Dans une entrevue accordée hier à C'est bien meilleur le matin la co-porte-parole de Québec solidaire, Françoise David, faisait la liste de ses demandes pour le prochain budget: éducation, santé, nouvelles places dans les garderies, transport collectif, chantiers écologiques et emplois en région. Cela nécessitera d'importants investissements, mais assure-t-elle, «c'est faisable».
Comment? Par de nouveaux impôts sur les profits des grandes entreprises et sur les grandes fortunes ainsi qu'un statu quo fiscal pour tous les autres. La réponse de Mme David était attendue. Elle est inscrite en bonne place dans le programme de son parti. Un brin ironique, l'interviewer concluait qu'un raz de marée se prépare pour Québec solidaire à la prochaine élection.
Les projets de Québec solidaire sont séduisants, mais l'on se retrouve vite dans l'univers de la pensée magique en croyant qu'il suffit de le vouloir pour le pouvoir. Si cela était, il y a longtemps que le Québec serait une société égalitaire modèle. Mais le réel n'existe pas vraiment pour les militants de Québec solidaire qui aiment mieux passer outre aux analyses économiques démontrant qu'un impôt sur les grandes fortunes ne rapporterait que bien peu eu égard aux besoins de financement énormes que représenterait la mise en oeuvre de son programme, soit plus de 6 milliards de dollars. On aime mieux croire qu'il suffirait de hausser la fiscalité de 4,6 milliards, de créer de nouvelles sociétés d'État, Éole-Québec et Pharma-Québec, pour trouver de nouveaux revenus, puis de retirer les subventions aux écoles privées.
Québec solidaire n'a pas l'ambition de former le prochain gouvernement. Tout au plus espère-t-il atteindre la barre des 5 % des suffrages exprimés à la prochaine élection et faire élire ses deux porte-parole. Pourquoi donc se laisser arrêter par des problèmes auxquels ses candidats ne seront jamais confrontés? L'important est de défendre les idées de solidarité et de générosité qui sont sa raison d'être. De croire qu'il est possible de changer le cours des choses plutôt que de se laisser paralyser par le poids des réalités budgétaires.
De la part d'un nouveau parti on attend bien sûr beaucoup d'enthousiasme en ce qui a trait au changement. On ne sera pas aussi exigeant qu'envers les grands partis établis qui s'échangent le pouvoir en alternance. On attendra plutôt que ce nouveau parti nourrisse le débat politique avec de nouvelles idées. En attendant de prendre le pouvoir, ses projets pourront inspirer d'autres partis. Mais tout de même, ce n'est pas vrai que tout est «faisable» comme s'il n'y avait pas de limite à l'utopie. Québec solidaire n'a-t-il jamais entendu parler des risques de récession et d'une certaine prudence qui s'impose? Dans la longue liste de projets adoptés par ses militants réunis en congrès le week-end dernier, peut-être faudrait-il mettre un ordre de priorités. Rêver à un Québec solidaire est bien, mais encore faudrait-il ne pas croire qu'il suffit de prendre aux riches pour donner aux pauvres.
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