Le déclencheur
« Une enquête du Globe and Mail nous apprenait [le samedi 17 décembre] que Bombardier Transport, dont le siège social est à Londres, avait vendu pour 2,4 milliards de dollars d’équipements à des compagnies de chemins de fer russes en passant par une société-écran dirigée par des proches de l’ancien président d’un monopole d’État, lui-même ami de Vladimir Poutine. Complexe, mais pas surprenant. »
— Jean-Robert Sansfaçon, « Pratiques douteuses », Le Devoir du 20 décembre 2016
Monsieur Sansfaçon,
Vous nous permettrez de réagir à votre éditorial du 20 décembre relatif aux pratiques commerciales de Bombardier en Russie et ailleurs dans le monde. Vous basez votre opinion sur des informations rapportées dans un article d’enquête paru récemment dans le Globe and Mail.
Étant donné la réputation d’indépendance longtemps portée par Le Devoir, nous nous serions attendus à ce que vous nous contactiez avant de le publier pour vous assurer de la véracité des faits allégués. Vous auriez alors su que l’article en question repose sur une série d’informations inexactes desquelles le Globe and Mail a tiré des conclusions non étayées par des faits.
La plus importante de ces conclusions, que vous mentionnez deux fois plutôt qu’une, étant la présumée vente par Bombardier de 2,5 milliards de dollars d’équipements aux chemins de fer russes. Or, sachez que le Globe and Mail a mal interprété la base de données. Certains montants ont été interprétés comme étant en dollars américains alors qu’ils étaient en fait en roubles. Si les montants avaient été calculés correctement, le Globe and Mail aurait réalisé que le montant était plutôt de 150 millions de dollars, soit inférieur de 94 %.
Il s’agit d’une erreur importante, tout comme le fait de croire qu’une partie avec qui nous travaillons est nécessairement illégitime parce qu’elle ne possède pas un immeuble ayant pignon sur rue. Cette dernière, Multiserv, est une société en règle, basée en Grande-Bretagne, qui a fait l’objet d’examens de diligence raisonnable, et dont le mandat est de gérer la logistique liée aux expéditions de composants de nos installations suédoises. Elle assume aussi le risque financier associé aux grandes fluctuations du taux de change qui peuvent découler de la vente de produits en couronnes suédoises à des clients qui paient en roubles russes. Ce type d’activités a lieu tous les jours dans le commerce international.
Aussi, nous nous serions attendus à ce que vous rapportiez une autre conclusion de l’« enquête » du Globe and Mail où il était précisé qu’« aucun élément de la documentation examinée par le Globe and Mail ne suggère une activité criminelle quelconque de la part de Bombardier ». Pourquoi l’avoir omis ?
Au contraire, vous tombez dans la facilité en laissant entendre que, puisque le nom de Bombardier a été indûment mentionné par le passé dans de rares cas de pratiques douteuses, nécessairement la compagnie est coupable d’avoir fait quelque chose d’illégal ou d’immoral. Qui plus est, vous suggérez que les lecteurs seraient naïfs de croire qu’une société qui cherche à vendre ses produits à l’international puisse percer et se maintenir dans des pays aux prises avec des problèmes de corruption sans recourir à des pratiques malheureuses. C’est une affirmation particulièrement tendancieuse, qui ne fait qu’alimenter le cynisme déjà élevé de la population dans cette ère de post-vérité.
Il est décevant que vous ayez choisi cette approche plutôt que de brosser un portrait juste de Bombardier : celui d’une entreprise qui exerce ses activités dans plus de cent pays, qui travaille avec des milliers de fournisseurs et de partenaires, et qui a un historique exemplaire de conformité à toutes les règles et réglementations, y compris aux lois anticorruption.
Il n’y a aucun doute qu’en tant que l’un des plus importants exportateurs du Canada, Bombardier fait des affaires dans des marchés en dehors de l’Amérique du Nord, où les lois diffèrent et où le contexte politique est plus difficile et plus compliqué. Ce qui n’est pas compliqué, toutefois, c’est la façon dont Bombardier se conduit sur ces marchés. En tout temps et dans tous les pays, Bombardier agit en totale conformité avec les lois et son code d’éthique et de conduite interne, un code qui va au-delà des exigences légales.
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