Vous le connaissez sans doute, c’est cet ancien ministre du PQ. Celui avec la moustache. Celui qui écrit dans Le Quotidien de Chicoutimi. On l’a vu dernièrement aux Francs Tireurs et à Radio Canada. Le pauvre retraité ne va pas bien, il souffre. C’est du sérieux. Il doit s’ennuyer des congrès du PQ ou des murs bruns de l’Assemblée nationale. On ne sait pas trop. Chose certaine, il se sent persécuté, constamment. Il a peur, vraiment peur de tout et de n’importe quoi.
Il a peur des socialistes, il en voit vraiment n’importe où : chez les journalistes, les enseignants, les universitaires, les artistes, les dirigeants politiques. Pour lui, il le dit sans rire, Bill Clinton est de «gauche» (1)... Même son ancien parti, le PQ, serait «ensorcelé» - à cause des sorcières sans doute - par les idées socialistes.
Essentiellement, le parti serait contrôlé par un «véritable commando bien organisé d'experts propagandistes», le SPQ-Libre, et tout le mouvement souverainiste serait «largement contaminé la propagande socialo-communiste» (2). Et il fait une impénétrable fixation envers Lise Payette. Il parle d’elle dix millions de fois… Enfin, sur 90 articles il en parle au moins 12 fois… Il doit imaginer cette dangereuse communiste dans ses cauchemars. Dans une pièce sombre, avec Lénine et Françoise David, il la voit aiguiser sa faucille et préparer l’insurrection … Ce doit être un trouble post-traumatique ou quelque chose du genre.
Mais sa phobie du socialisme est encore plus profonde : selon lui, les médias – nous avons bien dit les médias - sont contrôlés par les forces indestructibles du gauchisme. Il répète sans cesse - mais vraiment sans cesse - qu’ils sont la courroie de transmission des «gaucho-écolo-pacifistes». Il les entend à la télé, à la radio, dans les journaux. Ils sont intraitables avec les dirigeants politiques de droite, mais offrent l’«immunité presque absolue» aux syndicalistes - que personne ne peut critiquer (3). Vraiment…
Monsieur Brassard a également peur des écologistes. Eux aussi sont n’importe où. L’ancien ministre doit s’ennuyer de l’odeur de purin de cochon émanant du ministère de l’Environnement du temps où il en était le chef ou quelque chose du genre. Quoiqu’il en soit, il voit ces puissants «idéologues de l'enfer climatique» partout. Avec l’aide de Greenpeace, des médias et de Roy Dupuis, ils propagent leur «pensée unique, dominante et quasiment totalitaire». C’est que, dans le petit monde de M. Brassard, il n’y a pas de lien entre le réchauffement de la planète et l’émission de gaz à effet de serre. C’est un complot, de la manipulation de l’opinion publique. D’ailleurs, la qualité de l'air et des eaux – il dit - ne cesse de s'améliorer (4).
À l’évidence, le monsieur a une peur terrible, voire terrifiante, des arabes, des musulmans et des islamistes…Les terroristes, comme il dit. On ne comprend pas toujours ses propos, ses plaintes ne sont pas toujours claires, mais il en a peur, c’est certain. C’est à n’en pas dormir la nuit. Il voit ces «légions fanatisées» qui ont «soif de sang» menacer notre civilisation sans que personne ne lève le petit doigt. Ces sont eux qui ont déclenché la Quatrième (!) Guerre mondiale. Ce sont eux qui «justifient» et «provoquent» la violence dans les banlieues parisiennes. Ce sont eux qui agressent Israël, cette petite et fragile démocratie. Ce sont même eux qui contrôlaient les manifestations contre la guerre au Liban à Montréal (5)... C’est tout dire.
Puisqu’il a peur des arabes, il a aussi peur des antisémites, cela va de soi. Eux sont vraiment, vraiment n’importe où. Vous connaissez la chanson, c’est un air populaire : ils sont à l’ONU, dans le monde arabe, dans les cours d’écoles… Contrairement au racisme, qui n’est qu’une «accusation fourre-tout quand on est en manque d'arguments rationnels», l’antisémitisme, lui, domine la terre entière. Israël, la pauvre, n’est pas aimée. Elle veut la paix, elle mise sur la «diplomatie» et la «négociation», elle fait des «concessions» et des efforts. Elle est une diplomatie «exemplaire», toute petite, toute fragile et sans défense. Toute seule face à ces arabes «hostiles», elle doit ériger des murs, faire la guerre (6). C’est normal : personne ne la soutient, personne ne veut la comprendre.
Quoi encore ? Ah oui, les gais. Ils doivent alimenter ses fantasmes conservateurs ou quelque chose du genre. Chose certaine, il en a peur, terriblement. Dans son monde, les gais forment une «véritable franc-maçonnerie puissante» qui ne tolère pas le débat et qui remet en question «la structure fondamentale de l'organisation sociale» : le mariage (7).
Ce n’est vraiment pas drôle. Sa vision de la société est totalement renversée. Heureusement, il n’est pas seul. De temps en temps, il fait une douce prière en pensant à ces hommes qui ont façonné notre grande et blanche civilisation : Henry Kissinger (ce «brillant stratège politique»), Ronald Reagan (ce «champion de la liberté dans le monde»), Jean-Paul II (8).…
Hier, il est allé au trentième anniversaire de l’élection du PQ. Trente ans, vous imaginez... C’était plaisant. Le gens l’ont applaudi chaudement, amoureusement (9). Il a revu de vieux copains. Lise Payette n’était pas là, ça l’a rendu heureux. Aujourd’hui, confortablement installé dans sa chaise berçante, il regarde son pays par la fenêtre. Le Saguenay, le Québec, l’Amérique … Il est heureux. La guerre continue. Des morts, des morts et encore des morts; pour la démocratie, pour la liberté, pour le marché…
Il finit de lire le dernier polar de Dantec, après, histoire de se sentir un peu délinquant, il ira faire un tour de 4X4 dans la neige (10). Ça l’amuse, vous n’avez pas idée…
Petit lexique pour mieux comprendre la maladie de la moustache
Jacques Brassard a tout un vocabulaire. Les mots, dans sa bouche, deviennent automatiquement bruns. Jugez en par vous-même à l’aide de ces quelques citations.
PROGRESSISME: «religion, dont l'hostilité à la civilisation industrielle et à la société de consommation en constitue la fibre, est très largement répandue dans les diverses composantes de la classe intellectuelle: journalistes, enseignants, universitaires, artistes, dirigeants politiques... » (9 août 2006)
GRÈVE : «antique stratégie syndicale dont l'objectif est de terrasser le Patron pour s'en glorifier par la suite» (20 décembre 2006).
GUERRE AU TERRORISME : «stratégie audacieuse […] qui consiste non seulement à viser l'éradication du nazisme islamiste, mais aussi, et en même temps, à soutenir l'élargissement de l'univers démocratique. (4 mai 2005).
GUERRE EN AFGANISTHAN : «non seulement un acte d'autodéfense, mais aussi de lutte contre l'obscurantisme, d'affirmation de nos valeurs d'égalité et de respect mutuel». (3 janvier 2007).
FORCES DE COALITION : «armée qui a libéré le peuple irakien d'une des pires dictatures de la planète». (23 février 2005)
OPPOSANTS À LA GUERRE : «coalition incorporant l'univers médiatique, les intellectuels et stratèges de salon, les partis politiques, les pacifistes anti-américains et toute la nébuleuse de gauche. Sans oublier les communautés musulmanes de toutes origines» (2 août 2006).
On les voit défiler dans nos villes avec des pancartes» (29 mars 2006).
HEZBOLLAH : le «véritable agresseur dans cette guerre» (2 août 2006).
QUÉBEC : peuple «fortement imprégné par cette hostilité envers Israël, perçu comme le seul empêcheur de faire la paix. Les sondages le révèlent». (2 août 2006).
ENVIRONNEMENTALISME: «Nous disposons de trois parcs nationaux, d'un parc marin, de six réserves écologiques et de quatorze écosystèmes forestiers exceptionnels, toutes des superficies affectées d'un très haut niveau de protection. J'affirme que c'est assez. Ça suffit ! (23 mars 2005)
SOLUTION ENVIRONNEMENTALE : «plus une économie se développe, plus les pollutions se résorbent et disparaissent. Plus la richesse d'une société augmente et plus la qualité de l'environnement s'améliore» (19 avril 2006).
OGM : un immense espoir pour l'humanité, aussi bien sur le plan alimentaire (plantes plus nutritives), que sur le plan environnemental. (9 août 2006)
FRANCE: pays vivant sous un «socialisme d'État hautement dommageable» (23 novembre 2005).
MONDIALISATION ÉCONOMIQUE: phénomène qui «fait reculer la pauvreté, provoque une croissance des revenus et augmente l'espérance de vie chez les peuples qui s'y engagent résolument». (13 juillet 2005).
COUR SUPREME : tribunal «affecté d'une propension quasi-irrésistible à consentir à toute requête invoquant le sacro-saint droit à l'égalité devant la loi. (29 décembre 2004)
ENJEUX : «Il y a d'un côté, le fascisme islamiste et tous ceux qui le tolèrent par lâcheté ou par idéologie; et de l'autre, il y a, comme tout au long du XXe siècle, le camp de la liberté avec, heureusement, l'Amérique à sa tête» (18 novembre 2004)
Marc-André Cyr
(1): Dans l’ordre : Le Quotidien, mercredi 2 août 2006.
(2): Le Quotidien, 8 novembre 2006 et 31 août 2006.
(3): Le Quotidien, 10 janvier 2007, 2 août 2006 et 2 mars 2005.
(4): Le Quotidien, 3 janvier 2007 19 juillet 2006 et 31 mai 2006.
(5): Le Quotidien, 31 août 2006, 4 octobre 2006 et 14 juin 2006.
(6): Le Quotidien, septembre 2006, 26 juillet 2006 et 4 août 2004.
(7): Le Quotidien, 21 août 2003.
(8): Le Quotidien, 27 décembre 2006, 22 novembre 2006 et 29 mars 2006
(9): Le Soleil, 16 novembre 2006
(10): Il cite effectivement l’écrivain fasciste Maurice G. Dantec et possède vraiment un 4X4.
Jacques Brassard : moustachu et pour cause
Par Marc-André Cyr
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