entre la machine rouge des Libéraux (fédéraux et provinciaux) et la machine bleue. Cependant, depuis la pendaison de Riel en 1885 et la crise de la conscription de 1917, les conservateurs fédéraux ont perdu le contrôle de la machine bleue au Québec.
En 1958, Duplessis a mis la machine bleue au service de M. Diefenbaker. Résultat : 50 députés conservateurs. En 1984, Mulroney a reçu l'appui de la machine bleue pour le «beau risque». Résultat, une défaite cuisante des libéraux. Lors d'un congrès en 1991, le Parti Québécois a décidé de mettre la machine bleue au service du Bloc Québécois. Dois-je vous rappeler le résultat de l'élection de 1993 ?... 54 députés québécois formèrent alors l'opposition officielle.
Tout comme en Colombie Britannique, le Québec n'a aucun intérêt pour un pipeline dans lequel les sales produits des sables bitumineux ne font que transiter vers d'autres rivages. Aucun avantage économique mais une menace pour les plans d'eau, des risques importants de déversements, des émissions importantes de gaz à effet de serre en amont et en aval du pipeline, des violations des droits des Premières nations – dois-je vous rappeler les positions du peuple Mi'kmaq ?- et j'en passe. Une multitude de risques pour quelques rares emplois et pratiquement aucun bénéfice économique : voilà le pacte.
Je reçois régulièrement des demandes de contributions de quatre partis politiques fédéraux dont le vôtre et, comme beaucoup de Québécois, mon appui sera fait en fonction des programmes des divers partis. Votre plateforme électorale devra tenir compte de ce que M. Robert Bourassa appelait «les intérêts supérieurs du Québec».
Si vous voulez renouveler l'exploit du NPD du 2 mai 2011, je vous invite donc à prendre fermement position contre le projet de TransCanada Est et à exiger que l'Office national de l'énergie tienne des audiences qui soient autre chose qu'un vulgaire «rubber stamp». Et pourquoi pas aussi la promesse formelle d’instituer des audiences environnementales fédérales dignes de ce nom ? Canada et environnement sont devenus au fil du temps des termes antinomiques et cela ne peut plaire aux électeurs québécois, qu’ils soient fédéralistes ou non. Après tout, le golfe St-Laurent est aussi important que la côte du Pacifique près de Kitimat.
Veuillez accepter, monsieur Mulcair, l'expression de mes sentiments les meilleurs.
Gérard Montpetit
La Présentation
c.c. madame Marie-Claude Morin, députée de Saint Hyacinthe-Bagot
madame Brigitte Sansoucy, vice-présidente, NPD Canada
les députés du caucus du NPD
1][http://www.lapresse.ca/actualites/politique/politique-canadienne/201408/19/01-4793004-la-cote-nord-de-la-c-b-nest-pas-pour-les-superpetroliers-estime-mulcair.php
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