Quels seront les effets du mouvement des « gilets jaunes » sur l'économie ? Si la mobilisation a légèrement décliné samedi, les inquiétudes s'accroissent chez les acteurs économiques et au gouvernement, qui évoque maintenant une « catastrophe ».
« C'est une catastrophe pour notre économie », a déclaré dimanche devant la presse Bruno Le Maire, ministre de l'Économie lors d'une visite aux commerçants à Paris, au lendemain du quatrième samedi de mobilisation des « gilets jaunes ».
D'un côté, le nombre de manifestants a légèrement reculé et les blessés ont été moindres que lors du précédent samedi, marqué par des images d'émeutes à Paris. De l'autre, de nouvelles scènes de violence ont été observées à plusieurs endroits en France, visant souvent des commerces pillés quand ils n'ont pas pris les devants en restant fermés.
« C'est une période où normalement le commerce tourne bien, c'est la veille des fêtes de Noël et, là, c'est une catastrophe », a regretté M. Le Maire, qui se trouvait près de la gare Saint-Lazare, non loin d'un foyer de troubles la veille.
Le ministre a promis « des réponses [...] très directes » aux entreprises touchées, mais a renvoyé la teneur d'annonces concrètes au président de la République, Emmanuel Macron, qui doit présenter plus largement en début de semaine des mesures destinées à apaiser le mouvement.
Auparavant, le chef de l'État recevra lundi syndicats, organisation patronales et associations d'élus.
Le ton des propos de M. Le Maire était plus alarmiste que les précédentes positions du gouvernement : fin novembre, après les premières mobilisations, le ministre n'évoquait qu'un effet « sévère et continu ».
« Cela ne concerne pas que Paris, ça concerne beaucoup de petites et grandes surfaces dans de petites et grandes villes avec des zones d'activité qui sont bloquées », a renchéri dimanche sur la chaîne LCI Olivier Dussopt, secrétaire d'État auprès du ministre de l'Action et des comptes publics.
Les conséquences globales pour l'économie du mouvement, né d'une opposition à la hausse de la taxe sur les carburants puis resté vif après l'annulation de celle-ci, sont encore difficiles à mesurer.
Des estimations de la Banque de France sur la croissance du quatrième trimestre, attendues lundi, en donneront une idée.
Jean Tirole prend position
Mais avant même les troubles du week-end, les remontées de différents secteurs laissaient prévoir une situation dégradée. Dans le commerce, Bercy a évoqué une baisse générale de l'activité, qui va d'au moins 15 % pour la grande distribution jusqu'à 40 % pour les petits commerces.
Le manque à gagner pour les commerçants sera « supérieur à un milliard d'euros », a estimé dimanche sur Franceinfo Jacques Creyssel, délégué général de la Fédération du commerce et de la distribution (FCD).
Du côté du tourisme, les réservations de fin d'années dans les chaînes d'hôtels ont reculé d'au moins 10 %, selon le Groupement national des chaînes hôtelières.
Dans ce contexte, le gouvernement n'est pas seul à exprimer sa préoccupation. La Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) craint « de nombreuses défaillances » de petites entreprises à la suite du mouvement des « gilets jaunes ».
« Rater la fin de l'année, c'est rater son bilan », déclare son président, François Asselin, dans la dernière édition du Journal du Dimanche. « Il y aura donc des lendemains douloureux. »
M. Asselin, qui s'attend à 10 milliards d'euros de pertes globales à cause du mouvement, a formulé plusieurs demandes à Bercy : la réactivation d'une cellule lancée lors des inondations d'octobre dans l'Aude, ainsi qu'un « report des échéances fiscales et sociales » pour les groupes en difficulté.