La Charte de la langue française visait à renforcer le pouvoir d’attraction et d’intégration du français en régissant son usage dans les institutions publiques du Québec, de façon « à faire du français la langue de l’État et de la loi aussi bien que la langue normale et habituelle du travail, de l’enseignement, des communications, du commerce et des affaires ». La Loi 101 n’a pas été conçue contre le bilinguisme individuel, mais contre le bilinguisme institutionnel. Elle visait à faire du français non pas l’une des langues officielles, mais plutôt la seule langue officielle du Québec. Elle devait faire du français non pas la langue des seuls francophones, mais la langue commune de tous les Québécois.
Nous avons circonscrit les mesures les plus structurantes à prendre dans trois grands secteurs, en fonction de leur incidence fondamentale sur la force d’attraction du français et sur son usage comme langue commune. Il s’agit de mesures visant à renforcer le français comme langue de l’éducation, comme langue officielle et institutionnelle, et comme langue de travail.
La langue de l’éducation
Le lien de cause à effet le plus clairement cerné par tous les chercheurs concerne l’incidence des mesures scolaires sur la force d’attraction du français. Le système d’éducation est fondamental pour la transmission d’une langue et d’une culture. C’est un facteur essentiel d’intégration des nouveaux arrivants. L’enseignement collégial et universitaire est une voie majeure d’intégration à l’emploi qui détermine fortement la langue de travail et les transferts linguistiques.1. Modifier la Charte de la langue française pour étendre son application aux écoles privées non subentionnées et au niveau collégial.
2. Accroître le financement du réseau universitaire francophone et établir graduellement les subventions du réseau universitaire anglophone en fonction du poids démographique de la minorité historique de langue anglaise.
Le domaine de la santé s’établit de plus en plus comme l’un, sinon le plus important employeur. Le McGill University Health Center (MUHC) constitue déjà le 4e employeur en importance à Montréal, devant le CHUM.
3. Ne construire qu’un seul mégahôpital francophone à Montréal et prévoir certains accommodements pour que le MUHC puisse y fonctionner. Dans aucun cas on ne doit attribuer de statut anglophone (bilingue anglais-français) au MUHC, car il ne répond pas au critère de l’article 29.1 de la Charte de la langue française. Il ne desservira aucunement une majorité d’anglophones.
La langue officielle et institutionnelle
Il sera difficile d’inciter les entreprises à utiliser le français comme langue commune à l’intérieur du Québec si le gouvernement et ses organismes ne le font pas eux-mêmes. Si les services publics rendus aux nouveaux citoyens sont systématiquement bilingues, ceux-ci concluront que la connaissance du français n’est pas une nécessité.
4. Modifier le statut des organismes reconnus en vertu de l’article 29.1 de la Charte, afin d’assurer que les communications internes se fassent en français et que tout membre du personnel connaisse le français; il faut renverser le fardeau actuel de la demande.
5. Modifier la Loi 101 pour que l’OQLF recouvre le pouvoir d’enquêter et de retirer le statut linguistique de l'organisme ou de l'établissement qui ne satisfait plus à la condition qui lui a permis d'obtenir la reconnaissance en vertu de l’article 29.1.
6. Réviser la Loi sur la santé et les services sociaux pour éviter que l'ensemble des établissements ne soit soumis au bilinguisme fonctionnel et institutionnel. Notamment, les rapports médicaux doivent toujours être en français; une version anglaise pourrait être offerte sur demande.
7. Réaffirmer la volonté de faire du français la seule langue officielle des instances nationales de la législation et de la justice, et s’assurer que des services en français soient offerts automatiquement à chaque étape du processus juridique, et non pas uniquement sur demande. L’article 9 de la Charte doit être modifié afin que tous les jugements rendus et les sentences arbitrales soient publiés automatiquement en français, et que la version française soit officielle.
8. S’assurer que les seuls organismes habilités à donner des services en anglais aux particuliers soient ceux qui desservent principalement la communauté historique anglophone. Les services gouvernementaux nationaux ne doivent pas être offerts en anglais. Toute personne résidant au Québec devrait être fonctionnelle en français, y compris les Québécois anglophones, le français étant la langue commune de tous les citoyens.
9. Que l'indépendance des organismes mis sur pied en vertu de la Charte de la langue française vis-à-vis du pouvoir politique soit assurée.
La langue de travail
10. Mettre en vigueur l’article 16 de la Charte de la langue française et donner à l’OQLF le mandat d’en assurer l’application de façon à ce que les communications écrites de l’administration publique se fassent uniquement dans la langue officielle, c’est-à-dire le français, avec les personnes morales à l’intérieur du Québec.
11. Ajouter au mandat de l’OQLF la tâche d’enquêter d’office sur le respect du droit de travailler en français, notamment en vertu de l’article 46 (exigences linguistiques à l’embauche) et de l’article 45 (embauche interne). Les seuls motifs valables pour qu’un employeur exige la connaissance de l’anglais ou d’une autre langue devraient être liés aux relations à l’extérieur du Québec.
À l’exception de cette dernière proposition, les mesures présentées visent à « débilinguiser » les institutions gouvernementales québécoises. Bien sûr, une série d’autres mesures d’aménagement linguistique seraient utiles. Nous sommes d’accord pour abaisser le seuil actuel de 50 employés au-dessus duquel les entreprises sont actuellement tenues d’obtenir un certificat de francisation, mais il faudrait aussi renforcer le processus de certification, car il ne garantit pas que l’usage du français est généralisé dans l’entreprise. De plus, si le gouvernement continue de communiquer en anglais (traduction de courtoisie, etc.) avec les entreprises établies au Québec, cela revient à tenter de remplir un seau percé à grands frais. Parallèlement, si le gouvernement améliore l’offre de service en francisation, mais que tous les services publics sont offerts aux nouveaux arrivants en anglais, il se tire dans le pied.
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